Un Théâtre d'Ombres
Comme
en écho à l´éditorial de février dernier dans lequel nous
écrivions que « quelle que soient pour
elle les conséquences institutionnelles, la droite exécutera sa
besogne », Fillon déclarait, dès le soir
du 1er tour, « Nous continuerons, quel que soit le
résultat des élections ». En moins de deux ans,
2002 et 2004, les deux gouvernements du pays ont été successivement
défaits sur le terrain électoral.
A deux reprises le salariat aura dit la même chose : “Nous
ne voulons pas d´une politique de
droite”. Aux présidentielles ce n´est pas la gauche
qui a perdu mais la politique de droite du gouvernement
Jospin qui a été récusée. De même, lors de ces régionales,
c´est la droite qui a perdu et
non la gauche qui a gagné.
Et c´est certainement cette même
volonté de classe de battre la droite qui
explique le recul de LO-LCR au premier tour, cette alliance qui
n’ouvrait d’autre perspective immédiate
que le risque d’une victoire par défaut de l'UMP.
Avec
moins de 10% des inscrits au premier tour, 1,3 million d´électeurs
perdus en 2 ans, toutes les régions à gauche sauf
l’Alsace (heureusement pour la droite que l´Alsace
n’est
plus allemande !), le gouvernement prétend pourtant poursuivre
voire accélérer sa politique. Une politique d´autant
plus autoritaire et brutale qu´elle sera celle d´un pouvoir
aux abois ! Cette nouvelle débâcle d´un parti de gouvernement
sans que l’opposition ait mise en avant un
quelconque projet, programme ou leader, manifeste la
profondeur de la crise politique et sociale.
Ces
élections auront en effet montré que les luttes institutionnelles
ne parviennent plus à remplir leur fonction
d´écran au conflit de classe qui oppose le salariat
au patronat. Car si chacun avait depuis longtemps
compris que Raffarin n´était que le porte-parole
des intérêts de Seillière et de la clique du Medef,
les régionales auront contraint une “gauche” parlementaire,
à travers son slogan « Stop au gouvernement
», à dévoiler que sur le fond elle n´a rien à
proposer aux exploités.
Encore
moins aujourd´hui qu´en 1981, aucun jeu d´alternance électorale
en France ne peut
répondre
à l´exigence de défense et de reconquête des droits collectifs et
sociaux du salariat. Car, sous
la pression du capital transnational, toutes les institutions
européennes (UE) et internationales (FMI,
OMC, AGCS...) organisent et imposent leur démantèlement au niveau
mondial.
Depuis
un an c’est sur le mouvement social et sur lui seul que reposent
espoirs et responsabilités :
Il lui faudra déjouer les illusions de la victoire électorale de la
droite socialote - ce ne sera peut-être pas
trop difficile ; débusquer les équivoques des directions syndicales
confédérales- ce qui sera déjà plus
délicat, mais surtout se donner les moyens programmatiques et
pratiques (par l’organisation à la
base de comités de résistance à la casse sociale) de mener des
luttes victorieuses sur les fronts à venir:
Sécu, droit du travail, services publics, etc.
Au
fond, le 28 mars 2004 risque de répéter et prolonger le 10 mai 81 :
répéter l’illusion d’une victoire
électorale qui se terminera par une amertume sociale ; prolonger, au
seul profit du Capital, la prise
de contrôle par le PS de «l’appareil d’Etat centralisé» par
celle de «l’appareil d’Etat délocalisé».
A
moins que l’irruption du mouvement social ne parvienne à
bouleverser une donne institutionnelle aujourd’hui
verrouillée.
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