Le plat de lentilles de
Raffarin
On
s’agite et on s’énerve au Château. Pensez donc : voilà que les
gueux s’apprêtent à mal voter et à faire
perdre la face à notre Président, notre Premier sinistre, son
gouvernement, les deux premiers secrétaires
de l’UMPS, des dirigeants d’appareils syndicaux bien installés
dans la CES et la cohorte des
intellos et journaleux qui, à leur côté, battent l’estrade
depuis des semaines pour nous expliquer que
le paradis du Capital est à portée d’urne.
Manque
de bol, à en croire les derniers sondages, une majeure partie des
électeurs s’apprêtent à leur
dire « merde ! ». Non pas qu’ils aient mal compris quel est
l’enjeu de ce vote, comme vont le répétant
les mêmes porte-drapeaux de la cause dudit traité, en les faisant
passer pour des demeurés et des
abrutis. Mais bien parce qu’ils l’ont trop bien compris : on veut
non seulement leur faire avaliser les
dégradations néo-libérales “européennes” passées ; mais
encore leur faire consentir par avance à toutes
celles que ce traité rendra possibles dans l’avenir.
Le
traité est illisible et fait pour l’être. Pour le comprendre il
suffit de considérer ce que la vie est devenue
depuis que la fausse gauche ou la vraie droite ont décidé de «
réformer » selon les canons de la
doctrine néo-libérale. Les quatre millions de chômeurs,
le million et demi de personnes en sous emploi, les
plus de six millions de personnes vivant sous
le seuil officiel de pauvreté, voilà la face sombre à
peine cachée du département français du paradis du
Capital qu’il s’agit de « constitutionnaliser ».
Et les
départements étrangers ne se portent pas mieux.
Dans
tous cependant, ce même paradis a aussi, comme
il se doit, son côté lumineux : les profits des grosses
entreprises ont connu une progression historique l’an
dernier, cependant battue par celle enregistrée par
les grandes fortunes.
L’avenir
[déjà présent : voir
p. 5 et 6], on l’a deviné dans
la directive Frankenstein. Il s’agit tout simplement d’égaliser
la condition de tous les travailleurs de
l’Union européenne…par le bas ! La loi du marché est
dure mais c’est la loi : pas de raison que le prolo breton
soit mieux payé que son collègue poméranien, morave
ou syldave.
En
conséquence, pour prévenir la fâcheuse issue prévisible,
le Château gesticule et lâche du lest. Chirac nous
fait croire qu’il a tapé du poing sur la table pour que la
directive en question soit ajournée et révisée.
Fillon a été prié de revoir certains passages de sa copie, qui
avait fait descendre les lycéens dans
la rue. Et Raffarin a promis de mettre la main à la poche pour au
moins couper court à la mobilisation
des fonctionnaires, dans un contexte où d’autres secteurs entrent
en lutte. Luttes
et prise de conscience vont de pair. Le gouvernement voit le danger
et tente d’échanger quelques
votes pour un plat de lentilles : le voilà prêt à “négocier”
de moindres régressions avec des responsables
syndicaux qui n’attendent que ça : ne sont-ils pas, presque tous,
favorables au “oui” ?!
La
ficelle est cependant un peu grosse. A nous de déjouer la manœuvre dans la rue, dans les grèves et
les occupations pour s’offrir, en prime, le 29 mai prochain, le
spectacle de Sarkozy et Hollande tombant
dans les bras l’un de l’autre : en pleurs !
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