Bernard Noël: 25/10/12
"Toujours, toujours saisi par : "Que reste-t-il de ce qu'on a cru quand on ne croit plus? Ou que reste-t-il de ce qu'on n'a pas cru quand on croit?" Saisi pour la raison que ces deux questions ne s'équilibrent pas plus qu'elles ne se renvoient. Entre les deux, un espace baille, un peu, une attente. il me semble que ces "cru" et "croit" demeurent relatifs à une foi, et religieuse. Qu'en est-il du politique ou de la simple relation? l'alternative alors n'est pas si claire ni tranchée. dans ces questions, le cru et le croit représentent un absolu. les engagements humains sont nuancés, ne relèvent pas du tout ou du rien, n'en relèvent pas seulement. bref, si je cherche une issue qui ne soit pas entre deux (conscient que ce serait péjoratif) mais en deça. dans la formule de Chestov :"La transformation des convctions", il y a indiqué un mouvement et non un arrêt. Je vois un Janus tournant et refuse cette image. Sauf que la tête assure l'unité des deux visages. Et là peut-être est la question car c'est le même qui croit et ne croit plus. Non, cela m'embrouille. Il y a dans chaque foi, dans chaque croyance, un autre, et il ouvre un passage vers un avatar positif de la croyance devenue négative. Tout change et cependant tout continue...Suis-je tout bêtement en train de me heurter à mon incapacité de concevoir ce que je désire projeter? Tu parles justement de "salut" pour l'un (celui qui croit) et de "délivrance" (pour celui qui ne croit plus). J'ai toujours cherché à me délivrer du salut et suis sans doute toujours égaré sur le chemin sans chemin -pardonne ma confusion."
Michel Surya: 31/10/12
"Tu as raison, c'est le même qui a cru et qui croit; la séparation n'est donc pas étanche; de là le caractère de Janus que tu es tenté de conférer à cette figure; et qui ne te satisfait pas; je le comprends, moi non plus. Il entre là-dedans beaucoup trop d'absolu encore: dans le cru, dans le croire, et encore: dans le passage de l'un à l'autre. Et c'est mon problème sans doute autant sinon plus que celui de Chestov lui-même (pour quoi je te disais une fois que je "romançais" sa figure, comme celle de Bataille peut-être, aussi bien. La politique, même absolu pour moi "aprè", que Dieu "avant"; mais avant et après ne sont pas si distincts qu'ils ne se confondent pas souvent. Même chose de l'art, de l'amour, ou de la révolution. Pourquoi je parle de la politique en des termes péjoratifs? Parce que la révolution seule de l'absolu de la politique, ou la politique en tant qu'absolu. Illusoire, cela va de soi, et parce qu'illusoire et parce qu'absolue (nécessairement) sanglante. "Chemin sans chemin" dis-tu pour finir en une formule pour une fois blanchotienne. Oui, et le seul possible cependant, quand bien même il n'exalte pas, jamais, qu'il est le patient apprentissage d'un accommodement avec le réel, avec sa désillusion. j'ai beau écrire en ce sens, je n'en montre pas moins dans tout ce que j'écris de la nostalgie pour le contraire. Déchirement."
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