dimanche 12 décembre 2021

MÉMOIRE (SA GENÈSE, SON ÉVOLUTION, SA CULTURE) encyclopedie anarchiste de Sébastien Faure

 


Si l'on excepte les mots techniques ou désignant quelque objet ou acte incomplexe, la plupart des termes du langage courant ont des acceptions multiples ou vagues, soit par l'effet des fluctuations de l'usage, soit en raison de la difficulté qu'il y a à délimiter le concept qu'ils expriment. Le mot mémoire est au nombre de ces derniers. Quelle est l'essence, quelle est l'étendue des phénomènes que symbolise le vocable mémoire ? Dans son sens le plus large, le mot mémoire exprime la persistance du passé dans le présent, « un effet consécutif d'événements disparus sur les phénomènes actuels ». (H. Piéron). Mais alors, il faut en doter les corps bruts. Auguste Comte a écrit : « La faculté de contracter de véritables habitudes, c'est-à-dire des dispositions fixes, d'après une suite suffisamment prolongée d'impressions uniformes, faculté qui semblait exclusivement appartenir aux êtres animés, n'est-elle pas aussi clairement indiquée, pour les appareils inorganiques eux-mêmes. » En vibrant, les instruments de musique acquièrent la propriété de vibrer davantage. L'usage les rend plus sonores. Or, nous dit le professeur Pierre Delbet : « L'habitude (voir ce mot) est une mémoire. On peut aussi bien dire inversement que la mémoire est une habitude. Il n'y a pas de différence entre les deux phénomènes. » C'est là l'opinion de beaucoup de physiologistes qui admettent une forme inorganique de la mémoire. « Qu'est-ce que la déformation de l'épine dorsale contractée, chez tant de jeunes enfants, à la suite d'une position vicieuse habituelle ? C'est tout simplement le signe extérieur, la preuve de la mémoire du rachis. » (Van Biervliet). Une mauvaise direction pédagogique déforme le corps comme l'esprit, Le magnétisme rémanent, les transformations moléculaires d'un métal sons l'influence de vibrations longtemps épétées, l'image photographique révélée longtemps après exposition sont évidemment le prolongement, dans les réactions présentes d'une action passée. Si cette extension du mot mémoire au domaine dé la matière brute est souvent rejetée, on fait moins de difficultés pour admettre la mémoire biologique. On a vu, dans la mémoire, un phénomène de résonance caractéristique de la vie (Le Dantec). L'héritage dans une lignée serait un fait de mémoire. (Richard Semon ; Eugénie Rignano). L'immunité acquise après certaines maladies ou certaines inoculations serait comparable à un souvenir. Et les expériences de Pavlov et de ses élèves viennent appuyer cette manière de voir. Voici l'une des plus récentes. Si l'on injecte une albumine dans le péritoine d'un animal, ce dernier réagit par une sécrétion qui neutralise les effets de la substance injectée. Que l'on répète souvent l'épreuve en l'accompagnant de l'émission d'une même note de musique, il arrivera un moment où le seul excitant musical, sans injection d'albumine, suffira à provoquer la sécrétion coutumière. Il y a là un fait de tout point comparable au ravivement d'un souvenir par l'effet d'une sensation qui lui a été antérieurement associée. La mémoire psychologique, à son tour, comporte une infinité de degrés dont les premiers se relient aux formes précédentes. Ce sont des animaux inférieurs qui placés en aquarium prennent leurs attitudes habituelles à l'heure de la marée dont ils ne ressentent plus les effets. Ce sont des rythmes qui persistent lorsque la cause qui leur avait donné naissance s'est inversée. L'homme qui est appelé à travailler de nuit, conserve, quelques jours, le minimum de température nocturne que le repos ne motive plus. Cependant. dès que l'on s'élève dans la série animale, un facteur nouveau apparaît ou du moins devient prépondérant (car il se manifestait déjà dans les expériences de Pavlov) : c'est la mémoire associative. « La mémoire associative consiste essentiellement en ceci qu'une réaction provoquée par un facteur apparaîtra sous l'influence d'une autre facteur qui aura été plus ou moins souvent associé au premier. » C'est le chien qui las d'être enfermé manifeste sa joie lorsque son maître et son chapeau. C'est le bébé qui remue avidement les lèvres lorsqu'il voit allumer le réchaud sur lequel on fait tiédir sa bouillie. La mémoire humaine ne paraît différer de la mémoire animale que parce que l'individu prend connaissance de lui-même par le dedans, c'est-à-dire subjectivement. L'influence du passé dont le physiologiste (qui l'étudie du dehors, objectivement) reconnaît le caractère matériel, se manifeste à nous par des images qui semblent insubstantielles. Nous nous figurons que le passé se représente à nos yeux. Pourtant la mémoire résulte du jeu d'une fonction comme toute autre ; l'acquisition des souvenirs se fait suivant une loi semblable à celle qui régit certaines réactions physicochimiques. En adoptant la définition la plus générale du fait de mémoire nous ne trouvons pas de solution de continuité entre le monde inorganique et le spécimen le plus évolué des êtres organisés ; l'application d'une même désignation à l'ensemble est justifiée. Les psychologues, pour la plupart, repoussent cette extension. Certains, comme Th. Ribot ont laissé de côté les faits physiques et les habitudes du monde végétal. D'autres, plus rigoureux ne veulent comprendre dans le concept mémoire que ce qui est reproduction spontanée et non simple conservation « alors le souvenir doit être défini, non plus un état qui dure, mais un état qui renaît. » (Dugas). ‒Où serait-il entre son origine et sa renaissance ? ‒En outre, il n'est point « le retour fixe, à intervalle régulier, la persistance rythmique de perceptions passées, mais le retour incertain, à un moment quelconque, de ces perceptions. » Réaction appropriée aux circonstances « elle est un phénomène d'adaptation. » ‒Il est pourtant des souvenirs fâcheux, d'effet nuisible. Il se distinguerait des habitudes, uniformes, involontaires, car il est variable et conscient ‒et les obsessions ? ‒Enfin le souvenir est intégré dans notre personnalité. « Un souvenir c'est un événement qui n'est pas seulement venu à telle heure dans ma vie, mais qui l'a marquée plus ou moins. » « Le souvenir doit avoir sa localisation dans le temps et son attribution au moi. » Si subtile que soit cette définition, qui, à la rigueur, pourrait s'appliquer à des animaux très inférieurs, elle a son utilité si elle ne tend qu'à circonscrire et à réciser le caractère de la mémoire humaine, la plus développée, la mieux nuancée, en laissant de côté la genèse de la fonction. En réalité nous sommes bien en présence d'une série continue. Au point de départ, la mémoire passive ou inerte, fragmentaire. Au point d'arrivée, la mémoire active ou vive, systématisée. D'un bout de la chaîne à l'autre la passivité se réduit et l'activité s'accroît. Mais ni l'une ni l'autre, n'est jamais totalement absente. Un choc laisse une trace sur la pierre qui le subit passivement, mais ce choc prolonge activement ses effets : l'ébranlement moléculaire consécutif, la dégradation de la surface moins résistante aux agents naturels. À l'opposé, lorsqu'un souvenir paraît surgir spontanément, entrer en activité au moment favorable pour nous, il faut bien qu'il ait son origine dans des empreintes, des modifications de la matière organique dont notre corps est composé. La systématisation, nulle au début de la série, se développe de même progressivement à mesure que les connexions cellulaires et nerveuses prennent de l'importance. Il est important de remarquer que « la mémoire doit être regardée comme une fonction dynamique et non comme un magasin d'images ». (Von Monakow, Piéron). Il faut se garder de considérer un souvenir comme un minuscule cliché conservé dans une cellule de notre cerveau. Celles-ci sont assez nombreuses pour suffire à tous nos besoins (plus de neuf milliards dans la seule écorce cérébrale), mais toute perception complexe qui pénètre en nous se décompose en éléments. « La mémoire n'est pas autre chose que le renforcement, la facilitation du