Action
de frauder, de tromper, de frustrer, d'induire en erreur. Bien que
réprimée par la loi - bien faiblement du reste, lorsqu'elle
s'exerce sur une grande échelle - la fraude n'en est pas moins un
des caractères essentiels du commerce. Tromper sur la valeur d'une
marchandise, falsifier les produits livrés à la consommation est de
pratique courante dans toute transaction commerciale, le commerce
n'étant en réalité que le vol organisé et protégé par la loi.
Afin de se procurer ou d'augmenter la somme de ses bénéfices, le
commerçant - et en général à quelque catégorie qu'il appartienne
- fraude sur tous les articles qu'il livre à la consommation et même
les denrées alimentaires n'échappent pas à cette pratique
criminelle. On fraude sur le lait, sur le vin, sur la viande, sur
tout ce qui ne permet pas d'être contrôlé directement par
l'acheteur, et c'est ainsi que le marché est envahi par du lait
coupé d'eau, par de la viande avariée, par des objets falsifiés,
dont l'espèce, l'origine, la qualité ou la quantité sont
mensongères. Nous disons que la répression ne peut rien contre un
tel état de chose, car la qualité primordiale du commerçant est de
savoir mentir ; de savoir voler, de savoir frauder. L'expérience, du
reste, démontre suffisamment l'inopérance de la loi en la matière
et, d'autre part, on peut ajouter que si, apparemment, le législateur
a fait montre d'une certaine inquiétude en ce qui concerne la fraude
et qu'auprès de certains ministères - tel celui de l'Agriculture -
fonctionne un « Service de Répression des fraudes », en réalité
la magistrature et les tribunaux se rendent ordinairement complices
de la fraude. L'indulgence des juges, envers les fraudeurs de haute
envergure, permet aux infractions à la loi de se multiplier, et il
est par exemple de notoriété publique que pas un fournisseur aux
armées n'hésite à livrer des produits de qualité douteuse avec la
certitude de l'impunité. La fraude n'est véritablement réprimée
que lorsque c'est un petit qui s'en rend coupable ; et, même
lorsqu'elle s'exerce directement au détriment de l'Etat par un
individu ayant quelque influence politique, économique ou sociale,
elle reste à l'abri de toute poursuite. Qui donc ignore aujourd'hui
que des hommes appartenant à la haute banque ou à la grande
industrie fraudent régulièrement le fisc en ne déclarant pas les
énormes bénéfices qu'ils réalisent, et que le fisc garde le
silence sur les infractions dont il est victime? Certes, nous ne
sommes nullement étonnés d'une telle attitude, car elle souligne,
comme tant d'autres choses, qu'en notre siècle de ploutocratie, où
l'unique souci de certains individus est de faire de l'argent par
n'importe quel moyen, les représentants des institutions bourgeoises
sont à plat ventre devant la fortune, et que les puissants peuvent,
sans inquiétude, se permettre toutes les fraudes.
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