Mot
créé par Jean Barral, directeur de la Revue L'Ecole Franchiste,
défendant les thèses se rattachant à « l'ordre naturel de
l'économie sociale ». Cet « ordre naturel de l'économie sociale »
se base sur l'introduction du sol, du numéraire (monnaie) et du
commerce francs, connus sous les lettres lapidaires de F.F.F. F.F.F.
- Sol franc, Monnaie franche, Economie (commerce) franche.
INTRODUCTION. - La question sociale ou de l'exploitation. Demandez
aux individualistes, anarchistes, communistes ou même aux bourgeois,
ce qu'ils entendent par réformes sociales, et votre analyse de fond
découvrira qu'ils renonceraient volontiers (à part les fanatiques)
à leurs revendications de titre, pourvu que soient réalisées leurs
exigences économiques. Intuitivement ils se rendent compte que ce
sont ces exigences économiques qui forment la pierre fondamentale de
leur « milieu ». Les sociologues qui n'apportent pas leur attention
primordiale à l'égoïsme naturel de l'homme et, par extension, de
la masse, font fausse route. Dans cet égoïsme naturel de l'homme
sont comprises toutes ses aspirations. Elles sont en tout premier
lieu des aspirations ou besoins physiologiques primordiaux, tels que
: satisfaction sexuelle, manger, boire et dormir. Viennent ensuite
les besoins que crée et développe la civilisation à différents
degrés. Dans notre économie sociale capitaliste - et les
révolutionnaires ne s'en rendent généralement pas assez compte -
nous jouissons de toutes les libertés imaginables, pourvu que nous
possédions les moyens de les « payer » (Quand la bourse est vide,
c'est alors qu'on pousse le cri de liberté!). C'est ça que sentent
instinctivement les prolétaires (c'est-à-dire les exploités,
travailleurs de n'importe quel métier), sans s'en rendre compte au
juste, et de là leur pensée, leur esprit « capitalisé ». Il n'y
en a que fort peu ayant saisi la question de l'exploitation dans ses
vraies causes. Ce sont aussi les seuls qui sauront montrer le bon
chemin pour l'avènement de la société en accord avec nos tendances
anarchiques naturelles. Les milieux dits avancés stigmatisent le
programme capitaliste par : exploitation de l'homme par l'homme. La
première question à solutionner reste donc toujours : comment, par
quoi et quand se fait-elle, cette exploitation? Ensuite, quels sont
les meilleurs moyens pour anéantir les causes de l'exploitation et
comment devra être le système économico-social naturel? Car un tel
système doit garantir des bases égales de lutte pour la vie, enfin
la libre concurrence pour tous. Cette société nouvelle portera
inscrit sur son seuil : « A chacun selon ses efforts ».
Exploitation et revenu sans travail sont synonymes. Là où il n'y a
pas d'exploitation il ne peut y avoir de revenu sans travail et
inversement. Ce revenu du travail est une partie frustrée (50 %
jusqu'à 75 % et plus suivant les périodes de hausse ou de baisse
économiques) sur le revenu intégral du travail. C'est sur le
pourcentage de ce prélèvement qu'on pourra mesurer, pour ainsi
dire, la somme de misères des classes laborieuses. La question du
revenu du travail est l'être ou le non être de l'exploité. Mais
peut-on mesurer et fixer le revenu intégral du travail? Certes,
c'est par le libre jeu de l'offre et de la demande que se fixera et
se mesurera librement et individuellement ce revenu intégral. Dans
la société (économie) capitaliste, la concurrence libre n'existe
pas, et c'est pourquoi il y a exploiteurs et exploités. Le revenu du
travail n'est ni le produit du travail (machine, pièce détachée,
labourage, écrit, musique, etc.), ni le numéraire ou la monnaie en
compensation de ce travail. Le revenu intégral ou partiel du travail
est la quantité de produits qui peuvent être utilisés, consommés
en échange du travail fourni. Ce n'est donc pas le produit du
travail qui intéresse l'ouvrier en général, vu qu'il ne saura
l'utiliser directement (à part peut-être le produit agricole), et
le salaire n'est pas, non plus, le revenu du travail, puisque les
prix des marchandises sont variables. Si tous les produits que nous
consommons ou utilisons (et ils passent par une foule de
manipulations partielles : à la mine, à la fabrique, au transport,
à la vente, etc.), n'étaient vendus qu'au prix comprenant
uniquement les salaires pour les travaux multiples exécutés à la
confection, vente, etc., de ceux-ci, nous n'aurions plus à subir
d'exploitation, vu que nous payerons alors seulement les travaux
effectivement rendus, et tout travail vaut salaire ou compensation.
