Qui ne peut
être rassasié, assouvi. « Il y a deux faims qui ne s'assouvissent
jamais : celle de la science et celle de la richesse » (Maxime
orientale). L'insatiable, au sens littéral du mot, le « grand
mangeur », ne semble plus jouir de la considération d'autrefois.
L'histoire nous raconte, en effet, que les grandes réjouissances,
même chez les plus « cultivés » des monarques, n'allaient jamais
sans repas gargantuesques, et que leurs majestés elles-mêmes
tiraient un naïf orgueil de l'énorme quantités de victuailles
qu'elles engouffraient, tandis que, sous les tables, des affamés
privilégiés attendaient un os. La race des gloutons est certes loin
d'être éteinte, mais du moins a-t-elle perdu beaucoup de son
prestige. La mode est plutôt aux insatiables de gloire et de
richesses. Passons les massacreurs : ils sont jugés, et l'histoire
démontre qu'ils ne sont rassasiés de gloire qu'aux lendemains des
catastrophes ; ils prononcent alors hypocritement un quelconque : «
J'ai trop aimé la guerre… », et l'indulgente postérité n'a plus
qu’à passer l'éponge… Quant aux financiers, on sait que c'est
leur insatiabilité qui nous valut la guerre d'hier, qui nous vaut
celle d'aujourd'hui, qui nous vaudra celle de demain. Mais qu'y
pouvons-nous? Qui serait assez puissant pour mettre un frein à leurs
appétits? « Le peuple, direz-vous, si… » Certainement, si…,
mais laissons les hypothèses : pour l'heure présente, les
financiers n'en règnent pas moins partout, dans les partis
politiques comme dans les temples de toutes confessions. Les besoins
réels d'un homme sont pourtant minimes, et les richesses accumulées
par les maniaques de l'or sont tout à fait disproportionnées. La
fortune n'est enviable qu'en tant qu'elle permet d'assouvir nos
besoins, elle n'est qu'un moyen d'échange…, mais c'est en vain que
les sages auront clamé pendant des siècles que le bonheur ne réside
pas dans la possession, mais dans la jouissance : tournant le dos au
but, nos ventrus insatiables poursuivent frénétiquement le moyen!
Pauvres gens, en somme, mais ... pauvres nous!
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