jeudi 3 mars 2022

Socialisme ou barbarie N 2. Collectif

 "5. Politique est l'activité cohérente et organisée visant à s'emparer du pouvoir étatique, pour appliquer un programme déterminé. N'est politique ni la rédaction de livres, ni la publication de revues, ni la propagande, ni l'agitation, ni la lutte sur les barricades, qui sont uniquement des moyens qui peuvent jouer un rôle politique énorme, mais qui ne deviennent des moyens politiques que dans la mesure où ils sont consciemment et explicitement liés au but final qui est la disposition du pouvoir étatique en vue de l'application d'un programme déterminé. La forme aussi bien que le contenu de l'activité politique varient évidemment selon l'époque historique dans laquelle celle-ci se place et la classe sociale dont elle exprime les intérêts. Ainsi la politique prolétarienne est l'activité qui coordonne et dirige les efforts de la classe ouvrière pour détruire l'Etat capitaliste, installer à sa place le pouvoir des masses· armées et réaliser la transformation socialiste de la société. Cette politique est l'antithèse exacte de toutes celles qui l'ont précédée, sur tous les points sauf un elle a comme objectif central, comme point autour duquel elle tourne précisément pour l'abolir l'Etat et le pouvoir. 

6. Dans la mesure où l'on admet que l'activité politique révolutionnaire est dans la période actuelle la forme suprême de la lutte de l'humanité pour son émancipation on reconnaît par là-même que la première tâche s'impose à tous ceux qui ont pris conscience de la nécessité de la révolution socialiste, est de se grouper pour préparer collectivement cette révolution. De là découlent inévitablement les traits fondamentaux de toute action politique collective permanente, à savoir la base de la cohérence de toute action collective, c'est-à-dire un programme historique et immédiat, un statut de fonctionnement, une action constante vers l'extérieur. C'est à partir de ces traits que l'on peut définir lé parti révolutionnaire. Le parti révolutionnaire est l'organisme collectif, fonctionnant selon un statut déterminé et sur la base d'un programme historique et immédiat qui tend à coordonner et diriger les efforts de la classe ouvrière, pour détruire l'Etat capitaliste, installer à sa place le pouvoir des masses armées et réaliser la transformation socialiste de la société

7. La nécessité du parti révolutionnaire découle simplement d'un fait qu'il n'existe pas d'autre organisme de la classe capable d'accomplir ces tâches de coordination et de direction d'une manière permanente avant la révolution, et qu'il est impossible qu'il en existe. Les tâches de coordination et de direction de la lutte révolutionnaire selon tous les plans sont des tâches permanentes, universelles et immédiates. Des organismes capables de remplir ces tâches, embrassant la majorité de la classe où reconnus par celle-ci et créés sur la base des usines n'apparaissent qu'au moment de la révolution. Encore ces organismes (organes de type soviétique) ne s' élèvent à la hauteur des tâches historiques qu'en fonction de l'action constante du parti pendant la période révolutionnaire. D'autres organismes, créés sur la base des usines et ne groupant que des éléments d'avant-garde (Comités de lutte}, dans la mesure où ils envisageront la réalisation de ces tâches d'une manière permanente et à l'échelle nationale èt internationale, seront des organismes du type du parti. Mais nous avons déjà expliqué de les Comités de lutte, par le fait qu'ils n'ont pas des frontières strictes et un programme clairement défini, sont des embryons d'organisme soviétiques et non pas des embryons d'organismes du type parti.


8 . La valeur énorme des Comités de lutte, dans Ia période à venir, ne vient pas du fait qu'ils remplaceraient le parti révolutionnaire ce qu'ils ne peuvent ni ne doivent faire mais qu ils représentent la forme permanente de regroupement des ouvriers qui prennent conscience du caractère et du rôle de la bureaucratie. Forme permanente,  non-pas dans le sens qu'un comité de lutte une fois crée, persistera jusqu'à la révolution mais que chaque fois que des ouvriers voudront se grouper sur des positions antibureaucratiques, ils ne pourront le faire que sous la forme du comité de lutte. En effet, les problèmes permanents que pose la lutte des classes sous ses formes les plus immédiates et les plus quotidiennes rendent indispensable une organisation des ouvriers, de la nécessité de laquelle ceux ci ont une cruelle conscience. Le fait, d'autre part, que l'organisation classique des masses crée pour répondre à ces problèmes, le syndicat est devenu et ne peut qu'être de plus en plus l'instrument de la bureaucratie et du capitalisme étatique obligera les ouvriers à s'organiser indépendamment de la bureaucratie et de la forme syndicale elle-même. Les comités de lutte ont tracé la forme de cette organisation de l'avant-garde.

Si les comités de lutte ne résolvent pas la question de la direction révolutionnaires du parti, ils sont cependant le matériel de base pour la construction du parti dans la période actuelle. En effet, non simplement ils peuvent être pour le parti un milieu vital pour son développement, aussi bien du point de vue des possibilités de recrutement que de l'audience qu'ils offrent à son idéologie, non seulement les expériences de leur combat sont un matériel indispensable pour l'élaboration et la concrétisation du programme révolutionnaire mais ils seront les manifestations essentielles de la présence historique de la classe même dans une période où toute perspective immédiate positive fait défaut, comme la période actuelle. A travers eux la classe lancera des assauts partiels mais extrêmement importants contre la dalle bureaucratique et capitaliste, assauts qui seront indispensables pour qu'elle garde la conscience de ses possibilités d'action.

Inversement l'existence et l'activité du parti est une condition insdispensable de la propagation de la généralisation et de l'achèvement de l'expérience des comités de lutte, car le seul peut élaborer et propager les conclusions de leur action.

9. Le fait que la classe ne peut pas créer avant la révolution pour l'accomplissement de ses tâches historiques, un autre organisme que le parti, non seulement n'est pas le produit du hasard mais répond à des traits profonds de la situation sociale et historique du capitalisme décadent. La classe, sous le régime de l'exploitation, est déterminée dans sa conscience concrète par une série de facteurs puissants ( les fluctuations temporelles, les diversités corporatives, locales et nationales, la stratification économique) qui font que son unité sociale et historique est voilée par un ensemble de détermination particulières. D'autre part, l'aliénation qu'elle subit dans le régime capitaliste lui rend impossible de s'attaquer immédiatement à la réalisation des tâches infinies que rend nécessaires la préparation de la révolution. Ce n'est qu'au moment de la révolution que la classe dépasse son aliénation et affirme concrètement son unité historique et sociale. Avant la révolution, il n'y a qu'un organisme strictement sélectif et bâti sur une idéologie et un programme clairement définis, qui puisse défendre le programme de la révolution dans son ensemble et envisager collectivement la préparation de la révolution.

10. La nécessité du parti révolutionnaire ne cesse pas avec l'apparition d'organismes autonomes des masses (organismes soviétiques). Aussi bien l'expérience du passé que l'analyse des conditions actuelles montrent que ces organismes n'ont été et ne seront, au départ, que formellement autonomes et en fait dominés ou influencés par des idéologies et des courants politiques historiquement hostiles au pouvoir prolétarien. ces organismes ne deviennent effectivement autonomes qu'à partir du moment où leur majorité adopte et assimile le programme révolutionnaire que jusque là le parti est seul à défendre sans compromission. Mais cette adoption ne s'est jamais faite et ne se fera jamais automatiquement la lutte constante de l'avant garde de la classe, contre les courants hostiles en est une condition indispensable. Cette lutte exige une coordination et une organisation d'autant plus poussées que la situation sociale est plus critique et le parti est le seul cadre possible de cette coordination et organisation.


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