La joie, satisfaction épanouie
de l'être, souligne l'heureuse possession des biens convoités par les hommes et
l'étendue confiante de leurs espérances : trésors du sentiment, de l'intelli
Elle accompagne, au niveau de l'individualité, les jouis la quiétude continue.
Par épanche souvent au dehors un ravissement difficile à contenir. La joie -
incidemment silencieuse et secrète : joyau caressé de l'élite - s'extériorise
volontiers en démonstrations expansives et fuse en gaîté parfois débordante.
Les âmes simples se livrent avec elle : ils nous la donnent totale et
singulièrement communica Les traits ouverts, le rire des yeux et des lèvres, en
accusent, en avances à la fois provocantes et révélatrices, l'intensité. Sauf
les accidents d'ordre pathologique et certaines exceptions stoïques, la joie
dit la santé physique et met en relief un rythme organique, marqué au sceau du
tempérament. Elle traduit ces vibrations provisoires, intenses à force de
précarité et délicieuses sous la menace de leur fin, que nous appelons bonheur.
Elle dit la nature et la proportion des élans - injustes ou géné la soif guide
ou la foi - de l'être profond et tracent, pour les esprits attentifs, le cercle
où s'agitent ses ondes d'influence. La joie naît et se meut souvent dans
l'inconscience de ses conditions et du bien-fondé de son existence, dans
l'inattention de son éloquence, dans l'indifférence aussi de sa mesure... De la
joie intérieure - forme élevée de la passion - sérénité, Spinoza a pu dire qu'
« elle est le passage de l'homme d'une moindre à une plus grande perfection ».
Une telle joie est essen salutaire... Sont désirables par cela même toutes les
choses que procu de la joie, à nous-mêmes et aux autres. Elles augmentent notre
puissance réactive et aussi notre rayonnement. Joie physique, joie morale, joie
intellec concourent à la plénitude et à l'harmonie, et si, de quelqu'une, l'un
d'entre nous est frustré, s'appuie le domaine de l'ombre dont nos regards
souffriront, et le règne de la peine humaine incruste sa recrudescence. Outre
notre intérêt évident à la joie multipliée, est-il joie plus délicate et plus
pénétrante que de créer de la joie ? Quand les hommes mettront leur riva
semblables deviendront incompréhensibles les artifices grâce auxquels se
maintiennent ces « compatibilités » factices du présent où s'abreuve en douleur
le grand nombre... La joie est aussi l'atmosphère naturelle de l'enfance, que
resserrent et rendent irrespirables tant de facteurs hostiles. Cet âge,
malheureux, est un non-sens et un danger. Outre le châtiment nocif d'une
injustice initiale, il cèle l'anormal en ses replis précoces et ses maturités
prématurées. L'enfance joyeuse et libre ! De la joie d'une santé générale (et
non des spasmes disproportion l'indépendance des voies per sociale) l'éducation
attend ses meilleures conditions. Mais au corps, à l'esprit des jeunes, la
vigilance jalouse des familles et des maîtres, à qui l'obéissance promet,
ajuste ses tuniques de discipline aux « bienfaits » de morale. Elle jugule,
avec méthode, ces curiosités gour faire, au temps d'homme, des unités
menaçantes. En éteignant au ventre, au cerveau la joie des petits, la société
tue au berceau l'appel des mâles exigences. Et elle s'assure, des grands
dévirilisés, la docilité gémissante... Parmi les vices d'un état social que
nous dénonçons ici obstinément, multiples sont les joies dont les circons
détresse d'autrui. Innombrables aussi les joies para place à d'affreuses
crises, à des crispations, à des sanglots. C'est le propre d'un milieu
désordonné que la fréquence de ces joies de proie d'une part, autour de nous,
et, par ailleurs, de tant d'amères consternations. Telles sont, du reste,
l'altération des consciences et les déviations de la morale que ces joies
surgissent et s'affirment dans la conviction de la légitimité, et hors des
titillations du remords et des inquiétudes de l'usurpation, la peine d'autres
humains en fût-elle la base ou la rançon. De même, dans la pensée, dans le cœur
des victimes, anéanties en leur infériorité normalisée, rien ne bondit vers les
joies logiquement méritées... La joie - une des formes du bonheur et une de ses
claires manifestations - seule la rendra accessible à tous un régime équitable.
Car elle ne peut librement naître et se déployer que dans un cadre d'où seront
ban compressibles, dans un social détendu dont seront écartés, parmi les facteurs
de trouble et d'angoisse, ceux au moins réductibles. La joie, pour être pleine,
loyale et juste, doit être l'expression d'une intime harmonie dont l'équilibre
des unités voisines garantit la richesse et le droit de cité. Et notre tâche,
ainsi, vise à préparer, par delà les maux évitables, son règne à l'universelle
joie de vivre. - LANARQUE.
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