vendredi 13 juin 2025

13/ La Politique n'est plus qu'un décor creux. Par M A.

 De l argent. La ruine de la politique. Partie. 8


C'est la même ferveur que partagent tous ceux que tout séparait auparavant. Et cette ferveur change tout. Tout le temps que le capital essayait seul d'imposer, et d'imposer à ce qui s'opposait à lui, les règles auxquelles il était déterminé à se soumettre lui-même, on était dans l'histoire que le capitalisme voulait écrire et qui a, toutes ces années, entraîné la guerre idéologique qu'on a vue et à laquelle on a pris part. Mais du jour où le capital a été sans ennemis...?

Du jour où les opposants qu'il avait auparavant sont pour la plupart devenus ses alliés...? Du jour où il n'eut rien de plus précieux que ces alliés que sa victoire lui avait conquis...? C'est que l'histoire du capital était finie sans doute.

Elle ne l'était pas, bien sûr. Nul ne peut prétendre que l'histoire qu'on voit aujourd'hui partout l'emporter ne sois pas celle du capital. En même temps, elle ne peut pas lui être réduite. Le capital l'emporte partout et sans partage. Pourtant, ceux auxquels il doit de l'emporter l'obligent à partager ce qu'il emporte. Et ce n'est plus "capitalisme" qu'il y a lieu de dire pour dire ce qui l'a emporté en effet partout et sans partage; même "capitalisme" n'y suffit pas.


"Domination" est le nom de ce qui l'a emporté.

Et il ne conviendrait pas qu'on croie que la domination préexistait à cette victoire. C'est le contraire même qui s'est passé : la domination est le résultat, obtenu après plusieurs années, d'une victoire dont tirent parti même ceux qui ne l'ont pas voulue. 

Il faut préciser encore : c'est la domination qui s'impose sur le capital quoique ce soit le capital et lui seul qui l'ai emporte. A l'emporter sur ce qui s'opposait à lui, le capital suffisait. Mais à faire que duré, que s'établisse dans la durée la victoire qu'il avait remportée, il n'y suffisait pas. Domination est le nom qu'il convient qu'on donne à ce qu'a formé pour s'établir, pour durer, le capital, en s'alliant à ce que la volonté de transparence et d'égalité formait au même moment. La transparence serait assurée par la presse; l'égalité par la justice. Et ce qui résulterait de cet intérêt dont on n'avait jusqu'alors aperçu qu'il puisse devenir commun à l'argent, aux médias et aux tribunaux s'intitulerait le jour venu: la domination.

Ce qui ne servirait pas alors à désigner seulement un dispositif rhétorique supplémentaire, mais, entre tous les dispositifs rhétoriques supplément susceptibles de désigner le pouvoir le seul aujourd'hui capable d'en totaliser les figures. De tous les pouvoirs qu'il y avait eu lieu de craindre de voir survenir maintenant que s'éloignait la crainte que surviennent les figures d'un pouvoir absolu, c'était sans doute le pire. Voulait-on que l'argent s'imposat? L'argent s'imposerait sans doute, on n'en était plus à espérer le contraire, ni même à préparer que cela n'arrivat pas, on n'en était pas cependant à croire possible que l'argent s'imposât avec les bénédictions de ce qui semblait s'y être opposé. l'argent s'est imposé, sans doute. Mais il s'est imposé en m'imposant en même temps les règles au moyen desquelles l'argent s'imposerait à l'argent; c'est-à-dire, l'argent s'est imposé en même temps que les règles qu'il imposait; c'est-à-dire en même temps aussi que les règles au moyen desquelles la transparence de l'argent régirait dorénavant les termes dans lesquels c'était l'argent qui s'imposerait.

L'opération à laquelle on a assisté au pire, impuissants, au mieux intéressés, a consisté à faire que, par le même mouvement, l'argent s'acquière tout le pouvoir et qu'il n'y ait plus de contrepouvoir ancien qui n'œuvre plus ou moins consciemment à cette acquisition."


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