Cependant nous payons bien plus et nous subissons l'exploitation.
Donc nous devons analyser le prix des produits, à savoir si, en
dehors des salaires de travail, y sont contenus d'autres éléments.
Pour répondre à cette question il nous faut partir, non d'un
individu isolé, mais de la collectivité des producteurs,
respectivement de la totalité du revenu collectif. Maintenant il
s'agit de connaître les lois qui régissent la répartition du
produit intégral de l'économie sociale, afin de savoir qu'elles
peuvent être les déductions en dehors des salaires effectifs. Les
lois de la répartition du produit collectif dépendent des trois
facteurs principaux de l'économie sociale, à savoir : a) Sol et
sous-sol, y compris les matières premières ; b) Capital (monnaies,
moyens d'échange, de production, etc.) ; c) Travail. Nous savons
maintenant que le produit se réalise par l'entente de ces trois
facteurs et nous allons aussi comprendre plus loin que le marxisme,
dont se réclament, directement ou indirectement, presque tous les
socialistes, est sur une fausse route. Aussi, l'hypothèse bien
marxiste de ce que le capitalisme était à son apogée, qu'il se
tuait soi-même, qu'il disparaîtrait de par la loi inhérente en
lui, etc., est absurde. Ce capitalisme ne nous causerait
probablement, à l'heure actuelle, plus de souci, si Marx avait eu
raison. Le fait est le contraire : le capitalisme est aujourd'hui
plus puissant que jamais et les crises économiques et politiques ont
plutôt l'air de le rajeunir et de le fortifier. Donc, le partage de
la production collective se fait par ces trois facteurs : 1. Sol et
sous-sol..... Rente foncière 2. Capital ................ Intérêt
sur le capital
3.
Travail................. Salaire La production sociale totale doit
donc laisser deux parts aux éléments improductifs qui sont : 1°)
La rente foncière que perçoivent les propriétaires du sol et du
sous-sol ; 2°) L'intérêt sur le capital, que perçoivent les
détenteurs du capital et seulement une part reste à la disposition
du travail productif. Cette troisième part (revenu par le travail)
de la production totale ne se partage pas plus équitablement entre
les travailleurs (producteurs), car le partage est faussé par le
système même qui a créé le « monopole » de l'éducation, la
douane et tant d'autres restrictions artificielles à la libre
concurrence. Le droit arbitraire de disposer des richesses du sol et
du sous-sol, enfin des richesses naturelles et du capital
(prélèvement d'intérêt), donne aux propriétaires de ces deux
facteurs économico-sociales le pouvoir sur tout ce qui dépend de
l'économie à base de division du travail. Le travail peut se faire
seulement quand le sol (et sous-sol) et le capital le permettent.
