« La moralité consiste dans
un certain » ensemble d’idées, de croyances, de sentiments, de » tendances
naturelles ou acquises dont il est possible » de déterminer les formes, les
causes et les effets. »
« ...On peut concevoir une
sorte de morale sans moralité. Supposons, en effet, que la moralité humaine se
montre à qui l’étudie dans la conscience et dans l’histoire comme un fait
éminemment variable, susceptible de prendre les formes les plus diverses, contradictoires
même, sans qu’on puisse démêler de loi fixe et générale qui permette
d’expliquer ces variations. Dans cette hypothèse, il sera impossible de tirer
de l’étude de la moralité aucune indication pratique : c’est la conclusion du
scepticisme moral. Pourtant, même dans cette hypothèse, un art de vivre reste
encore possible, mais à la condition d’en placer les bases en dehors de la
moralité.
» - Aristote enseigne que la moralité existe
avant la morale et en dehors d’elle. Epicure fait complètement abstraction de
la moralité donnée dans la nature humaine et ne se préoccupe en aucune façon de
la justifier ou de l’expliquer. - Le christianisme a donné pour base à la
moralité, non la science, mais la foi ; non l’esprit, mais le cœur. » (Encycl.)
» - Rapport de la conduite avec la morale
(moralité des actions). Mœurs (homme sans moralité). (Larousse). » Antonyme :
immoralité (voir ce mot).
Dans un milieu social où une
morale, règle (ou est censée régler), les actions des individus, est d’une
haute moralité, celui qui vit (ou qui a l’air de vivre) en se conformant
strictement aux lois qu’impose cette morale ; est sans moralité celui qui
transgresse ces lois. Entre ces extrêmes s’échelonnent tous les degrés. La
moralité a varié et varie selon les époques et les milieux. Le Carthaginois qui
sacrifiait son fils au Dieu Moloch, le nègre qui mangeait son vieux père pour
lui assurer une sépulture honorable ; le patriote qui est parti, en 1914, vers
les frontières, plein de foi et d’ardeur étaient loin de se croire immoraux.
Pour un amoral, pour celui qui « ne fait pas à autrui ce qu’il ne voudrait pas
qu’on lui fit », la moralité d’un individu a pour critérium sa loyauté. Je ne
me permets pas de juger autrui lorsque ses actes n’ont, sur moi, aucune
répercussion. Au nom de quoi me permettrais-je d’apprécier sa moralité
lorsqu’il ne porte pas le moindre ombrage au libre épanouissement de ma
personnalité ? Par contre, si je passe un libre contrat avec lui, il est
indispensable que les modalités de ce contrat s’accomplissent loyalement de
part et d’autre. Sans cela rien de possible... fors les rapports immoraux de la
société présente.
On a, de tout temps, écrit
pour moraliser les individus, c’est-à-dire pour créer ou renforcer en eux une
moralité. Certaines œuvres comiques du moyen-âge portaient même le nom de
moralités. Elles avaient pour but de « corriger les mœurs par le ridicule et de
présenter non pas un vice particulier, un travers personnel, mais des travers
et des vices généraux en rassemblant sur un même individu les traits épars qui
caractérisent tel ridicule ou tel défaut, en créant des types de tel ou tel
vice, qui représentent ce vice dans sa généralité. » (Encycl.). On dit encore :
la moralité d’une fable, d’une pièce de théâtre, d’un livre. Dans la fable
(voir ce mot), la moralité vient en conclusion du récit pour éclairer,
conseiller, faire toucher du doigt la réalité de la vie. Dans l’œuvre d’art
(roman, théâtre, poésie), la moralité est le but apparent ou caché que l’auteur
a poursuivi. Il est arrivé que des pudibonds - ou des hypocrites - se sont
effarouchés de « l’immoralité » de certains écrits. C’est au nom de la «
moralité outragée » qu’on a condamné de purs chefs-d’œuvre. C’est également au
nom de la moralité du jour qu’on inculque aux jeunes générations, à l’église ou
à l’école, cette masse effarante de préjugés qui entravent d’un poids si lourd
l’évolution de l’humanité.
Rejetons donc ce vocable
périmé et sachons nous rendre maîtres de nos destinées en nous affranchissant
de toute tyrannie.
CH. B.
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