Les partis politiques sont
des organisations qui se donnent comme but de faire triompher leur opinion dans
le pays. Cette opinion est exposée dans un programme que le parti propose à
ceux dont il demande l'adhésion. En France, de droite à gauche, nous avons: les
royalistes (Action Française), le parti national, la gauche démocratique, le
parti radical, le parti républicain socialiste, le parti socialiste français,
le parti socialiste S.F.I.O., le parti d'unité prolétarienne, le parti
communiste S.F.I.C., etc, etc.
D'ordinaire, le nom d'un
objet sert à désigner l’objet, mais en politique la vérité est le moindre souci
(Machiavel). Aussi les noms des partis servent autant à cacher ce qu'ils
veulent qu'à le faire connaître. Ainsi, la gauche démocratique n'est ni à
gauche, ni démocratique. Elle siège à la Chambre au centre droit, son but est
la conservation sociale, même la réaction; recrutée dans la grande bourgeoisie,
elle n'a rien de démocratique. Le parti radical, à ses origines, voulait
réaliser radicalement, c'est-à-dire jusqu'à la racine, le programme de la
Grande Révolution (Robespierre): laïcisation intégrale, suppression de
l'héritage, instruction gratuite à tous les degrés, liberté politique,
assistance aux vieillards invalides, enfants,
impôt progressif sur le revenu, etc ... Ce programme est en partie
réalisé, mais dans une mesure très faible; la laïcité est en train de faire
faillite, la religion domine à nouveau partout; l'instruction gratuite à tous
les degrés n'est pas réalisée ; la liberté politique est très relative. En
réalité, le 1e parti radical est le parti des petits bourgeois et des paysans
aisés, c'est un parti de stagnation, il n’est nullement radical. Le parti
socialiste n'est pas davantage socialiste. Son but est la suppression de la
société capitaliste et l'établissement du collectivisme. En réalité, le
collectivisme est sa dernière préoccupation. C'est, en fait, un parti de réformes
sociales qui n'a rien de subversif.
Les partis, d'ordinaire,
sont sincères au moment de leur fondation ; mais ils s'usent en vieillissant,
surtout lorsqu'ils pratiquent le parlementarisme et sont portés au pouvoir. Le
parti socialiste anglais, porté au pouvoir, n'a pas transformé la société, et
son chef, Mac Donald, à la fin, a préféré, pour tirer son pays des difficultés
économiques, s'allier aux conservateurs. Le parti socialiste allemand, vieille
et lourde machine, marche par sa vitesse acquise; lui, non plus, ne transforme
pas la société. Il a toutes les peines du monde à empêcher le jeune et actif
parti hitlérien de prendre le pouvoir.
Le parti radical, à ses
débuts (milieu du XIX siècle), renfermait des hommes dévoués. Ils allaient en
prison pour leurs idées, beaucoup perdaient une situation brillante et
préféraient végéter dans une profession de misère (professeurs libres), plutôt
que de renoncer à leur idéal. C'est pour cela qu'on a dit que la république
était belle sous l'Empire. Le socialisme a connu, lui aussi, une belle époque :
Fourier, Victor Considérant, Karl Marx. Ces hommes vivaient pour leurs idées,
leurs conditions matérielles étaient précaires; la prison, l'exil, la misère
étaient leur lot. Mais dès qu'un parti approche du pouvoir, il est corrompu. Le
ministre socialiste qui apprend la révérence pour se présenter devant une
Majesté a oublié les ouvriers qui l'ont porté là où il est.
Pas plus que les étiquettes,
les programmes ne disent la vérité. Aussi sont-ils tous acceptables à la
lecture. Le pire parti de réaction n'avouera jamais que son idéal est
l'aristocratisation d'une petite minorité et l'exploitation de tout le reste. A
l'entendre, il veut, au contraire, le bonheur du peuple, il prétend même être
le seul à le vouloir sincèrement. La réaction ne s'avoue telle que dans la
frénésie de la victoire : massacre du peuple en juin 1848 et en mai 1871. Dans
l’ivresse du triomphe, l'aristocratie traite le peuple de vile canaille bonne à
travailler et à crever. Mais dès que les choses sont redevenues normales, elle
préfère cacher ses sentiments véritables et afficher une bienveillance
fallacieuse.
Le fascisme, nouveau parti
issu de la guerre, ne s'avoue pas non plus réactionnaire. On y trouve du
syndicalisme, des idées à apparence démocratiques puisées aux ouvrages de Sorel
; il est pour les gens qui travaillent, contre les avocats bavards du
parlement. En fait, il est pour l'hégémonie du grand patronat et l'écrasement
de la classe ouvrière.
C'est un bon point pour le
progrès social que personne ne veuille s'avouer réactionnaire et que la droite
tienne à s'appeler gauche. Cela prouve la marche des sociétés vers la démocratie,
marche définitive, du moins il faut l'espérer.
Doctoresse PELLETIER.
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