Cette permission est la réalisation du revenu sans travail (rente
foncière et intérêt sur capital), mais aux dépens de revenu par
le travail. Rien n'échappe, tout doit payer son tribut, l'Etat
lui-même, le consommateur, le producteur, enfin tout. Ce que
représentent les tributs réclamés par le rentier et le capitaliste
est mis en lumière par ces quelques considérations et exemples : le
sol et sous-sol avec ses richesses naturelles appartiennent à tous
les hommes sans exception, car ils ne sont pas créés par eux et
ainsi leur bien propre ; mais ils leur sont laissés naturellement et
« pour rien » de par la Nature (je ne veux pas discuter ici la
valeur du terme « Nature », sans importance pour la question). Le
prix que l'homme paye pour le sol ou le sous-sol à un prétendu
propriétaire représente la « rente foncière capitalisée », de
même aussi le loyer, etc., pour l'exploitation du sol et des
matières premières. Le « prix » d'une propriété se base sur le
calcul suivant : Exemple : Revenu annuel sans travail (rente
foncière) : 15.000 francs. Taux d'intérêt : 5 %. Prix du terrain :
15.000 x 100 : 5=300.000 francs. Ou inversement, lorsqu'il faut payer
une propriété 300.000 francs le successeur prendra le taux
d'intérêt du jour, dans ce cas 5 %, et saura que le terrain, etc.,
doit rapporter 15.000 francs de revenu sans travail, en dehors du
travail productif qu'il y rendra ou fera rendre. La propriété lui
doit représenter une sorte de banque, où, son capital de 300.000
francs déposé, lui sont garantis les mêmes 15.000 francs,
augmentés de 5 %. De là aussi l'interchangeabilité du sol et du
capital. Les banques, par exemple, prennent le plus volontiers des
sûretés foncières. Le capitaliste prête son argent
(capital-monnaie) à l'économie sociale quand il rapporte,
c'est-à-dire quand le taux d'intérêt du jour (qui sera toujours
aussi haut que le marché le permet) lui est garanti (y compris les
dividendes ou l'intérêt hypothécaire), sans cela il se retire et
les travaux (la production) ne se font pas. Un autre exemple probant
est fourni par les loyers des demeures qui se composent généralement
de 4/5 de rente foncière et d'Intérêt sur capital et 1/5 seulement
est affecté par l'usage et suffirait à la restitution des salaires
et matériaux. A noter que, la restitution faite, elle sera liquidée
et ne resteront plus que les frais occasionnés par la détérioration
naturelle ; mais la rente foncière et l'intérêt sur capital
continuent leur vie parasitaire. Le fait le plus probant vient encore
: Prenez n'importe quel pays en exemple et voyez quelle est
l'évaluation de la fortune nationale. Quelle soit par exemple de
500.000 millions de francs « or », si vous préférez. Et
maintenant? C'est facile, au taux d'intérêt de 5 % (le soi-disant
taux normal, puisque assez constant depuis des siècles) nous
trouvons qu'annuellement les travailleurs, sans exception, doivent
laisser de leur revenu du travail 25.000 millions « or » en forme
de rente foncière et d'intérêt sur capital, c'est-à-dire cette
somme formidable est contenue dans les prix des marchandises et
directement payée par les consommateurs, dont font partie en nombre
infime et avec une consommation minime (quoique relativement très
grande) les classes des exploiteurs. Ce n'est pas tout : dans
l'espace de tous les 20 à 25 ans, tous les ouvriers (manuels et de
tête) doivent produire à nouveau aux capitalistes et rentiers
fonciers la fortune nationale entière, c'est-à-dire : fabriques,
maisons, chemins de fer, vaisseaux, mines, enfin tout. Encore si ce
n'était que cela! Ces sommes formidables de revenu sans travail ne
sont rien contre l'autre côté du mal que font le rentiérisme et le
capitalisme à l'économie sociale tout entière. Car pour qu'ils
puissent se maintenir ils ont besoin d'une armée constante de
sans-travail (chômeurs) qui maintiennent, par leur seule présence,
les salaires au niveau voulu ; ils ont besoin que l'économie sociale
côtoie toujours les crises économiques ou qu'elle s'y engouffre. Si
l'on compte un peu ce que peut être la quantité d'objets
utilisables dont la production a été empêchée, la somme de
bienêtre perdue par les crises économiques chroniques ou aiguës,
les frais énormes (inclus dans les prix des marchandises)
occasionnés par les difficultés faites à l'échange des produits,
alors nous aurons une idée des méfaits du capitalismerentiérisme.
