
« Ah ! Ce ne sont pas vos grandes et rares
catastrophes , ces inondations qui emportent vos villages, ces
tremblements de terre qui engloutissent vos villes, qui me touchent :
ce qui me mine le cœur , c'est cette force dévorante qui est cachée
dans toute la nature, qui ne produit rien qui ne détruise ce qui
l'environneet ne se détruise soi-même... »
« 21 août
Vainement, je tends mes bras vers elle, le matin,
lorsque mal réveillé encore, je sors d'un pénible rêve ; en
vain, la nuit, je la cherche à mes côtés , lorsqu'un songe heureux
et pur m'a trompé, que j'ai cru que j'étais auprès d'elle sur la
prairie, et que je tenais sa main et la couvrais de mille baisers.
Ah ! Lorsque, encore à demi dans l'ivresse du sommeil, je la
cherche, et là dessus me réveille, un torrent de larmes s'échappe
de mon cœur oppressé, et je pleure inconsolable devant le sombre
avenir qui m'attend ».
« Vois-tu , mon cher Willhem, je ne conçois rien
à cette orgueilleuse espèce humaine, qui a assez peu de bon sens
pour se prostitueraussi platement ».
« L'on parle d'une noble race de chevaux qui,
quand ils sont échauffés et surmenés, s'ouvrent eux-mêmes, par
instinct, une veine avec les dents pour se faciliter la respiration.
Je me trouve souvent dans le même cas : je voudrais m'ouvrir
une veine qui me procurât la liberté éternelle ».
« Quelquefois je ne puis comprendre comment un
autre peut l'aimer, ose l'aimer, quand je l'aime si uniquement, si
profondèment, si pleinement, quand je ne connais rien, ne sais rien,
n'ai rien qu'elle ! »
« Cet amour, cette fidélité, cette passion,
n'est donc pas une fiction de poète ! Elle vit, elle existe
dans sa plus grande pureté chez ces hommes que nous appelons
incultes et grossiers, nous que la culture a formés pour nous
déformer. Vis cette histoire avec dévotion, je t'en prie. Je suis
calme aujourd'hui en te l'écrivant. Tu vois, je ne fais pas jaillir
l'encre, et je ne couvre pas mon papier de taches comme de coutume.
Lis, mon ami, et pense bien que cela est aussi l'histoire de ton
ami ! Oui, voilà ce qui m'est arrivé, voilà ce qui m'attend ;
et je ne suis pas à moitié si courageux , pas à moitié si résolu
que ce pauvre malheureux, avec lequel je n'ose presque pas me
comparer ».
« L'homme tout entier' est là debout, devant la
face de Dieu, comme un puits tari, comme un seau qui a une fuite. Je
me suis souvent jeté à terre pour demander à Dieu des larmes,
comme un laboureur prie pour de la pluie, lorsqu'il voit sur sa tête
un ciel d'airain et la terre mourir de soif autour de lui !
Mais, hélas ! Je le sens, Dieu n'accorde point la
pluie et le soleil à nos prières importunes ; et ces temps
dont le souvenir me tourmente, pourquoi étaient-ils si heureux,
sinon parce que j'attendais son esprit avec patience et que je
recevais avec un cœur reconnaissant les délices qu'il versait sur
moi ? »
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