samedi 28 avril 2018

Journal de la Commune


Citoyens, gardes nationaux,


Brutalement provoqués, vous vous êtes levés spontanément pour assurer par votre attitude la mission que vous nous aviez confiée.
La tâche est ardue pour tous : elle comporte beaucoup de fatigues, beaucoup de résolution, et chacun a fait preuve du sentiment de ses devoirs.
Quelques bataillons cependant, égarés par des chefs réactionnaires, ont cru devoir entraver notre mouvement par une opposition incompréhensible, puisqu’elle apporte un obstacle aux volontés de la garde nationale.
Des maires, des députés, oublieux de leurs mandats, ont encouragé cette résistance.
Une partie de la presse, qui ne voit pas dans dépit l’avènement du monde des travailleurs, a répandu sur nous les calomnies les plus absurdes, rééditant les épithètes de communistes, de partageux, de pillards, de buveurs de sang, etc. ; et des citoyens craintifs ont ajouté foi à ces mensonges. Mais nous avons laissé passer cet orage ; nous apportions les libertés soustraites ; et, bien qu’on s’en servît contre nous, nous avons dédaigné l’abus.
On a agité le fantôme prussien, menacé du bombardement, de l’occupation, etc., et les Prussiens, qui nous ont jugés à notre valeur, ont répondu en reconnaissant notre droit.
La cause de la démocratie, la cause du peuple, la sainte cause de la justice et de la liberté doit triompher de tous les obstacles, et elle en triomphera.
Quant à nous, sûrs du succès de l’oeuvre commune, nous vous remercions avec effusion de votre dévouement en face des fatigues d’un service extraordinaire ; nous comptons sur votre courage pour aller avec nous jusqu’au bout. Nos adversaires, mieux éclairés, quand ils auront compris la légitimité de nos revendications, viendront à nous, ils y viennent déjà chaque jour, et dimanche au scrutin, il n’y aura définitivement au chiffre des abstentions que ceux qui caressaient traîtreusement l’espérance d’un retour à la monarchie et à tous les privilèges et aux institutions plus ou moins féodales qui en sont le cortège obligé.
Citoyens, gardes nationaux,
Nous comptons sur votre courage, sur vos efforts persévérants, sur votre abnégation et votre bon vouloir en présence des charges du service, des croisements d’ordre qui peuvent se produire et vos fatigues de tous les jours.
Marchons fermement au but sauveur ; l’établissement définitif de la République par le contrôle permanent de la commune, appuyé par cette seule force : la garde nationale élective dans tous les grades. Quand nous pourrons avoir les yeux partout où se traitent nos affaires, partout où se préparent nos destinées, alors, mais seulement alors, on ne pourra plus étrangler la république.

Hôtel-de-Ville, 24 mars 1871.
(Suivent les signatures.)


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