"Pour moi, écrire était vivre (même si écrire c était, d'une certaine manière, aller a contre-vie): a partir du moment où je n écris plus, où je suis sans avenir, ou vivre serait survivre (alors que vivre n est pas survivre), à quoi bon continuer cette vie qui pour moi n'en est pas une? "
"Oui, j avais raison: perdre l écriture, c'est bien perdre la vie, mais pourquoi le désir d'écrire survit il a ma raison de vivre? - parce que mon identification a "Roger Laporte" a été si forte qu'elle subsiste ou persiste en creux, une fois la "chose" retirée ( avec mon consentement!) dans son lointain. Comme je le craignais - je l ai écrit des la première page de ce carnet -, je tombe dans un " triste bavardage autobiographique" dont je ne veux pas."
"Tant que j'écris, aussi longtemps que j'écris, que je dois écrire, l'épreuve, c est en même temps la chance : d'abord, à proprement parler, la chance d'écrire ( le bonheur de dire), d'écrire un texte qui, une fois écrit, n'exige plus la présence de l'auteur, mais s'offre indéfiniment au lecteur ( j'ai été très frappé, très touché du fait que de nombreux lecteurs, fort divers, ont reçu Moriendo comme un don..."
"Écrire, c est s'approcher de ce qui " suscite et l'effroi et l'attrait"; avoir perdu l'écriture - sans s'être dérobé a l'épreuve- c'est précisément ne plus pouvoir s'approcher de la chose, de sa vie, c est devoir -telle s'était l épreuve- subir son absence, son extrême lointain."
"Il est certes tout a fait inutile de refaire l'histoire, mais je ne peux guère m'empêcher d'imaginer ce qu'aurait pu ou du être cette histoire ! - l'écriture, ou plutôt, comme le dit Blanchot, " l'exigence d'écrire" ( le pas au-delà, p 48). Écrire c'est en effet aussitôt un " écrire, il le faut" ( le devoir de écrire repéré dans souvenirs de Reims), et cet impératif est, je le crois, aussitôt ressenti comme une preuve, comme le risque d'une épreuve à venir. Dire cet "il le faut", bientôt cette menace, cette disproportion ( répondre à l'impératif éthique), c est déjà écrire, c'est faire une expérience fondamentale, déconcertante, c'est être introduit dans une aventure originale, à coup sûr énigmatique. Écrire, c'est à dire répondre à l'exigence d'écrire, obéir à l'impératif, dire cette exigence, c est en effet s'acheminer vers..., avancer vers . - aventure qui rétroagit sur le sujet de l'écriture, voire sur l'homme, d'où le risque permanent : se détourner. Écrire c'est ouvrir, trouver un chemin vers ... Longtemps on ne sait pas vers quoi ( en admettant que un jour on puisse vraiment répondre à cette question!), mais on sait seulement d'une expérience douloureuse que le chemin est toujours plus difficile, à partir d un certain moment faire un seul pas au delà devient une aventure a peu près impraticable."
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