Jamais encore il n'y a eu « surproduction »! Ceux qui prétendent
cela sont ou bien des ignorants ou des « intéressés »! Quand le
dernier des hommes a-t-il pu satisfaire tous ses besoins (seulement
matériels) et même davantage? Alors ?... Le progrès vers la
lumière, vers le bien-être, vers la liberté et l'âge noir de
l'homme primitif, l'ignorance et la misère, balancent autour de
l'état économique de l'humanité. La production sans frein,
toujours croissante, c'est la mort du capitalisme. Wenn alle Raeder
laufen, muss das Kapital ersaufen ! - Quand toutes les roues
marcheront, les capitalistes (le capitalisme) se noieront !
C'est
au génial Silvio Gesell que nous devons enfin la connaissance
parfaite des causes de l'exploitation. Nous savons maintenant qu'elle
a sa source dans le capital primitif (capital par excellence) et dans
la propriété privée du sol et du sous-sol. Mais Silvio Gesell nous
a donné un cadeau encore plus précieux, le plus précieux que
l'humanité puisse désirer : ce sont les moyens pour rendre
impossible à jamais l'exploitation et pour donner un nouvel essor à
la production humaine, voire à son ascension vers ses plus chers
idéaux. Qu'est-ce que c'est qu'une invention, si le capital et le
sol refusent leur concours? Que sont les aspirations humaines dans le
domaine intellectuel, moral ou matériel, si capitalisme et
rentiérisme n'y voient leur intérêt ou qu'ils y risquent la peau?
Les théories F.F.F. de Silvio Gesell peuvent se résumer à peu près
en ces deux grandes lignes : 1°) Abolition de l'exploitation par
intérêt sur capital et les profits de hausse et de baisse, en
introduisant la monnaie franche, liée à une cotisation stable.
Cette dernière travaillera de concert avec une Société
Internationale de Change (cotisation). - (I.V.A. ou International
Valuta Association) ; 2°) Abolition de l'exploitation par la rente
foncière privée en déchirant les titres de propriété arbitraire
sur le sol, le sous-sol et leurs richesses naturelles (non créées
par l'homme), c'est-à-dire en faisant la terre franche. Avec ces
deux lignes vont de pair le commerce libre et la dissolution de
l'Etat (comme résultantes) et, comme conclusion : expansion et
appréciation de l'individualité ; liberté du domicile (aller et
venir franc), concurrence libre sur des bases égales pour tous : «
A chacun selon ses efforts! » LA MONNAIE FRANCHE. - Le problème de
la monnaie et sa solution. L'économie primitive (producteur et
consommateur en la même personne) ne permettait guère de satisfaire
des désirs outre les besoins vitaux primordiaux. En faisant
lentement place à l'économie à base d'échange, le travail et les
produits devenaient un objet de commerce. Tant que l'écoulement des
produits devait s’opérer directement par échange entre
consommateur et producteur à la fois, il y avait encore énormément
de frein à l'évolution humaine. L'usage d'un moyen d'échange
conventionnel a donné du coup un essor vigoureux au développement
humain et a permis d'accomplir ce que l'économie primitive ne
pouvait faire et ce que l'échange direct ne faisait encore possible
qu'en partie infime. Point de culture, aucun progrès humain sans
division du travail : point de division du travail sans monnaie
(moyen d'échange!), et j'ajoute : plus ce moyen d'échange reste
neutre, c'est-à-dire limité dans ses fonctions désignées,
davantage aussi s'assurera le bien-être du producteur. Nous nous
servons actuellement de la monnaie métallique et en papier que
l'Etal déclare comme tel et qu'il protège contre les
falsifications. C'est une erreur de croire que la monnaie soit «
couverte » ou « garantie » en or. Cette prétendue « sûreté
métallique » est un vaste bluff. L'unique sûreté de la monnaie
est et reste sur le marché des produits, où l'on peut échanger
(acheter) ce numéraire contre des marchandises (objets utilisables).
Si la sûreté mercantile (des produits) vient à faire défaut, la
meilleure des cotisations en or ne pourra nous servir de quelque
chose. Des équivalents de monnaie (chèque, traite, etc.) se basent
eux-mêmes sur la monnaie et n'ont pas du tout les avantages d'une
circulation directe de monnaie. Ce qui intéressera le travailleur
quant à son budget, ce sera le prix moyen des marchandises (nombre,
indice ou index), duquel il peut partir pour savoir si son revenu du
travail s'est amélioré ou non. En temps de hausse la production va
en s'intensifiant, les prix montent et les fabricants et commerçants
ont confiance et tout le monde trouve un gagne-pain. Il s'agit ici
d'une hausse normale, qu'il ne faut pas confondre avec l'inflation
monétaire (hausse de circulation ou de quantité monétaire) telle
qu'elle a passé et passe encore sur les Etats européens. En temps
de hausse, la monnaie circule plus vite, les banques ne détiennent
que la quantité de monnaie indispensable ; tout le monde veut
acheter, espérant de vendre mieux - on spécule ; les chômeurs
deviennent moins nombreux, car la production est en mouvement
ascendant. Par contre, en temps de baisse il y a chute des prix ; les
banques regorgent de monnaie ; les crédits sont refusés et révoqués
(méfiance commerciale) ; la monnaie circule plus lentement ; on
n'achète plus (ergo on ne produit plus), car demain déjà on peut
réaliser meilleur marché ; le chômage s'accentue, c'est la misère
qui s'accroît. Il y a hausse quand la quantité de monnaie en
circulation (monnaie métal ou monnaie papier reste, en principe,
indifférent) est augmentée. Effet : prix moyen croissant. Les
découvertes de mines d'or le prouvent. L'inflation, par exemple le
temps des assignats ou celui d'après-guerre, où les machines à
imprimer les billets de banque travaillaient jour et nuit. En
Allemagne (le pays de l'inflation monétaire par excellence) où,
depuis 1914 à 1923, l'office monétaire jetait de plus en plus
fiévreusement de la monnaie papier en circulation, la quantité
monétaire en juillet 1914 était d'environ 5.760 millions de marks,
pour atteindre, fin 1923, environ 400 quadrillions (environ 70.000
millions de fois plus), pendant que les prix des marchandises
montaient graduellement à environ 1 billion et demi de fois.
L'accroissement des prix, plus considérable en pour 100 que celui de
la quantité monétaire, était dû à la diminution graduelle de la
production et avant tout à la vitesse de circulation monétaire qui
allait dans l'impossible. En diminuant la quantité de monnaie
disponible d'un pays, l'index diminue également ; il y a baisse. Le
passé en fournit des preuves sérieuses. Le moyen-âge et le manque
de mines d'argent (l'argent était alors la matière monétaire) sont
inséparables. Les falsifications monétaires (Schinderlinge : pièces
dont le poids en argent était moindre) des seigneurs apportèrent un
relèvement ; l'époque glaciale dans la culture humaine allait se
terminer. La période de 1907-1908 était caractérisée par une
formidable crise économique mondiale, dont le fomenteur était
Pierpont Morgan. Il avait retenu d'énormes quantités d'or monéifié
