L'organisation
Anarchiste :
« D'autre
part, ceux qui se déclarent ennemis de l'organisation le sont
habituellement parce qu'ils se sentent incapables de la solidarité
libertaire et au fond ils ne savent pas sortir de ce dilemme:
commander ou être commandés.Ils n'ont pas la conscience
«libertaire» et donc ils ne voient pas théoriquement d'autre
garantie pour la liberté individuelle que l'isolement, le manque de
tout pacte et de tout lien librement accepté. En pratique, ce sont
eux qui veulent diriger le mouvement; et à la première tentative
d'autrui de se soustraire à leur directive, au premier signe
d'indépendance de celui qui s'obstine à penser et à faire à sa
façon, vous les entendez lancer des excommunications, crier à
l'incohérence et à la trahison, et affirmer que celui qui ne dit
pas et ne fait pas comme eux n'est pas anarchiste. Ainsi ont toujours
fait les prêtres de tous les temps et de toutes les religions.
Quelqu'un de bonne foi s'élève plus contre la forme que contre la
substance. »
« Nous
pouvons nous rebeller contre cette mauvaise organisation de la
société, non contre la société elle-même comme se targuent de le
vouloir beaucoup d'individualistes. La société n'est ni un mythe,
ni une idée, ni un organe préordonné et fait par quelqu'un, pour
qu'il soit possible de ne pas la reconnaître et de tenter de la
détruire. Ce n'est même pas, comme nous accusent d'y croire les
stirnériens, une chose supérieure aux individus à laquelle il faut
faire le sacrifice de son moi comme devant un fétiche. La société
est simplement un fait dont nous sommes les acteurs naturels et qui
existe dans la mesure où nous sommes là. La société est
l'ensemble des individus vivants et chaque individu est, à son tour,
tel que les influences externes, sans exclure les sociales, le
forment. »
« Toute
l'action anarchiste finit par se limiter à la partie critique de
l’œuvre d'autrui, à la propagande théorique – souvent
chaotique et pleine de contradictions - et à quelque acte isolé de
rébellion qui, dans la meilleure hypothèse, a justement le tort de
réclamer un effort trop grand pour pouvoir se dérouler et, donc,
exercer une influence grandissante sur les événements. »
« Il
est possible que par l'absence d'organismes libertaires, la nécessité
de vivre suggère aux hommes le rétablissement des autoritaires. »
« L'autorité,
contre la quelle nous combattons, du prêtre, du patron et du
carabinier, mérite bien, pour que l'on s'en débarrasse, que nous
faisions un minimum de sacrifice volontaire de notre orgueil
individuel, pour travailler avec d'autres à nous débarrasser de la
domination bourgeoise et étatique, aussi avec ceux qui n'ont pas
notre force et notre conscience, ainsi que nous nous la sommes
formée. »
«Il
se peut que non seulement les idées nous divisent dans la tactique
mais aussi un peu le tempérament et qu'il détermine l'union ou la
désunion de certains. Je me sens, personnellement, assez maître de
moi même, c'est-à-dire assez individu, il me semble être plus fort
quand je sens derrière, devant et à côté de moi la solidarité
des autres. Il ne me semble pas que je me diminue en me serrant
autour d'un pacte mutuel avec mes camarades de route. Cette question
du tempérament renforce, au lieu de l'affaiblir, ma thèse. S'il y a
des courants qui ne peuvent même pas être unis à cause de leur
tempérament, il vaut mieux que chacun prenne sa voie et qu'ils se
différencient. »
« On
n'insistera jamais assez sur cette vérité: l'absence
d'organisation, visible, normale et voulue par chacun de ses membres
rend possible l'établissement d'organisations arbitraires encore
moins libertaires, qui croient avoir vaincu tout danger
d'autoritarisme seulement en niant leur propre essence. Ces
organisations inconscientes constituent un danger majeur puisqu'elles
mettent le mouvement anarchiste à la disposition et au service des
plus habiles et des plus intrigants. »
« Du
reste, si un des soit-disants inconscients accepte de rester dans une
organisation anarchiste et nous aide dans la lutte, ce sera toujours
mieux et autant de gagné que s'il n'y était pas; il sera de toute
façon plus conscient que ceux qui sont dans l'obscurantisme et
gisent dans l'inaction, ou pire, militent contre nous, force brute
aux mains du prêtre et du chef des carabiniers. Si l'organisation ne
servait qu'à faire le nombre (et elle sert au contraire à faire
tant d'autres choses) , sans tenir compte de la culture qu'elle
diffuse, des connaissances d'idées qui avec le contact continuel
augmentent parmi les organisés, pour cela seulement elle serait
utile comme facteur de conscience individuelle et collective. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire