lundi 27 avril 2020

Catéchisme révolutionnaire Par Bakounine Michel Partie 1




Cet ouvrage a été attribué à Bakounine alors qu'il semblerait que le véritable auteur de ce fascicule soit Netchaiev.
Je vais vous retranscrire cet ouvrage entièrement.

Principes généraux

Négation de l'existence d'un Dieu réel, extra mondial, personnel, er par conséquent aussi de toute révélation et de toute intervention divine dans les affaires du monde et de l'humanité. Abolition du service et du culte de la divinité. Remplaçant le culte de Dieu par le respect et l'amour de l'humanité, nous affirmons la raison humaine, comme critérium unique de la vérité ; la conscience humaine, comme base de la justice ; la liberté individuelle et collective, comme unique créateur de l'ordre de l'humanité. La liberté, c'est le droit absolu de tout homme ou femme majeurs, de ne point chercher d'autres sanctions à leurs actes que leur propre conscience et leur propre raison, de ne les déterminer que par leur volonté propre et de n'en être par conséquent responsables que vis-à-vis d'eux-mêmes d'abord, et ensuite vis à vis de la société dont ils font partie. Il n'est point vrai que la liberté d'un homme soit limitée par celle de tous les autres. L'homme n'est réellement libre qu'autant que sa liberté, librement reconnue et représentée comme par un miroir par la conscience libre de tous les autres, trouve la confirmation de son extension à l'infini dans leur liberté. L'homme n'est vraiment libre que parmi les autres hommes également libres ; et comme il n'est libre qu'à titre d'humain, l'esclavage d'un seul homme sur la terre, étant une offense contre le principe même de l'humanité, est la négation de la liberté de tous. La réalisation de la liberté dans l'égalité du droit et du fait est la justice. Il n'existe qu'un seul dogme, qu'une seule loi, qu'une seule base morale pour les hommes, c'est la liberté.

Respecter la liberté de son prochain, c'est le devoir ; l'aimer, l'aider, le servir, c'est la vertu. Exclusion absolue de tout principe d'autorité et de raison d'état. -La société humaine ayant été primitivement un fait naturel, antérieur à la liberté et au réveil de l'humaine pensée, devenue plus tard un fait religieux, organisé selon le principe de l'autorité divine et humaine, doit se reconstituer aujourd'hui sur la base de la liberté, qui doit devenir désormais le seul principe constitutif de son organisation politique aussi bien qu'économique. L'ordre dans la société doit être la résultante du plus grand développement possible de toutes les libertés locales, collectives et individuelles. L'organisation politique et économique de la vie sociale doit partir, par conséquent, non plus comme aujourd'hui de haut en bas et du centre à la circonférence par principe d'unité et de centralisation forcées, mais de bas en haut et la circonférence au centre, par principe d'association et de fédérations libres.


Organisation politique

Il est impossible de déterminer une norme concrète, universelle et obligatoire pour le développement ultérieur et pour l'organisation politique des nations ; l'existence de chacune étant subordonnée à une foule de conditions historiques, géographiques, économiques différentes et qui ne permettront jamais d'établir un modèle d'organisation, également bon et acceptable pour toutes. Une telle entreprise, absolument dénuée d'utilité pratique, porterait d'ailleurs atteinte à la richesse et à la spontanéité de la vie qui se plaît dans la diversité infinie et, ce qui plus est, serait contraire au principe même de la liberté. Pourtant il est des conditions essentielles, absolues en dehors desquelles la réalisation pratique et l'organisation de la liberté seront toujours impossibles. Ces conditions sont : L'abolition radicale de toute religion officielle et de toute Église privilégiée ou seulement protégée, payée et entretenue par l'État. Liberté absolue de conscience et de propagande pour chacun, avec la faculté illimitée d'élever autant de temples qu'il plaira à chacun, à ses dieux, quels qu'ils fussent, et de payer, d'entretenir les prêtres de sa religion. Les Églises, considérées comme corporations religieuses, ne jouiront d'aucun des droits politiques qui seront attribués aux associations productives, ne pourront ni hériter, ni posséder des biens en commun excepté leurs maisons ou établissements de prière, et ne pourront jamais s'occuper de l'éducation des enfants, l'unique objet de leur existence étant la négation systématique de la morale, de la liberté et la sorcellerie lucrative. Abolition de la monarchie, république. Abolition des classes, des rangs, des privilèges et de toutes sortes de distinctions. Égalité absolue des droits politiques pour tous, hommes et femmes ; suffrage universel. Abolition, dissolution et banqueroute morale, politique, judiciaire, bureaucratique et financière de l'État tutélaire, transcendant, centraliste, doublure et alter ego de l'Église, et comme telle, cause permanente d'appauvrissement, d'abrutissement et d'asservissement pour les peuples. Comme conséquence naturelle : abolition de toutes les universités de l'État, le soin de l'instruction publique devant appartenir exclusivement aux communes et aux associations libres ; abolition de la magistrature de l'État, tous les juges devant être élus par le peuple ; abolition des codes criminels et civils qui sont actuellement en vigueur en Europe, parce que tous, également inspirés par le culte de Dieu, de l'État, de la famille religieusement ou politiquement consacrée, et de la propriété, sont contraires au droit humain, et parce que le code de la liberté ne pourrait être créé que pour la seule liberté. Abolition des banques et de toutes les institutions de crédit de l'État. Abolition de toute administration centrale, de la bureaucratie, des armées permanentes et de la police de l'État. Élection immédiate et directe de tous les fonctionnaires publics, judiciaires et civils, aussi bien que de tous les représentants ou conseillers nationaux, provinciaux et communaux, par le peuple, c'est-à-dire par le suffrage universel de tous les individus, homme et femmes majeurs. Réorganisation intérieure de chaque pays en prenant pour point de départ et pour base la liberté absolue des individus, des associations productives et des communes.