et déclenché une chute de prix inquiétante. Qui de nos sociologues
s'est douté, en dehors des physiocrates, que la crise économique
mondiale actuelle (elle date surtout de 1920) est due à ce que
l'Entente et des pays neutres ont retiré une partie de l'argent
dépensé en cours de guerre? Et la politique de déflation,
responsable de stabilisation? Et les Etats-Unis de l'Amérique? Le
dollar-or a subi une dépréciation notable, car actuellement le
nombre indice vacille autour de 150 % contre 100 % d'avant-guerre. En
Allemagne, il est environ 135. Ces deux chiffres se réfèrent à
l'index du commerce général, car pour l'Allemagne l'index de cherté
de vie est même à 145. Consultons les statistiques des pays et nous
saurons qu'elle est la baisse du bien-être en pour % moyens depuis
la guerre... Mais que veut dire tout cela ?... Qu'en Amérique il
faut donner en moyenne 160 dollars de ce qui coûtait avant la guerre
environ 100 dollars, et ainsi de suite. Les oscillations autour du
nombre indice sont la mare aux spéculants et agioteurs. Cependant ce
n'est aucunement améliorer la chose que de punir ces derniers ; il
suffit de changer dûment la monnaie et ils disparaîtront tout
seuls, sans peine ni rien. La moindre augmentation, même en % de
l'index apporte des profits fabuleux à la haute finance (voyez la
fortune nationale) et des pertes égales aux travailleurs, dont le
salaire ne suit pas, et de même aux créditeurs, dont la valeur
intrinsèque de leur monnaie prêtée diminue. L'inflation est
l'orgie des rapaces de la haute finance. Le prix de la marchandise
dépend de la quantité de monnaie disponible (effectivement en
circulation - la monnaie dans les coffres-forts ou bas de laine, ou
l'or en bijoux, sont morts) et de la vitesse de circulation. En
opérant savamment avec les deux facteurs « quantité » et «
vitesse de circulation », on tient la clef des crises. Les deux
facteurs peuvent opérer seuls ou en conjonction. De ce qui précède
on sait que la matière (métal ou papier), dont est faite la
monnaie, n'est pas l'essentiel, au contraire, c'est uniquement
l'administration scientifique de la monnaie. Cependant, pour la
fabrication de la monnaie, il est préférable de se servir du
papier, car le métal se prête plus facilement à des usages
étrangers (donc dangereux) qu'à la vraie mission du numéraire,
pendant que le papier imprimé devient comme tel sans valeur. Les
accapareurs de la monnaie (or, argent) faussent le marché, où
marchandises et monnaie doivent s'échanger ; ils sont directement
criminels pour l'économie sociale. La monnaie franche est enfin la
liquidation radicale avec le système monétaire actuel, cause de
toutes les misères. La monnaie franche est administrée de façon à
maintenir toujours le nombre indice au même niveau. La façon pour
ce faire a été indiquée déjà plus haut : réglementation
scientifique de la quantité et de la vitesse de circulation
monétaire. La monnaie franche est un pur moyen d'échange, donc
aucun « objet de valeur », aucun « capital ». A cet effet elle a
subi une dépréciation continuelle sur la « valeur nominale ».
Elle n'a plus rien de supérieur quant à la marchandise qu'elle doit
aider à écouler mieux. Pendant que les marchandises subissent des
dépréciations de toutes sortes (elles diminuent de poids, de
qualités, sont rongées, pourrissent, occasionnent des frais
d'emmagasinage, etc.), la monnaie-or (monnaie capitaliste) rapporte
au contraire. Avec la monnaie franche qui se déprécie lentement,
mais sûrement, tout le monde, par pur intérêt (ô, comme l'égoïsme
est bienfaisant !) cherchera à se procurer des marchandises (la
production s'amplifiera), pour éviter la perte sur la valeur
nominale de son bien monétaire. Le taux de dépréciation nominale
est de 5 %, car l'histoire nous montre que ce taux de 5 % ou à peu
près, a été toujours la condition capitaliste depuis de longs
siècles. La forme de la monnaie franche est ou bien tabellaire (les
taxes de dépréciation respectant la valeur nominale est indiquée
sur le billet aux différentes dates, par exemple chaque semaine ou
quinze jours), ou bien elle porte des carrés avec dates
hebdomadaires ou de quinze en quinze jours, dans lesquels seront
collés des timbres équivalant à la dépréciation nominale. C'est
surtout l'expérience qui décidera laquelle des deux formes sera la
meilleure. Le jeu des agioteurs, etc., sera fini ; qu'ils amassent la
monnaie franche (ce qui ne va pas sans pertes préalables) et ils
n'auront encore rien de gagné, car l'office monétaire, sous le
contrôle de tous les intéressés, - et ce sont les producteurs et
les consommateurs - n'aura qu'à émettre plus de monnaie ou
augmenter le taux de dépréciation (ce qui accélère la vitesse de
circulation). Lorsque les ennemis des producteurs, c'est-à-dire les
défenseurs du revenu sans travail voudront déverser leur stock de
monnaie franche, afin de déclencher une crise économique, leur tour
sera déjoué, du moment que l'office monétaire retirera la quantité
nécessaire de billets (le ralentissement de la circulation par
baisse du taux de dépréciation agit aussi dans ce sens). Par la
monnaie franche il n'y aura plus de chômeurs en dehors de ceux qui
ne voudront pas travailler, et ces derniers ne pourront exister. Un
autre bienfait économico-social sera l'usage de payer comptant (pour
éviter la perte), rabaissant ainsi les frais de commerce et
augmentant de ce fait le revenu du travail. La monnaie franche ne
sera donc plus « capital » ou « moyen d'économie », mais la
possibilité d'économiser ne sera pour cela point du tout enlevée,
bien au contraire. Aujourd'hui l'ouvrier qui porte la moindre somme
d'argent à la banque et qui reçoit de l'intérêt contre, est-ce
qu'il sait qu'il vole le surplus à lui-même et aux camarades? Ne
devrait-il pas le faire? L'homme est égoïste, est intéressé ;
alors, inutile de le blâmer d'une qualité qui lui est naturellement
innée! Oui, on peut aussi et mieux économiser en économie franche,
car le revenu du travail étant intégral et les marchandises moins
chères, l'on peut placer ses épargnes dans des entreprises ou bien
les porter à la banque, où seront vendus des titres (obligation).
Pendant que la monnaie diminue en valeur le pécule en banque gardera
sa valeur nominale. Aujourd'hui on distingue à la Bourse des papiers
valeur « al pari » (pair) au-dessus ou au-dessous du pair, c'est-à
peut rapporter à la vente en Bourse soit 500 francs (au pair), soit
moins ou plus (suivant le cours « au-dessous ou au-dessus du pair
»). Le même papier peut subir d'énormes « changements de valeur
». La banque, en économie franchiste, délivrera des papiers à
valeur nominale, c'est-à-dire qu'ils porteront l'intérêt du jour,
mais ne baisseront jamais au-dessous de la valeur nominale, et
celle-ci garde toujours sa puissance d'achat par les opérations de
l'office monétaire, c'est-à-dire par le nombre indice constant. A
mesure que l'économie franche sera sortie du gâchis social (dettes,
etc.) occasionné par le capitalisme, à mesure baissera le taux
d'intérêt pour descendre à zéro. Cela veut dire à mesure que
baissera le taux d'intérêt en économie franche, à mesure
augmentera la somme du bien-être des franchistes. Les sommes
formidables que doivent verser annuellement les contribuables ne sont
englouties qu'en infime partie (que les révolutionnaires
réfléchissent bien) par l'administration, le militarisme, les
constructions de voies de communications, écoles, etc. C'est le
capitalisme-rentiérisme qui dévore la plus grosse part sous forme
de rentes et intérêts sur capital, sur les dettes publiques, L'Etat
est une bonne vache à lait et fait en même temps encore les
services de garde champêtre. Et qu'est-ce que c'est que l'Etat en
somme? Les dettes publiques ne sont pas à ignorer par l'économie
franche, du moins tant qu'elle n'est pas générale ; mais un impôt
unique dans le pourcentage nécessaire sur les valeurs mobilières y
remédiera. Pour les relations internationales, il faudrait encore
quelques mesures spéciales, dont se chargera l'Association
internationale de cotisation, mesures très simples et efficaces,
cependant, pour plus de détails, il faudrait consulter la
littérature physiocrate déjà nombreuse. Je peux à peine dessiner
ici le plus saillant du revenu intégral sur travail, eu égard à la
place limitée d'une Encyclopédie. TERRE FRANCHE (sol et sous-sol
avec richesses naturelles). L'introduction de la monnaie franche ne
sera qu'une œuvre imparfaite sans « terre franche ». Le sol et
sous-sol avec ses richesses naturelles est directement la seule
possibilité à l'existence humaine et de ce fait nous avons comme «
terriens » un droit absolu à la « terre ». Cependant le droit
romain met notre existence entre les mains des propriétaires privés.
