COMITE
CENTRAL D’ARTILLERIE DE LA SEINE
RAPPORT À LA
COMMUNE DE PARIS
10 germinal an
79.
Citoyens,
Dans la
grande Révolution qui vient de s’accomplir, l’artillerie a joué
un rôle que vous n’avez pas méconnu, quoique bien imparfaitement
organisée encore. Elle a encore une bien belle mission à remplir,
celle de sauvegarder l’œuvre de la Révolution.
Créé dans
ce but et bien pénétré de l’importance de cette mission, le
Comité central d’artillerie, sans ressources aucune, grâce à son
énergie et à ses aptitudes diverses, est arrivé à des résultats
qui, vu le point de départ, sont immenses.
Par suite de
la honteuse capitulation de Paris, de l’ineptie et de la trahison
de l’Assemblée nationale, complétant l’infâme marché passé
avec la Prusse, l’artillerie auxiliaire a été licenciée. Par
suite encore de la défection à la cause démocratique par les chefs
supérieurs de l’ancienne légion de l’artillerie de la garde
nationale, celle-ci est tombée dans une impuissance absolue et un
désarroi complet.
Mais le
peuple, toujours vigilant et jaloux de la souveraineté qu’il a su
conquérir, a vu qu’il y avait là un danger auquel il fallait
échapper rapidement.
Aussi
pendant que la garde nationale serrait ses rangs et donnait naissance
au Comité central, les artilleurs de toutes les batteries
auxiliaires et de la garde nationale se sont mis sous le même
drapeau, et ont nommé leurs délégués chargés d’organiser
l’artillerie de la Seine.
Ces délégués
forment le Comité central d’artillerie. Les travaux de ce comité
sont multiples et se divisent en quatre sections générales :
Première
section. — Organisation et fusion des deux corps d’artillerie,
formation par légion d’arrondissement et par batterie
Deuxième
section. — Recherche du matériel, canons, obusiers, mitrailleuses,
munitions de guerre de toute espèce, groupement et classement de ces
divers engins.
Troisième
section. — Organisation des ateliers de confection de munitions
d’artillerie.
Quatrième
section. — Réparation et étude des plans de défense extérieure,
de concert avec la commission militaire de la Commune.
TRAVAUX DE LA
PREMIÈRE SECTION.
L’organisation
par légion d’arrondissement est presque achevée. Quatorze
arrondissements ont terminé leur contrôle et formé leurs cadres ;
les autres sont en voie de formation et seront au complet le 1er
avril.
Le
contingent des adhérents s’élève aujourd’hui au chiffre de 3
500 hommes.
La fusion de
l’artillerie auxiliaire avec les adhérents au Comité central
sortant de l’artillerie de la garde nationale est un fait accompli.
Pour amener
cette fusion à bonne fin, il a fallu épurer les deux corps et ne
conserver que les éléments républicains.
Pour
l’artillerie auxiliaire, la chose était facile ; dissoute et
licenciée, il n’y a eu qu’à choisir les hommes et les renvoyer
chacun dans son arrondissement respectif. L’artillerie de la garde
nationale, dite légion Schœlcher, n’est pas dans le même cas.
Faisant
partie de la garde nationale, elle est restée armée. Composée
d’hommes d’arrondissements divers, il a fallu, après les avoir
passés au crible, incorporer chacun des adhérents au Comité
central dans son arrondissement.
Mais
néanmoins la légion existe encore, et les éléments mauvais et
dangereux y sont restés. Aussi le Comité central de l’artillerie
de la Seine, considérant :
Qu’il est
seul organisé suivant l’esprit de la fédération de la garde
nationale ;
Qu’il est
seul reconnu par le Comité central ;
Que la
légion Schœlcher entrave ses travaux et donne un appui à la
réaction ;
Vu les
armes, les munitions et les finances dont elle dispose encore,
Demande : Un
décret de dissolution de la légion Schœlcher, avec ordre de
remettre au Comité central d’artillerie armes, munitions et
finances.
DEUXIÈME
SECTION.
Pour la
recherche et le classement du matériel, pièces et munitions, une
commission d’armement a été nommée.
Cette
commission fait une enquête sévère sur les pièces, les munitions
et les poudres réparties dans les parcs et poudrières des divers
arrondissements, dans les ateliers civils de construction et dans les
casernes.
Elle a
requis et rassemblé une quantité considérable de poudres et de
projectiles, approvisionné les pièces de l’Hôtel-de-Ville, où
le jour de l’installation du comité d’artillerie il n’y avait
pas de quoi tirer un seul coup de canon.
Elle a armé
à nouveau un grand nombre d’artilleurs auxiliaires avec des armes
requises au fort de Vincennes. Ces hommes, avec les adhérents de la
légion Schœlcher, ont fait et continuent à faire un service
régulier à l’Hôtel-de-Ville et aux différents parcs au pouvoir
du Comité, et à l’arsenal.
Le Comité
central d’artillerie de la Seine,
Considérant
:
Qu’il est
urgent d’armer et d’équiper tous les artilleurs incorporés,
Demande :
Un décret
qui ordonne à tout détenteur et fabricants d’armes, de munitions,
de matériel et d’effets d’équipement pour l’artillerie, de
les mettre à la disposition du Comité central.
TROISIÈME
SECTION.
Une
commission de fabrication, composée d’un ingénieur, d’un
artificier chef et d’un ouvrier d’arsenal, a commencé
l’inspection des divers ateliers et fabriques de munitions.
Cette
commission a commencé son travail par Montrouge ; le Comité attend
son rapport.
Le Comité
central d’artillerie,
Considérant
:
Qu’il ne
peut se séparer des ateliers de fabrication de ses munitions, et
qu’il doit en avoir direction.
Demande :
Un décret
de mise en possession et direction de ces divers ateliers.
QUATRIÈME
SECTION.
En prévision
des événements qui auraient pu arriver et vu l’urgence, le Comité
central 
d’artillerie
a fait une inspection des forts et fortifications de la rive gauche
pour pouvoir au besoin parer à une attaque de ce côté ;
Il connaît
l’état des lieux du plateau de Châtillon, des forts environnants,
et, d’un autre côté, il a visité les bastions 21, 22, 23et 24 du
côté du nord ; il demande à la commission militaire de la Commune
de s’entendre avec elle au sujet de l’armement de ces divers
points.
Le Comité
central d’artillerie,
Considérant
:
Pour
continuer et étendre des moyens de défense,
Demande :
D’être
mis en possession des archives de l’ex-état-major de l’artillerie
de l’armée, et de celles de l’état-major de la légion
Schœlcher.
Citoyens
membres de la Commune,
Le Comité
central d’artillerie de la garde nationale de la Seine, qui a pris
l’initiative de ces travaux alors que tout était désorganisé,
veut continuer son œuvre.
Confiant en
votre patriotisme, il espère que son rapport sera accueilli
favorablement, qu’il sera son rapport sera accueilli favorablement,
qu’il sera fait droit à ses justes demandes, et par suite à la
conséquence du Comité central d’artillerie de la garde nationale
de la Seine, par un décret.
Vive la
Commune de Paris !
Vive la
république démocratique et sociale !
Approuvé :
La Commission exécutive ; E. VAILLANT, G. TRIDON, FÉLIX PYAT.
N.-B. — Le
comité central d’artillerie fait remarquer que ce rapport a été
présenté à la Commune le 31 mars 1871, par le citoyen Cluseret, et
que par suite de l’approbation de la commission exécutive de la
Commune, les demandes contenues dans ce rapport ont force de décret.
 
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