vendredi 28 août 2020

Le livre noir des violences sexuelles Du docteur Salmona Partie 4

"L’anesthésie émotionnelle est dangereuse, elle coupe la victime de ses émotions spontanées et ne lui permet pas de réagir comme il faudrait face à une situation à risque. Elle peut se retrouver à supporter sans réaction des violences graves, des abus de pouvoir, à tolérer l’insupportable, à supporter de se sentir très mal à l’aise face à des prédateurs, face à des personnes perverses, malsaines, déséquilibrées ou dangereuses : « Même pas mal ! » Elle peut se retrouver à être la seule personne qui accepte une proposition très anormale, la seule à supporter de graves avanies avec un grand sourire accroché en permanence. C’est le cas des prostituées qui ont presque toutes une dissociation et une anesthésie émotionnelle et physique importantes, et qui de ce fait ressentent peu de dégoût, de rejet, et de douleur lors des rapports sexuels imposés par la situation prostitutionnelle."

"La confusion, la désorientation liées aux symptômes dissociatifs, entraînent des troubles cognitifs et des doutes continuels sur ce qui est perçu, entendu, sur ce qu’on a dit et sur ce qu’on a compris."

"Le risque est grand qu’elles deviennent des victimes de choix pour des agresseurs à l’affût. Plus l’interlocuteur est dangereux, plus il réveillera la mémoire traumatique de la victime qu’il s’est choisie par des attitudes et des paroles déplacées ou incongrues, par une mise en scène de domination, et plus il générera ainsi une dissociation chez elle, et la mettra dans un état hypnoïde qui la rendra incapable de penser, de se défendre, sous emprise. Elle sera « en panne », embrouillée, totalement confuse et donc très vulnérable. Cet état d’incapacité, la victime le pensera dû à sa stupidité, à son infériorité ou à sa timidité maladive, alors qu’il est directement lié au déclenchement de mécanismes de sauvegarde face au danger que représente l’interlocuteur. Mécanismes qui pourraient être une bonne sonnette d’alarme, si la victime en était informée. Mais au lieu de cela, cette situation de danger sera interprétée à l’avantage de l’interlocuteur pervers. Il sera souvent perçu par la victime « hypnotisée » comme quelqu’un de supérieur et d’important, de beaucoup plus intelligent qu’elle, voire comme quelqu’un de fascinant, quelqu’un dont elle pourrait même se croire amoureuse, du fait de mécanismes de dissociation que nous verrons plus loin."

"Les violences éducatives de l’enfance, avec des parents qui exercent des violences physiques et psychologiques sur les enfants qui n’ont pas compris une leçon ou qui ne savent répondre à une question, entraînent souvent de graves blocages par peur de se tromper ou de ne pas savoir, qui paralyseront ensuite l’enfant et l’empêcheront de penser et de trouver des réponses quand on l’interrogera pendant sa scolarité, ce qui mettra fréquemment l’enfant en échec scolaire et ne fera qu’aggraver les violences familiales. La peur pétrifiante de se tromper, de ne pas dire ce qu’il faut, liée à la mémoire traumatique des violences éducatives pourra poursuivre une personne toute sa vie, l’empêchant de donner son avis personnel."

"Et tout sera fait pour les éviter ou tout au moins les anticiper en contrôlant l’environnement : comportements phobiques envahissants, réclusion totale, retrait affectif avec évitement de tout contact, évitement de toute pensée ou parole, état d’alerte perpétuel sans possibilité de se détendre. Cela explique les troubles du sommeil, presque toujours présents – comment s’endormir quand il est impossible de laisser aller, et que l’on redoute des cauchemars ? – mais aussi la fatigue et les douleurs chroniques dont se plaignent constamment les victimes. Être toujours tendue, contractée, prête à bondir pour se sauver, est épuisant et entraîne des douleurs ostéoarticulaires et des céphalées de tension importantes."

"Pour une victime traumatisée, être accompagnée par un guide expérimenté (un proche rassurant et à l’écoute, dont on connaît la rigueur intellectuelle et en qui on a confiance) peut déjà être rassurant, mais de loin, le mieux serait d’être accompagnée d’un « démineur » (un psychothérapeute spécialisé) ou mieux encore, de savoir soi-même désamorcer ou déminer les « bombes » (c’est le but de la psychothérapie)."

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