Lignes collection dirigée par Michel Surya
« La nécessité
d’infinir : le « que faire ? » de Jean-Luc Nancy par Frederic Neyrat
« Là où le rouleau
compresseur néolibéral cherchait à laisser derrière lui le champ d’une pensée
plate, nous savons comment Jean-Luc Nancy, avec quelques autres, a su maintenir
« le poids d’une pensée », sa profondeur et inventivité, son
« style » : car la philosophie, écrit-il dans Le poids d’une pensée, « ne s’acquitte. J’en viens au
troisième point de rien », elle
ignore le deuil véritable » et
pour cela toujours est un « naitre à
ce non-représenté du mort, de la mort » :
Naitre :
se trouver exposé, ex-ister. L’existence est une imminence d’existence. Chaque
jour, chaque instant expose à sa nécessité, à sa liberté, à sa loi, à son
caprice. »
« III. J’en viens au
troisième point de mon intervention, en revenant au texte de Nancy dont je suis
parti : que signifie infinir du point de vue de l’action ?
C’est-à-dire, que signifie infinir le « que faire » de Jean-Luc
Nancy ? Dans ce texte, Jean-Luc Nancy analyse les diverses manières dont
l’époque moderne s’est confrontée, politiquement, à la « déhiscence »
entre théorie et pratique : en affirmant ou bien l’excès irrémédiable du
théorique sur la pratique, ou bien la puissance de la pratique à réaliser le théorique.
D’un côté, donc, il existe un idéal qui non seulement dépasse toute possibilité
de réalisation, mais doit être maintenu irréalisable, comme idée de la raison (
pour le dire avec Kant, mais on pourrait aussi le dire, avec d’autres mots,
avec Derrida, par exemple sur l’ »à-venir » de la démocratie, sur la
rupture nécessaire entre souveraineté et inconditionnalité, etc.) apte à
réguler (modifier, parfaire) ce qui est effectif ; de l’autre, on
affirmera les vertus d’une praxis spéciale ( pour le dire avec Marx) capable ou
plutôt appelée à réaliser maintenant, ou au plus vite, la révolution qui saura
incarner la justice manquante – « ou
bien on se résout à l’utopie et on fouette l’imagination, ou bien on exige une
effectivité, y compris par la lutte armée et la prise du pouvoir », écrit
Jean-Luc Nancy sans son Que faire ?. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire