Sur
la grève générale
« Le
malheur est que la plupart virent dans la grève générale non pas
un moyen d’entraîner les masses à l’insurrection, c’est-à-dire
à l’abattage par la violence d’un pouvoir politique et à
l’expropriation des terres, des moyens de production et de toute la
richesse sociale, mais un remplacement de l’insurrection par une
façon d’« affamer la bourgeoisie » et de la faire capituler
sans violence. »
« Par
conséquent, une grève générale, soit pour une solution
définitive, soit dans un but transitoire, doit être faite en étant
disposés et prêts à résoudre la question par la force. »
Pour
demain
« Nous
ne comprenons pas, ou plutôt nous comprenons trop bien, la hâte
avec laquelle on a voulu arrêter la grève au moment où la menace
fasciste était la plus forte et où il fallait se montrer le plus
ferme et décidé. »
« S’il
est bien que nos militants soient toujours les premiers prêts à
agir avec ceux qui le veulent, s’il est nécessaire de ne pas nous
isoler et faire tout notre possible, même si ce n’est pas
exactement ce que nous voudrions, il est très regrettable que nous,
anarchistes, malgré le courage et l’esprit de sacrifice des
camarades, les initiatives, notre nombre, pas très important, mais
loin d’être négligeable, nous ne réussissions jamais à agir de
nous-mêmes et que, quand nous sommes abandonnés ou trahis, nous ne
puissions que… crier à la trahison. »
Mussolini
au pouvoir
« Les
travailleurs ne surent pas opposer la violence à la violence parce
qu’ils avaient été éduqués dans le respect de la légalité. »
« L’avènement
du fascisme devrait plutôt servir de leçon aux socialistes
légalitaires, qui croyaient et hélas ! croient encore qu’on
peut abattre la bourgeoisie par le système du vote, la moitié plus
une voix des électeurs, et ne veulent pas nous croire lorsque nous
leur disons que s’ils avaient un jour la majorité au Parlement et
voulaient, pour faire des hypothèses absurdes, appliquer le
socialisme depuis ce lieu, ils en seraient chassés à coups de pied
aux fesses ! »
« Politiquement,
le fascisme au pouvoir, avec des formes bestialement brutales et des
façons ridicules et théâtrales, ne fait au fond que ce que tous
les gouvernements ont toujours fait : protéger les classes
privilégiées et créer de nouveaux privilèges pour ses partisans.
Il démontre même aux plus aveugles, qui voudraient croire à
l’harmonie sociale et à la mission modératrice de l’État,
comment l’origine véritable du pouvoir politique et son axe
essentiel pour exister est la violence brutale : le « saint
gourdin ». Et il enseigne par là aux opprimés quelle est la voie
pour s’émanciper et ne pas retomber sous de nouvelles
oppressions : c’est d’empêcher qu’une classe, ou un parti,
ou un homme puisse imposer sa propre volonté aux autres par la
force. »
« C’est
incroyable de voir ces gâchis de liberté, de vie, de dignité
d’êtres humains causés par d’autres êtres humains. Et c’est
humiliant pour celui qui sent qu’il appartient à l’humanité qui
unit tous les hommes, bons ou mauvais, de penser que toutes les
infamies commises n’ont pas produit dans la foule un mouvement
d’indignation, de rébellion, d’horreur et de dégoût. C’est
humiliant pour la nature humaine qu’il puisse exister tant de
férocité et de lâcheté. C’est humiliant que des hommes arrivés
au pouvoir seulement parce que, privés de tout scrupule moral, ils
ont su saisir le bon moment pour menacer une bourgeoisie tremblante,
puissent recueillir l’approbation, ne fût-ce que par une
aberration passagère, d’un nombre de gens suffisant pour imposer à
tout le pays leur propre tyrannie. »
La
nouvelle crise textes écrits dans les années 1920
« Si
le peuple français ne sait pas se libérer de ses Millerand,
Poincaré, Clemenceau, Tardieu, sur lesquels pèse une si grande part
de la responsabilité de la dernière guerre et qui s’emploient
stupidement à préparer la prochaine guerre ; si la révolution
pacificatrice ne vient pas renouveler le monde et établir entre les
peuples des rapports de justice et de fraternité, il ne s’écoulera
pas vingt ans, nous en sommes fermement convaincus, avant que les
Allemands n’entrent à Paris, alliés peut-être avec l’Italie,
pour se venger de toutes les indignités auxquelles ils sont soumis
aujourd’hui et faire aux Français, car tous les militarismes se
valent, ce que les Français leur font aujourd’hui. »
Idéalisme
et matérialisme
« Je
fréquente depuis bien des années les organisations ouvrières, les
groupes révolutionnaires, les sociétés éducatives et j’ai
toujours vu que les personnes les plus actives, les plus sérieuses
étaient celles qui se trouvaient dans les conditions les moins
pénibles et qui étaient attirées non pas leurs soucis, mais par
leur désir de coopérer à une œuvre élevée et de se sentir
ennoblis par un idéal. Les individus vraiment misérables, ceux qui
semblaient le plus directement intéressés à un changement de
situation immédiat, étaient absents ou faisaient partie des gens
passifs. »
« Je
sais bien que les anarchistes terroristes – les rares qui
existent – repoussent toute terreur organisée, exercée sur
l’ordre d’un gouvernement par des agents salariés, et voudraient
que ce soit les masses qui infligent directement la mort aux ennemis.
Mais cela ne ferait qu’empirer la situation. La terreur peut plaire
aux fanatiques, mais elle convient surtout aux vrais malfaiteurs
avides d’argent et de sang. Et il ne faut pas idéaliser les masses
et les voir composées entièrement d’hommes simples, qui peuvent
bien commettre des excès, mais qui sont toujours animés de bonnes
intentions. Les flics et les fascistes servent les bourgeois, mais
ils sortent de la masse ! »
Par
exemple, une municipalité de Londres distribuait des formulaires
pour demander aux habitants du quartier s’ils voulaient ou non une
bibliothèque publique. Tu me croiras si tu veux, mais il y a eu des
anarchistes qui, tout en voulant la bibliothèque, n’ont pas voulu
répondre « oui », parce que répondre c’était voter.
Et
n’y en avait-il pas, du moins à mon époque, à Paris et à
Londres, des camarades qui trouvaient anti-anarchiste de lever
la main pour approuver un ordre du jour qui exprimait leurs idées ?
Ils applaudissaient les orateurs qui défendaient une résolution,
mais après ils refusaient de montrer leur approbation en levant la
main ou par un « oui », parce que les anarchistes ne votent
pas.
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