passage de l'influx nerveux dans certaines voies... La mémoire ne réside pas dans l'image, considérée comme un ensemble statique, mais dans le pouvoir dynamique de reconstitution de la perception, dont les éléments ne sont autres que des sensations, sensations ravivées, sensations suscitées par une excitation d'origine centrale au lieu de l'excitation périphérique habituelle, sensation qui pourrait aussi bien être provoquée par une excitation électrique artificielle si nous pouvions limiter celle-ci aux éléments corticaux utiles. » (Piéron). On a souvent opposé à la mémoire, l'intelligence et la raison. Assurément, tant qu'il n'y a rien de plus que la conservation de l'empreinte du passé, qu'il s'agisse de matière inorganique (cas de la loi de Lenz-Le Chatelier) ou d'êtres vivants (sensibilité différentielle) il peut y avoir réaction adaptée, mais c'est seulement quand il y a liaison entre les traces laissées dans l'organisme par des sensations simultanées que le psychisme peut s'ébaucher et quand des relations s'établissent entre des ensembles de sensations ou phénomènes consécutifs, que la raison commence à se manifester. L'intelligence est la connaissance des rapports entre des phénomènes qui se sont succédé. Il ne peut y avoir intelligence sans mémoire. Toute opération intellectuelle comporte une association d'idées et cette association n'est possible que grâce à la conservation de souvenirs intégrés à notre personnalité. De même que l'assimilation des éléments par notre corps rencontre une limite, l'intégration dans notre personnalité mentale de la multitude d'impressions qui nous assaillent est soumise à des conditions, elle a des bornes, reculées sans doute, mais que ne sauraient être transgressées sans risque de fourvoiement. Un afflux trop considérable et trop précipité d'impressions provoque l'affolement de notre esprit, l'impossibilité d'un classement, d'une élaboration qui ne peut résulter que d'une fusion des sujets nouveaux avec l'essence des événements passés. Faute d'un choix parmi les sensations perçues, leur masse confuse sera rejetée en bloc, sans avoir été digérée, sans avoir nourri l'esprit. C'est le cas des mémoires brutes, automatiques. Comment s'opère le choix des éléments à retenir ? Il exige d'abord l'attention, l'intérêt porté à une certaine catégorie de phénomènes. « Quand on ne sait pas ce que l'on cherche, on ne comprend pas ce que l'on trouve », a dit Claude Bernard. On encombre son cerveau de matériaux inutilisables qui s'éparpillent après en avoir disloqué le tissu fragile. Normalement, le plus grand nombre, parmi les collections d'impressions reçues, ne rencontrant pas de semblables dans le contenu de notre appareil psychique, passe inaperçu ou tombe presque aussitôt dans l'oubli. L'oubli est la condition même de la mémoire associative. Parmi les faits retenus, une discrimination s'effectue. Ceux qui concordent avec des expériences maintes fois reproduites, qui ont provoqué des réactions constantes de notre comportement, servent simplement à renforcer ces réactions, à consolider une habitude. Quant aux autres, après une confrontation immédiate ou différée, suivant les cas, avec les données antérieurement enregistrées, ils sont incorporés à notre patrimoine intellectuel. Tout fait qui prend place parmi nos souvenirs a été l'objet d'un jugement préalable ; à son tour il est le point de départ de nouveaux jugements. Mémoire, association et raison progressent de conserve. Le fait de mémoire, nous l'avons dit, n'est pas une image qui se dévoile, le passé qui se reproduit intégralement. Nous ne vivons que dans l'instant présent, présent qui est constitué par la synthèse de toute notre vie passée (passé ancestral compris, au moins pour la partie qui n'a pas été éliminée au cours des réductions génétiques.) Le souvenir d'un événement passé n'est jamais que le passé influencé par tout ce qui nous est survenu depuis. Ceci est important lorsqu'il s'agit d'apprécier la valeur des témoignages. Le témoin le plus sincère peut, à son insu, dénaturer la vérité. On peut même avancer qu'aucun témoin ne rapporte la vérité intégrale. Celle-ci ne peut venir, et encore à grand peine, que de la confrontation d'un grand nombre de témoignages. Testis unus, testis nullus. La mémoire n'est pas une faculté complètement individualisée. Elle est d'origine sociale pour une large part ; et cela explique la richesse comparative de la mémoire humaine. Halbwachs a publié un ouvrage sur « les cadres sociaux de la mémoire » où sont étudiés « les caractères et les conditions de ces souvenirs précis, déterminés, localisés et datés, relatifs à des événements qui n'ont eu lieu qu'une fois et qui ne se sont jamais intégralement reproduits ». « Ce n'est donc pas de notre mémoire proprement personnelle que notre passé tient la consistance, la continuité, l'objectivité en un mot, qui le caractérise à nos propres yeux... il les doit à l'intervention de facteurs sociaux, à la perpétuelle référence de notre expérience individuelle, à l'expérience commune à tous les membres de notre groupe, à son inscription dans des cadres collectifs auxquels les événements se rapportent au fur et à mesure qu'ils se vivent, auxquels ils continuent d'adhérer une fois disparus et au sein desquels nous en effectuons non seulement la localisation, mais même le rappel. » (Blondel). « Comme la perception générique, le souvenir proprement dit est l'acte d'une intelligence socialisée et opérant sur des données collectives. » Pourtant l'action du milieu social sur l'individu ne s'exerce pas toujours dans un sens favorable. Nous avons vu que dans la série animale le progrès de l'intelligence était parallèle à celui de la mémoire en voie d'organisation. Il en a été sans doute de même au début des sociétés humaines. De la haute perfection de la mémoire au début de la période historique, nous avons la preuve dans la transmission orale des légendes et des longs poèmes, dans le rôle de la tradition dans l'évolution des sociétés et la conservation des connaissances techniques. Il semble que depuis lors la capacité mnémonique se soit restreinte plutôt qu'accrue, du moins relativement aux exigences de la vie. « Les intelligences individuelles ne paraissent pas non plus progresser nécessairement dans leur niveau moyen pour ce qui est des races depuis longtemps civilisées ; le savoir seul est en croissance. Le progrès mental est incontestable mais il concerne le savoir ; or le savoir n'est plus individuel ; il n'est pas héréditaire non plus, semble-t-il, il est social. L'évolution biologique de la mémoire paraît terminée ; mais il existe en outre une évolution sociale de la mémoire qui, à notre époque, est déjà singulièrement avancée. » (Piéron). Le volume moyen des cerveaux reste le même, les bibliothèques s'agrandissent. « Mais le progrès risque d'être enrayé par la charge de plus en plus lourde des acquisitions antérieures que doivent traîner les générations nouvelles ; la force excessive de la mémoire sociale devient réellement dangereuse pour l individu qu'elle emprisonne et qu'elle stérilise ». (id.) Quelle direction devons-nous donc donner à l'enseignement théorique et technique pour que le savoir ne porte pas préjudice à l'intelligence ? Devons-nous tenir pour suspecte une très bonne mémoire ? Non, Comme le fait remarquer P. Delbet : « C'est une grande force de pouvoir évoquer d'un coup un nombre considérable de souvenirs, de façon à envisager les phénomènes au point de vue le plus général. » Il dit encore : « Pour moi qui fais passer des examens de chirurgie, la question est celle-ci. En présence d'un malade, le candidat devenu médecin, retrouvera-t-il ses souvenirs ? L'excitation causée par la constatation d'un symptôme sera-t-elle suffisante pour faire entrer en fonction ses cellules cérébrales ? Si oui, le candidat sait. Si non, il ne sait pas. Ses connaissances sont pratiquement inutilisables ; elles sont comme si elles n'étaient pas. » Il faut donc cultiver la mémoire. Et cette culture est à la fois psychologique et physiologique. Les impressions pénètrent en nous par les sens. Il faut donc développer, aiguiser, fortifier les sens. Œuvre de détail et aussi d'ensemble, car le fonctionnement des organes de relation est dans la dépendance de la santé générale. Il faut que les impressions ne soient pas fugitives, ce qui réclame l'attention, d'abord sensibilité soutenue de tout l'organisme à tout changement, état qui ressortit au tonus musculaire et nerveux, puis concentration de cette sensibilité sur un objet spécialement choisi dans l'ensemble des faits particuliers qui composent le phénomène total observé. Ceci réclame la mise en jeu de l'énergie psychique et aussi de l'activité de tout l'être, car il faut analyser le phénomène, raviver les souvenirs anciens pour établir des relations entre les impressions. passées et celles du présent, enfin introduire celles-ci dans la personnalité. Ceci constitue un jugement. L'intégration à la personnalité resterait précaire, si le souvenir qui vient d'être emmagasiné demeurait inerte. Il faut donc qu'à son tour il soit le point de départ de processus analogues, qu'il entre fréquemment en activité. Perfectionnement de la sensation, de l'attention du jugement, de l'activité, voilà en quoi consiste la culture de la mémoire. Et la recherche de ces qualités serait compromise si l'état physique de l'individu n'était pas lui-même l'objet de soins assidus. La mauvaise opinion que nous avons de la mémoire vient de ce que nous confondons les souvenirs dus à un travail personnel avec la mémoire paresseuse ou infirme qui consiste à retenir des jugements tout faits sur des objets que d'autres ont observés, à saturer le cerveau de reflets de deuxième ordre. Devons-nous aller jusqu'à rejeter l'expérience de nos devanciers, former les esprits en leur faisant parcourir à nouveau le cycle d'essais et d'hypothèses qui ont amené la science à son état actuel ? Cela serait impraticable. D'ailleurs, durant le premier âge, l'enfant est naturellement conduit à utiliser à la fois l'expérience des adultes qui l'entourent et la sienne propre ; sa raison naissante a besoin du secoursde leur raison. Mais c'est à des objets qui sont à sa portée, aux événements de sa vie même que doivent se rapporter les règles logiques dont on lui montre l'usage. L'enseignement des sciences devra être accompagné d'un résumé de leur histoire. La répétition du processus de découverte est même de rigueur pour quelques lois essentielles. Ainsi, sans surcharger la mémoire de l'enfant, en fera naître en lui l'ambition de créations personnelles ou tout au moins de combinaisons nouvelles. On a prétendu soulager la mémoire grâce à des procédés artificiels dits mnémotechniques. Tout l'exposé que nous avons fait condamne ces artifices le plus souvent puérils. Le véritable appui de la mémoire est l'intérêt que porte l'élève au sujet étudié, s'ajoutant à la conscience qu'il prend des liens logiques qui l'unissent aux connaissances déjà acquises. L'apprentissage doit s'inspirer des mêmes principes. L'habitude, nous l'avons vu, n'est qu'une forme de la mémoire. Si celle-ci risque d'être automatique et bornée, celle-là peut devenir routinière et exclusive. La formation professionnelle ne doit pas se restreindre à une spécialité unique. Le degré d'entraînement d'un organe et d'une faculté isolés est limité ; pour gagner un échelon, il faut faire profiter l'ensemble. Il y a un équilibre obligé dans le jeu de tous les appareils vitaux ; l'éducation technique est dans la dépendance de la culture générale, elle requiert une sensibilité étendue, du jugement, une personnalité puissante. Le développement du machinisme moderne, séparant la pensée de l'action, uniformisant et disciplinant sévèrement les gestes, refrénant les initiatives, abolissant la personnalité, met en danger la civilisation plus encore que l'esclavage antique. Étroite spécialisation, taylorisation du travail non compensée par la variété des occupations, autant de menaces pour l'intelligence humaine. ‒

G. GOUJON.

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