samedi 13 août 2022

Cavanna: "Les yeux plus grands que le ventre" suivi de "Maria"

 



François Cavanna :  Les yeux plus grands que le ventre

 

Un homme qui tente de faire passer un adultère commun pour la souffrance d’un homme qui ne sait pas choisir, qui ne peut choisir. Qui dit qu’il aime l’une et l’autre de la même manière, de la même force.

Il n’a pas pu vivre les instants avec l’une, ni avec l’autre ; imposant à l’une et à l’autre sa vie absence : absence physique pour l’une lorsqu’il était avec l’autre ; et l’absence mentale lorsqu’il était avec l’une, sans pour autant penser à l’autre, sans culpabiliser de penser ne serait-ce qu’un instant à celle avec qui il n’était pas.

3 souffrances, 3 vies souffrantes de non-vie car non entières. Des vies parcellaires pour des souffrances complètes, des souffrances multipliées par trois de la vie des uns et des autres, de ces absences qui se sont superposées.

Et la nôtre de souffrance, en a-t-il pris compte ? De la souffrance qu’il impose à Gabrielle ? A Tina ?

Et nous culpabilisons de penser à celle de Cavanna qui, pourtant, des trois, est sûrement le plus heureux ? Le plus torturé heureux ? Celui qui ne serait heureux que torturé ? Sommes-nous coupable de ne pas le maudire ? Pourtant, nous n’avons de cesse de lui hurler mais choisi, libère l’autre de ta lâcheté.

Et puis, arrive le cinquième livre qui nous laisse espérer qu’enfin ils vont de nouveau être réunis, ceux qui n’ont cessé de s’aimer. Nous le supposons. Nous l’espérons. Il ne peut penser à elle sans qu’elle-même n’en fasse autant. Tous ces kilomètres parcourus à sa recherche ont dû laisser autant d’empreinte sur le chemin de Maria, des traces rapportées à Maria. Mais qu’en a-t-elle fait ?  Cavanna n’a cessé d’aimer Maria, comme celle que l’on cherche toute une vie, que l’on trouve et alors, que l’on ne veut pas perdre. Sauf circonstances particulièrement dramatiques. Au moins une guerre mondiale.




Lorsque nous voyons le titre « Maria », nous repensons aux Russkoffs et leurs chants, ces chants qui foutent « culs par-dessus têtes » nous clament le jeune François. D’ailleurs, ce livre n’est qu’un chant, sur fond de guerre mondiale, mais elle n’est pas pour eux. Ils la traversent, elle n’est que prétexte. Pour devenir drame.

Une autobiographie-fiction, nous prévient-il, dans la préface de Maria.

Mais de quel droit ne nous laisse-t-il pas croire en ces retrouvailles ? Pourquoi nous prévient-il que de tels amoureux peuvent ne pas se retrouver ? Ne se retrouver que dans les pensées d’un homme vieillissant ? Seul ? Désespéré d’en avoir perdu deux pour en retrouver une ? La seule, l’unique. Puis, finalement, ce n’est pas vrai.

Et derrière, nous repensons également à cette pauvre Liliane (« Bête et méchant »), femme torturée, femme torturée car femme, sujet, femme sans autre humanité que celui de procréer.

Donc, je vais commencer Maria, mais parce que cela va être un long parcours jusqu’à la déception, je vais souffrir tout au long malgré l’écriture, les mots et la verve. Maria, restera à jamais la fraiche paysanne Russe des Russkoffs. A jamais.







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