Il n'est point de Bové
suprême
Le
résultat du référendum français sur feu le traité «
constitutionnel » européen, renforcé par son homologue
néerlandais, n’a pas fini de produire ses effets politiques, sur
le plan national comme au niveau
communautaire. Tandis que les uns ont été renvoyés à leur
anonymat antérieur (qui se souvient encore
de Raffarin ?) ; tandis que les autres tentent, tant bien que mal de
panser leurs blessures (n’est-ce
pas, Hollande et Wehrling ?) ; d’autres pensent déjà aux
perspectives, nouvelles ou confirmées, que
leur ouvre ce résultat.
Sur
la scène politique, à moins de deux ans des élections
présidentielles, les appétits s’aiguisent et, avec
eux, les couteaux pour les satisfaire. A droite, en redevenant le
premier flic de France, Sarkozy a déjà
annoncé la couleur : il entend jouer les Monsieur Propre, prêt à
nettoyer la France entière au Karcher
si telle est la condition pour accéder à l’Elysée. Et gare à
qui se mettra sur son chemin. A la place
du tendre Bayrou et du précieux de Villepin, on se méfierait : un
sale coup est si vite parti…
A
gauche, c’est déjà le trop plein. Fabius, évidemment, mais
aussi Emmanuelli et pourquoi pas Mélenchon, entendent
bien rafler la mise du formidable coup
de poker menteur qu’ils viennent de réaliser. Mais,
pour parvenir à leurs fins, il leur faudra non seulement
reconquérir le PS, mais encore faire oublier
toute leur responsabilité – et elle est grande –
dans
la mise en oeuvre, depuis plus de vingt ans, au niveau
national comme au niveau communautaire, des
politiques néo-libérales dont ils feignent aujourd’hui
de découvrir les ravages sociaux.
Mais
ce ne sont pas les seuls qui rêvent de capitaliser les
« non de gauche » pour s’en faire un matelas de
suffrages aux présidentielles de 2007. Déjà des voix
se font entendre, à la gauche de la gauche gouvernementale, pour
s’opposer à l’OPA des précédents
et mettre en selle un candidat qui soit « authentiquement
» antilibéral et altermondialiste.
Plus
précisément même, le nom de José Bové se met à
circuler ; et, interrogé sur ses intentions à cet égard,
contrairement à ses habitudes, ce dernier a laissé
entendre qu’il pourrait envisager de céder à la sollicitation
pressante des ses amis.
Mettre
l’ensemble des voix de gauche qui se sont portées sur le non et,
plus encore, l’ensemble des citoyens
qui, à travers les comités pour « un non de gauche »,
ont mené campagne, à la remorque d’une
candidature José Bové aux prochaines présidentielles serait
proprement enterrer le faible espoir
né de cette mobilisation citoyenne. Non pas parce qu’il s’agit
de José Bové, qui n’est ni pire ni meilleur
que d’autres histrions politiciens qui pourraient le remplacer.
Mais parce que l’acquis de cette mobilisation
citoyenne est d’avoir permis, pour la première fois depuis
longtemps, à une partie significative
du salariat de s’interroger à nouveau, collectivement et d’une
manière autonome, sur le type
de société qu’elle veut et surtout ne veut pas. Subordonner les
comités pour « un non de gauche »
à
une échéance et une candidature électorales serait perdre tout
l’acquis, encore bien fragile, de cette mobilisation. C'est donc à renforcer l’autonomie de ces comités et à y
approfondir la discussion et la réflexion
collective qu’il faut impérativement travailler, loin des enjeux
factices des campagnes électorales à
venir.
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