lundi 21 mars 2022

Les vies d'Alexandre Jacob par Bernard Thomas

 Lettre de la mère de Jacob à un ministre:

"Monsieur le Ministre,

C'est une pauvre mère qui vient vous implorer pour son enfant, car mon plus ardent désir dserait de le voir à côté de ses frères combattre pour le droit et la justice contre la barbarie...Ayez, je vous en prie, un mot de pardon pour mon pauvre petit qui est d'une nature droite, courageuse et énerique: ne le laissez pas mourir inutilement...

Il y a déjà onze ans qu'il est détenu, dont neuf à la GUyanne, aux iles du salut. Vous le savez, il ne peut y vivre encore de longues années. Le régime et le climat sont mortels. C'est un révolté, mais quand on est jeune, on est ardent et fougueux, et bien souvent certaine lecture fausse les idées. Mon fils n'a pas tué; pourtant il a été condamné à la prison perpétuelle.

Vous, monsieur le ministre, que je crois juste et bon, en lisant son dossier, bien erroné en certains endroits, je vous supplie d'effacer la haine de partis: car mon fils, prisonnier de droit commun, a bien souvent été regardé comme politique. On n'en a jamais tenu compte. Comme il était au premier jour, il y a onze ans, il est encore: aucune amélioration à son sort, pas même un changement de classe, rien. Il est pourtant resté le temps voulu pour l'obtenir, mais pour lui, rien, jamais aucune clémence. 

On reproche peut-être à mon fils de ne s'être pas laissé emporter par le courant qui existe dans le milieu du bagne: l'entière soumission qui font un forçat. Je ne puis m'expliquer, ce serait trop long; mais quand on est un homme, dans quelque milieu qu'on se trouve, même au bagne, on garde sa dignité d'homme et c'est pourquoi - je sais qu'à cela mon fils n'a jamais manqué - je viens vous dire, monsieur le ministre, sans aucune prétention, que mon fils est un homme. Et dans cette heure sombre et pourtant pleine d'une lueur d'espérance, la France a besoin de toutes ses énergies. Je jette un dernier cri d'espoir et vous prie, monsieur le ministre, de penser à mon pauvre enfant qui meurt lentement. S'il doit mourir en combattant, que ce soit pour la justice et pour le plus sacré des droits: la liberté".


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