Les bienfaits par la monnaie franche seront accaparés en grande
partie par le rentiérisme si nous ne faisons pas table rase de ce
côté-ci. La terre (à entendre tout ce qui n'est pas créé par
l'homme) doit être reconnue propriété collective, avec droit
absolu pour chaque humain d'en profiter. La rente foncière ne
pouvant disparaître entièrement, elle sera socialisée ou
collectivisée et l'exploitation du sol et sous-sol passera aux mains
privées par voie d'enchère publique. La rente foncière ne peut
être abolie parce que la terre est restreinte, c'est-à-dire nous ne
pouvons augmenter la quantité de sol disponible. Celle-ci est régie
par l'offre et la demande. La demande va naturellement en
s'accentuant avec la population croissante et la rente en sera plus
forte. Pour anéantir la rente foncière, il faudrait anéantir les
avantages naturels des différents terrains, enfin toute culture et
civilisation - c'est absurde! Si l'on ne peut détruire la rente
foncière, on peut du moins lui enlever le pouvoir de rendre les
hommes esclaves, justement par l'abolition de la propriété privée,
en la transformant en « rente de mères ». Les mères du pays la
recevront proportionnellement au nombre d'enfants qu'elles auront à
élever. Ce droit de rente pour un enfant pourra aller jusqu'à l'âge
de 16 ans de celui-ci. Les mères ont un droit naturel sur cette
recette, vu que la naissance des enfants est le facteur qui garantit
et augmente aussi la rente foncière. Les propriétaires fonciers
actuels ne peuvent être punis pour leur position, car ce n'est pas
eux qui ont créé cet état de chose, ils en profitent seulement.
Les déshérités ne valent en rien mieux qu'eux - que feraient-ils à
leur place? Il ne s'agit donc pas ici d'un vol aux propriétaires
actuels au profit des autres citoyens ; ce serait changer le titre de
propriété privée quant au nom du possesseur ; non, le sol franc
sera constitué par voie de simple expropriation. Des obligations à
valeur nominale (voir plus haut sous monnaie franche) formeront le
rachat pour autant de ce que la liquidation des dettes publiques aura
pu laisser. Les guerres ont toujours été de nature économique et
la dernière plus encore que les autres n'a servi qu'aux appétits du
capitalisme et rentiérisme. Le sol franc est la réalisation de la
paix. Sans lui il n'y a pas la liberté d'aller et de venir, sans lui
pas dé commerce franc (libre), parce que les douanes, les
restrictions de toutes sortes en forme de passeports, droit
d'importation et d'exportation, etc., etc., enfin cette affreuse
protection du commerce national, etc., ne sont que des moyens
qu'emploient les rentiers pour protéger et garantir leur puissance,
voir : « le revenu sans travail ». Pour plus de détails, et pour
approfondir les aperçus généraux ci-dessus, je renvoie à nouveau
à la lecture de la littérature franchiste (physiocrate) et je peux
dire que : La réalisation du revenu intégral par le travail, c'est
la solution de la question sociale, il n'y en a pas d'autre.
-
Charles RIST
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