mercredi 7 août 2019

La justification du bien de Vladimir Soloviev

"Même quand la guerre éclate, on ne peut pourtant la ramener à un meurtre, c'est-à-dire un crime qui suppose une intention mauvaise dirigée sur un objet déterminé, sur tel homme en particulier auquel je veux enlever la vie. A la guerre, chaque soldat, en général, n'a par une semblable intention, surtout avec les méthodes actuelles le combat par fusils et canons tirant à grande distance sur un ennemi invisible. Ce n'est que dans le cas d'un combat corps à corps que surgit pour l'individu la question de conscience,et alors elle doit être résolue par chacun selon sa conscience.En général, la guerre en tant que conflit entre organismes collectifs (les 'Ëtats) et entre leurs organes collectifs (les armées), n'est pas l'œuvre des individus, lesquels y jouent un rôle passif  et, pour eux, le meurtre devient  une possibilité"

"Or, c'est justement ce fait indiscutable que l'Etat possède les moyens efficaces, non seulement pour sauvegarder la société humaine dans sa condition présente, mais aussi pour la faire progresser, qui impose à l'individu envers l'Etat d'autres obligations que le simple accomplissement de ses exigences légales; semblable accomplissement suffirait, si l'Etat était une incarnation parfaite de l'ordre social normal; mais comme, en fait, l'Etat n'est que la condition et l'instrument du progrès humain et se perfectionne lui-même sous différents rapports, c'est le devoir de l'homme individuel de prendre une part active dans la limite de ses forces, à ce progrès politique général. La personne individuelle porte en soi la conscience morale absolue de l'idéal parfait de la justice et de la paix ou du Royaume de Dieu; cette conscience, elle l'a reçue non de l'Etat, mais d'En Haut et du dedans; mais cet idéal ne peut être effectivement réalisé dans la vie collective de l'humanité que par le moyen d'une organisation de l'Etat, qui en est la préparation. De là dérive pour l'homme individuel, qui adopte réellement le point de vue moral. l'obligation positive et immédiate de coopérer avec l'Etat par la persuasion et par la parole, l'aidant à accomplir le mieux possible sa fonction préliminaire, après l'accomplissement de laquelle mais pas avant l'Etat lui-même deviendra évidemment superflu. La personne individuelle peut et doit, donc, exercer sur la société une action semblable, tant en ce qui concerne la guerre que dans tous les autres domaines de la vie politique."

"II n'y a pas longtemps, au congrès mondial des religions à Chicago, quelques Asiatiques– bouddhistes et brahmanistes s'adressèrent aux Européens dans les termes suivants, qui sont l'expression de l'opinion courante de l'Orient « Vous nous envoyez des missionnaires pour nous prêcher votre religion. Nous M nions pas la dignité de celle-ci, mais, ayant fait votre connaissance depuis les deux derniers siècles, nous voyons que toute votre vie est en contradiction avec les exigences de votre foi, que vous êtes inspirés, non par l'esprit d'amour et de vérité que vous a révélé votre Dieu, mais par l'esprit de cupidité et de violence, qui est naturel à tous les mauvais. Donc, de deux choses l'une ou bien votre religion, en dépit de son excellence interne, ne peut pas être réalisée en pratique et est donc inutile même pour vous qui la professez; ou bien, vous êtes tellement mauvais que vous ne voulez pas accomplir ses exigences, alors que vous le pouvez et le devez; dans les deux cas vous ne valez pas mieux que nous et vous devriez nous laisser en paix. » La seule réponse adéquate à cette critique, ce sont des actes et non des paroles. L'Asie n'aurait pas de raisons de combattre, ni de possibilité de vaincre une Europe qui serait intérieurement unie et sincèrement chrétienne."

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