mercredi 8 décembre 2021

Les vies d'Alexandre Jacob par Bernard Thomas

 "Devons-nous rester à jamais repliés sur nous-même? commenta Malato le soir où ils se retrouvèrent à Lyon. Nous avons été bien contents de les trouver pour arracher à Cayenne les compagnons déportés. Et Zola, était-ce si dégradant? La Ligue des Droits de l'homme serait la succursale du Grand Orient? Je le veux bien. Elle nous a aidé à faire libérer cinq des nôtres. Et alors? C'est une maladie honteuse? Cyvoct leur doit la vie. Monod est mort aveugle, mais en France, grâce à eux, Liard-Courtois peut les remercier d'avoir échappé à cinq ans supplémentaires. Qu'est-ce que tu veux, je ne peux pas donner tort à Sébast. Si nous étions assez riches pour nous passer d'eux, évidemment, cela changerait tout...

Après cela Faure flirtait-il avec la maçonnerie? Bien entendu. Et puis? Était-ce une trahison? Bien des compagnons avaient soudain découvert à l'occasion du combat commun mené en faveur de Dreyfus que la maçonnerie ne rassemblait pas que des grenouilleurs du bénitier à oseille. On trouvait au Grand Orient des gens ouverts aux idées nouvelles. On n'y prêtait pas serment sur la bible. On s'y battait contre le racisme, contre les curés, contre les rentiers, ces barbeaux de la bourse, ces maquereaux du capital, ces rats puants piqueurs de la galette, cintre les culs bénits. On y travaillait à sa manière au bonheur de l'homme. On y croyait à l'amélioration possible du sort des malheureux. Rien de vraiment déshonorant."

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