Aujourd'hui, et pour de très longs et douloureux jours, le procès des attentats du Bataclan et des terrasses de café de Paris va se tenir avec le seul survivant chez les terroristes. Ce jour, le 13 novembre 2015, se sont jouées dans Paris des scènes de guerres.
Guerre importée du moyen orient par des politiciens qui prennent des décisions sans vraiment en peser les conséquences ou en les minimiser ou carrément en les ignorants.
Dans une société où toutes les dérives sont possibles puisque il n'y a plus aucun projet de vie en commun pour laisser passer cet ultime étape du capitalisme: le libéralisme.
Partout où le capitalisme n'est pas le projet de société mis en place, partout la guerre va s'installer.
Partout où le vivre ensemble n'est ^plus possible pour diverses raisons, les intégrismes politiques ou religieux, ou parfois les deux, se développent. Ce sont des projets violents, intolérants et qui vont entrainer la guerre sur tous les territoires.
Là où la guerre restait dans le pays d'origine, maintenant, les conflits s'exportent chez les différents intervenants. Le 11 septembre pour les américains, Le bataclan et les attentats de Toulouse ou de Charlie Hebdo pour la France, les attentats dans Londres etc...
Puisqu'il n'y a plus de perspectives de vie, d'avenir, les idéaux meurtriers deviennent des points de mires exacerbés.
Pour rendre hommage aux victimes, à toutes les victimes, puisqu'une victime n'a ni religion, ni parti politique, ni citoyenneté, ni nationalisme, puisque ce sont les pauvres humains non décisionnaires qui en pâtissent, je dédie cette préface du livre de Riss qui s'intitule :"Une minute quarante-neuf secondes", le temps qu'il a fallu pour décimer une équipe de gamins facétieux, de trublions blasphémateurs, d'adolescents attardés.
"Il est impossible d’écrire quoi que ce soit. On pourra photographier, interviewer, filmer ou dessiner. Mais enfiler des mots les uns après les autres comme des perles sur un fil, en s’imaginant qu’on obtiendra un ravissant bijou, est vain. Se croire capable de partager cette expérience avec les autres est une entreprise perdue d’avance. On ne transmet pas une désagrégation. On ne raconte pas un délitement. Il faudrait fabriquer des mots nouveaux pour écrire la biographie de chaque parcelle de chair qui fut retirée de nos corps. Et autant de récits pour toutes les miettes de viande découpée par des milliers de fourmis qui emportèrent sur leur dos un bout de nos tripes et de nos vies. Chaque phrase sera une fausse victoire car il faudra en écrire des milliers d’autres, qui jamais ne suffiront à esquisser le portrait de l’abîme. À quoi bon écrire ou dessiner. Nos efforts s’effondreront en direction du néant. L’instant où il faudra reposer la plume sera cruel car il sonnera la fin de l’illusion. Celle d’espérer échapper à la solitude. On aimerait n’avoir jamais joué à ce jeu dangereux où l’on imaginait triompher du silence. Le sortilège de l’écriture ou du dessin commence à l’instant où avance le crayon vers la feuille, et il ne s’achèvera que lorsque la totalité prendra fin. Même épuisé, on a envie de tout détruire. Autour de soi la multitude s’arroge le droit de défaillir, de fuir, de gémir, de réclamer, de conspuer ou de diffamer. Les pleurnichards me dégoûtent, les geignards me révoltent, les nombrilistes me révulsent. Chaque microbe se croit le centre d’un monde qui n’a jamais existé. Sans demander notre avis, ils se sont positionnés au milieu de tout et, par là même, ont expulsé les autres vers le dehors. En se retirant, la sauvagerie a laissé place à la vulgarité. Elle fut l’autre violence infligée à nos personnes. Elle s’est assise à la table des disparus et les a souillés de sa laideur. Il n’est pas possible de décrire la fureur qu’elle a fait bouillonner en moi sans être traversé des pieds à la tête par le désir d’écraser ceux qui ont sali notre journal. Car en lui nous avions jeté pendant vingt-trois ans la totalité de notre énergie, comme des bûches dans une chaudière chauffée à blanc, jamais rassasiée, toujours prête à exploser. Jusqu’à ce mois de janvier, où elle atteint son point d’incandescence ultime. Il n’est pas sûr qu’il faille permettre à tous de lire ces lignes. Peut-être certains en souffriront-ils. Mais il faut pourtant les écrire, pour la satisfaction d’au moins un seul. L’écriture est un égoïsme dont le seul but est la délivrance de celui qui s’y prête. Les autres peuvent pleurer. Ils seront convoqués au détour des phrases, comme des fous et des cavaliers sur un échiquier où ils ne gagneront rien. La vérité fera encore saigner ceux qui croyaient que tout était fini. Car cela ne finira jamais. Terrorisme, fanatisme religieux, intolérance primitive. Nos tourments personnels auraient dû avoir l’élégance de s’effacer derrière la nécessité impérieuse de lutter pour des valeurs communes. Mais l’obscénité de notre époque, l’égocentrisme infantile érigé en valeur moderne d’épanouissement ont libéré des flots de narcissisme victimaire aussi déplacé que morbide. Seules la charité et la compassion nous ont été autorisées. Il ne fallait pas se révolter, ne pas désigner de responsables, ni tendre le doigt en direction des lâches et des coupables. Et encore moins dénoncer le prosélytisme de croyances archaïques, de concepts réactionnaires, afin de ne pas heurter ceux qui les pratiquent et veulent les propager pour se sentir moins seuls, enfermés qu’ils sont dans leur pensée moyenâgeuse et totalitaire. Tout cela fut déjà décrit, et il ne sert à rien de le radoter. La violence. Elle n’a pas disparu. On l’a supportée. On l’a encaissée. On l’a absorbée. Tapie dans nos entrailles, elle attend le moment d’en sortir. Comme un volcan endormi pendant des millénaires, un jour elle explosera de nouveau à la face du monde. Ou peut-être jamais. Ceux qui croient qu’elle est derrière nous n’ont pas compris qu’elle est maintenant à l’intérieur de nous. Il n’y aura pas de reconstruction. Ce qui n’existe plus ne reviendra jamais."
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