Droits individuels

Droit pour chacun, homme ou femme, depuis la première heure de sa naissance jusqu'à l'âge de sa majorité, d'être complètement entretenu, surveillé, protégé, élevé, instruit dans toutes les écoles primaires publiques, secondaires, supérieurs, industrielles, artistiques et scientifiques, aux frais de la société. Droit égal pour chacun d'être conseillé et soutenu par cette dernière, dans la mesure du possible, au commencement de la carrière que chaque individu, devenu majeur, absolument libre, n'exercera plus sur lui ni surveillance ni autorité aucune et, déclinant vis-à-vis de lui toute responsabilité, ne devra plus que le respect et, au besoin, la protection de sa liberté. La liberté de chaque individu majeur, homme et femme, doit être absolue et complète, liberté d'aller et de venir, de professer hautement toutes les opinions possibles, d'être fainéant ou actif, immoral ou moral, de disposer en un mot de sa propre personne ; liberté de vivre, soit honnêtement de son propre travail, soit en exploitant honteusement la charité ou la confiances privée, pourvu que cette charité et cette confiance soient volontaires et ne lui soient prodiguées que par des individus majeurs. Liberté illimitée de toute sorte de propagande par le discours, par la presse, dans les réunions publiques et privées, sans autre frein à cette liberté que la puissance salutaire naturelle de l'opinion publique. Liberté absolue d'associations, sans exempter celles qui par leur objet seront ou paraîtront immorales et même celles qui auront pour objet la corruption et la [destruction] [Illisible sur le manuscrit de Nettlau.] de la liberté individuelle et publique. La liberté ne peut et ne doit se défendre que par la liberté ; et c'est un contresens dangereux que de vouloir y porter atteinte sous le prétexte spécieux de la protéger ; et, comme la morale n'a pas d'autre source, d'autre stimulant, d'autre cause, d'autre objet que la liberté, et comme elle n'est elle-même rien que la liberté, toutes les restrictions qu'on a imposées à cette dernière dans le but de protéger la morale ont toujours tourné au détriment de celle-ci.
La psychologie, la statistique et tout l'histoire nous prouvent que l'immoralité individuelle et sociale a toujours été la conséquence nécessaire d'une mauvaise éducation publique et privée, de l'absence et de la dégradation de l'opinion publique qui n'existe et ne se développe et ne se moralise jamais que par la seule liberté ; et la conséquence surtout d'une organisation vicieuse de la société. L'expérience nous apprend, dit l'illustre statisticien Quételet [Bakounine avait écrit : « L'illustre statisticien français Crételet. » En fait, il s'agit du Belge A. Quételet (1798-1831), statisticien et sociologue.] que c'est la société qui prépare toujours les crimes et que les malfaiteurs ne sont que les instruments fatals qui les accomplissent. Il est donc inutile d'opposer à l'immoralité sociale les rigueurs d'une législation qui empiéterait sur la liberté individuelle. L'expérience nous apprend, au contraire, que le système répressif et autoritaire, loin d'en avoir arrêté les débordements, l'a toujours plus profondément et plus largement développée dans les pays qui s'en sont trouvés atteints, et que la morale publique et privée a toujours descendu et monté à mesure que la liberté des individus se rétrécissait ou s'élargissait. Et que, par conséquent, pour moraliser la société actuelle, nous devons commencer d'abord par détruire de fond en comble toute cette organisation politique et sociale fondée sur l'inégalité, sur le privilège, sur l'autorité divine et sur la méprise [le mépris ? » de l'humanité ; et après l'avoir reconstruite sur les bases de la plus complète égalité, de la justice, du travail, et d'une éducation rationnelle uniquement inspirée par le respect humain, nous devons lui donner l'opinion publique pour garde et, pour âme, la liberté la plus absolue. Pourtant la société ne doit point rester complètement désarmée contre les individus