lundi 24 octobre 2022

Chroniques politiques de Maurice Blanchot

 Et c’est sans doute très fâcheux. Mais c’est un fait. L’économie libérale aujourd’hui est impuissante et ne représente plus que la faillite du capitalisme dont elle a favorisé les audacieuses conquêtes. Elle a contre elle le désordre universel de la crise qu’elle n’a pas prévue, les misères d’un monde qui, en se conformant aux lois de liberté, s’est peu à peu asservi. Elle a contre elle les puissances spirituelles de l’homme qu’elle a voulu ignorer et qui, aujourd’hui, repoussent la société qu’elle protège. Le libéralisme prétend tirer le bien-être général du libre jeu des intérêts personnels. Mais il livre l’homme à ses instincts, aux instruments de production, les machines, à tout un système de loi, de contraintes destiné à assurer le triomphe déréglé des cartels et des trusts. Le libéralisme prétend définir scientifiquement le régime économique qui est seul conforme à l’ordre naturel des choses. Mais il n’a jamais rencontré une société qui fût conforme à ses lois. Le libéralisme prétend enfin éviter les dangers de l’économie dirigée et de l’économie marxiste, qui livrent l’individu à la domination monstrueuse de l’État. Mais il a fait du capitalisme un système épuisant d’oppression contre lequel se dresse aujourd’hui tout ce qu’il y a encore en l’homme de dignité humaine et de force spirituelle. 


Aucun commentaire: