Le
foyer est le lieu, l'endroit de la pièce où l'on fait le feu. Le
feu luimême. Allumer un foyer. Eteindre un foyer. Le foyer de la
cheminée. Le foyer du fourneau. Par extension on donne le nom de
foyer à la maison, la demeure, le domicile, l'endroit où l'on
réside, le lieu où se trouve réunie la famille, ou encore à la
famille elle-même. Se créer un foyer ; aimer son foyer ; être
attaché à son foyer. « Que d'idées antiques et touchantes
s'attachent à notre seul mot de foyer », dit Chateaubriand. C'est
en effet au foyer familial qu'après une rude journée de labeur, le
travailleur trouve un peu de bonheur ; c'est là qu'il se repose des
fatigues et des misères de la vie, et c'est là aussi qu'il
rencontre la sympathie, l'amitié et l'amour de la compagne et des
enfants. L'homme n'est pas un animal solitaire, il a besoin de
s'accoupler, de s'associer matériellement et sentimentalement à des
êtres qui lui sont chers. Il a besoin d'une compagne, il a besoin
d'un foyer. C'est au foyer qu'il partage ses joies et ses
souffrances, ses espérances et ses déboires, ses désirs et ses
aspirations. C'est au sein de la famille, du foyer qu'il panse les
plaies douloureuses de son cœur et qu'il puise le courage nécessaire
à poursuivre la lutte contre toutes les forces mauvaises qui
écrasent l'opprimé. Quelle misère pour l'individu qui n'a pas de
foyer et vit isolé, détaché de toute attache familiale! A l'aube
de la vie, l'homme jeune peut dans une certaine mesure se passer du
foyer. Le besoin d'activité, de mouvement, le désir de savoir et de
connaître l'entraîne parfois hors de la maison ; mais un âge
arrive où l'homme a déjà parcouru la plus grande partie de sa
route et alors il est heureux de trouver un asile pour reposer sa
tête et ses membres las. Certains absolutistes prétendent que le
foyer familial est une entrave à la liberté. C'est une profonde
erreur. Certes, les anarchistes ne sont pas sans ignorer que bien
souvent le militant est déchiré entre son foyer et la lutte pour
l'émancipation. Mais la cause en est l'exploitation féroce que
subit la classe productrice et, si la division règne au foyer, toute
la cause en incombe encore à la bourgeoisie. L'anarchiste ne conçoit
pas la famille et le foyer tels que les conçoivent les ignorants
imbus de préjugés et de croyances ; il a une conception
particulière et libre de la vie familiale, et s'il ne peut pas
toujours mettre ses principes en application, c'est que la société
ne permet pas la libre évolution de l'individu. Tout se tient dans
la société, qui imprime son autorité sur les moindres actes, sur
les moindres gestes de la vie des hommes, et si le foyer prolétarien
retentit parfois de disputes, c'est que la misère y pénètre et que
l'on n'y trouve pas toujours du pain dans le buffet et du bois dans
l'âtre. Sans crainte de se tromper, on peut dire que la plupart des
discordes qui divisent les familles ouvrières sont d'ordre
économique et puisent leurs sources dans la misère qui étreint les
malheureux. Un foyer où il y a, non pas l'abondance, mais l'aisance,
est un foyer heureux, car le foyer prolétarien n'est pas encore
corrompu comme l'est celui de la bourgeoisie, et n'est pas constitué
à la suite d'un marchandage honteux entre deux parties qui
s'unissent. Mais, hélas! bien souvent, trop souvent, quand le
chômage ou la maladie pénètrent dans le foyer et que les économies
péniblement amassées sont englouties, lorsqu'au bien-être fait
place une situation désespérée, alors tout se détache, tout se
brise et le foyer est détruit. Dans une société bien organisée,
d'où aura disparu l'inégalité économique, où chacun pourra
travailler et consommer librement, les foyers n'offriront plus le
spectacle de la désunion. Ce sera l'association d'êtres animés
l'un pour l'autre de sentiments réciproques et pouvant librement se
donner sans crainte de voir leur union brisée par de mesquines
questions d'ordre matériel. On donne également le nom de foyer à
certaines maisons où les miséreux viennent chercher un asile. Ce
sont généralement des œuvres créées et soutenues par des œuvres
philanthropiques, mais on sait trop que la philanthropie est une
action inopérante en raison même du nombre de misères qu'il
faudrait soulager en régime capitaliste. D'autre part, aucune
liberté n'est tolérée au sein de ces « foyers » et il faut se
soumettre, lorsque l'on y est admis, aux règlements souvent
arbitraires qui régissent ces maisons. En Angleterre et en Amérique
où « l'Armée du Salut » exerce une influence considérable, cette
organisation protestante a créé pour les sans-familles des refuges
auxquels on a donné le nom de « foyers ». Quelques-uns de ces «
foyers » ont également été établis en France par la même
organisation. En vérité, l'Armée du Salut est une entreprise
commerciale et ses foyers ne sont en réalité que des casernes qui
ne rappellent en rien la demeure familiale. Ce sont des hôtels d’un
prix un peu plus modique que les autres. On emploie encore le mot
foyer comme synonyme de centre actif, de siège principal : un foyer
de révolte ; un foyer d'épidémie. Au théâtre, on appelle foyer
l'endroit où se réunissent les auteurs, les acteurs et où sont
également admis quelques privilégiés. Le foyer du théâtre ; le
foyer de la danse.
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