Ne pas laisser faire les spécialistes
Après
sa victoire aux élections régionales et cantonales, le Parti
Socialiste pavoise. Les médias lui font
de nouveau de l’oeil. Raffarin promet de le consulter pour la mise
en oeuvre du cadeau empoisonné
que constitue la décentralisation. Le PS se découvre même des
accents d’opposant en menaçant
de bloquer la politique de transfert des compétences vers les
régions et les départements si
les crédits ne suivent pas et en se proclamant débouché politique
des luttes sociales. Oublié le bilan
de 23 ans de politique sociale-libérale depuis 1981, le consensus
avec la droite sur la sécurité et les
retraites, la libéralisation de l’économie, la construction
capitaliste de l’Europe. Pourtant le retour en
grâce a tout de la victoire par défaut. Le rejet de la politique de
la droite ne vaut pas adhésion pour un
parti qui ne propose aucune alternative.
Lors
de sa dernière prestation télévisée, Chirac a endossé les habits
de son ancien Premier
ministre
Jospin pour nous dire que la droite comptait faire preuve de plus
d’humanité avec celles et ceux
qu’elle fait souffrir. Ses reculs tactiques (chômeu(se)rs,
intermittent(e)s, chercheu(se)rs...) et la compassion
déversée par Supermenteur, visent à gagner du temps sans trop
gêner le Medef qu'il fera
patienter jusqu’au 13 juin, ainsi qu'à éviter une colère
sociale généralisée. Et pour faire diversion, la droite
s’interroge sur l’opportunité d’ouvrir un contrefeu en
axant sa campagne pour les Européennes sur le refus
d’intégrer la Turquie dans l’UE, comme Le Pen et De
Villiers, qui ont déjà entamé leur campagne xénophobe
antiturcs.
Le
PS, quant à lui, est bien embarrassé sur la question de
la constitution européenne. Ayant voté la plupart des
directives libérales au Parlement européen, favorable
à quelques détails près au texte du projet de constitution,
il va devoir s’adonner à un numéro d’équilibriste
pour
ne pas se couper de la partie de son électorat
qui l’a sanctionné le 21 avril 2002 pour sa politique
de droite et qui a sanctionné Raffarin pour les
mêmes raisons les 21 et 28 mars 2004.
Si
la véritable sanction de cette politique libérale ne peut
donc venir du vote PS, elle ne viendra pas nécessairement de
la liste LO-LCR, les deux organisations étant
en désaccord sur les questions européennes. De plus,
leur campagne ne dépassera pas le cadre national là où PS, PC et
Verts évolueront dans un cadre
continental grâce à un accord avec leurs homologues européens.
Elle peut en revanche venir d’un
non anticapitaliste et internationaliste à un éventuel référendum
sur la constitution européenne, dont
l’organisation ne s’obtiendra pas sans combat.
Mais
la sanction électorale ne peut tenir lieu de projet politique. Les
militant(e)s libertaires doivent prendre
la mesure de la crise de la représentation, mais aussi d’une
demande de démocratie qui se concrétise
à travers la sympathie pour les pratiques libertaires et
autogestionnaires que l’on peut percevoir
fréquemment. Organiser des résistances est nécessaire. S'engager
dans l’auto-organisation de
luttes et d’expériences concrètes est tout aussi indispensable.
[Il
s’agit, pour l’essentiel, de l’édito paru dans le mensuel
“Alternative Libertaire” de mai 2004 (voir page 12)]
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