samedi 10 septembre 2022

Discussion imaginaire avec M. partie VII

Si nous pouvions revenir à la première discussion qui n’aura pas lieu, qui n’a jamais eu lieu, que jamais je ne pensais que tu aurais pu être celui qui m’écoutera, comme tu écoutes, physiquement, complétement, dont il ne sera plus possible qu’elle existât un jour ou l’autre, je te lis. Je te lis comme si rien d’autre ne pourra être lu par moi, comme s’il m’était dorénavant interdit de lire, d’écrire, de penser même. Je te lis, M., comme la fin de la recherche, de ma recherche, sans vraiment chercher mais en l’espérant, le souhaitant. Je n’ai plus à rechercher, j’ai trouvé. Sans savoir qu’on le cherchait, on sait, on sent qu’on l’a trouvé, comme une plénitude. Mais y ai-je trouvé la paix ? Un apaisement même momentané ? Et de savoir que je ne devrais plus avoir à écrire, allait-ce être l’enfer ? Un désespoir insurmontable ? Comme une mission que je m’étais imposé que je n’aurais plus à subir, à m’imposer, comme l’on s’impose parfois des plaisirs malsains, sains, heureux, perturbants, savamment perturbants.

Non, j’étais apaisé, heureux que cela existât même si je n’en étais pas l’auteur, heureux peut-être parce que je n’en étais justement pas l’auteur.

Mais vas-tu aussi disparaitre M. ? Vas-tu aussi vouloir tout détruire comme Kafka ou ou ce fameux mystérieux Adler, qui a disparu au point de ne pas avoir existé, vraiment existé, que l’on doute qu’il existât tellement il disparut, comme le prétexte de ce que tu cherches à nous imposer, un jour, à un moment que tu choisiras ? Car tu es, malheureusement pour ceux qui veulent t’aimer en toute indiscrétion, comme un artiste qui peut penser, qui a le droit de penser, que rien ne doit lui survivre au-delà de notre affligeante présence. Comme tu dis, mourir entièrement, complétement, plus qu’assez, en tout cas. Rien ne fut, tout passe qui ne laisse pas d’empreinte.

Il y a des livres que l’on n’a pas envie de finir, pas le droit de finir, qui sont pleins, libres, aérés, denses. Des livres qui nous complètent, qui nous enveloppent, qui parcourent nos vies sans nous lâcher.

 

M.A.  10/09/22

 

 

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