parasites, malfaisants et nuisibles. Le travail devant être la base de tous les droits politiques, la société, comme une province, ou nation, chacune dans sa circonscription respective, pourra en priver [de ces droits » tous les individus majeurs qui n'étant ni invalides, ni malades, ni vieillards, vivront aux frais de la charité publique ou privée, avec l'obligation de les leur restituer aussitôt qu'ils recommenceront à vivre de leur propre travail. La liberté de chaque individu étant inaliénable, la société ne souffrira jamais qu'un individu quelconque aliène juridiquement la liberté, ou qu'il l'engage par contrat vis-à-vis d'un autre individu Catéchisme révolutionnaire autrement que sur le pied de la plus entière égalité et réciprocité. Elle ne pourra pourtant pas empêcher qu'un homme ou qu'une femme, dénués de tout sentiment de dignité personnelle, ne se mettent sous contrat vis-à-vis d'un autre individu, dans un rapport de servitude volontaire, mais elle les considérera comme des individus vivant de la charité privée et par conséquent destitués de la jouissance des droits politiques, pendant toute la durée de cette servitude. Toutes les personnes qui auront perdu leurs droits politiques seront également privées de celui d'élever et de garder leurs enfants. En cas d'infidélité à un engagement librement contracté ou bien en cas d'attaque ouverte ou prouvée contre la propriété, contre la personne et surtout contre la liberté d'un citoyen, soit indigène soit étranger, la société infligera au délinquant indigène ou étranger les peines déterminées par ses lois. Abolition absolue de toutes les peines dégradantes et cruelles, des punitions corporelles et de la peine de mort, autant que consacrée et exécutée par la loi. Abolition de toutes les peines à terme indéfini ou trop long et qui ne laissent aucun espoir, aucune possibilité réelle de réhabilitation, le crime devant être considéré comme une maladie et la punition plutôt comme une cure que comme une vindicte de la société. Tout individu condamné par les lois d'une société quelconque, commune, province ou nation, conservera le droit de ne pas se soumettre à la peine qui lui aura été imposée, en déclarant qu'il ne veut plus faire partie de cette société. Mais dans ce cas celle-ci aura à son tour le droit de l'expulser de son sein et de le déclarer en dehors de sa garantie et de sa protection. Retombé ainsi sous la loi naturelle œil pour œil, dent pour dent, au moins sur le terrain occupé par cette société, le réfractaire pourra être pillé, maltraité, même tué sans que celle-ci s'en inquiète. Chacun pourra s'en défaire comme d'une bête malfaisante, jamais pourtant l'asservir ni l'employer comme esclave.

Droits des associations

Les associations coopératives ouvrières sont un fait nouveau dans l'histoire ; nous assistons aujourd'hui à leur naissance, et nous pouvons seulement pressentir, mais non déterminer à cette heure l'immense développement que, sans aucun doute, elles prendront et les nouvelles conditions politiques et sociales qui en surgiront dans l'avenir. Il est possible et même fort probable que, dépassant un jour les limites des communes, des provinces et même des États actuels, elles donnent une nouvelle constitution à la société humaine tout entière, partagée non plus en nations, mais en groupes industriels différents, et organisés selon les besoins non de la politique, mais de la production. Ceci regarde l'avenir. Quant à nous, nous ne pouvons poser aujourd'hui que ce principe absolu : quel que soit [leur] objet, toutes les associations, comme tous les individus, doivent jouir d'une liberté absolue. La société, ni aucune partie de la société : commune, province ou nation, n'a le droit d'empêcher des individus libres de s'associer librement dans un but quelconque : religieux, politique, scientifique, industriel, artistique ou même de corruption sur elle et d'exploitation des innocents et des sots, pourvu qu'ils ne soient point mineurs. Combattre les charlatans et les associations pernicieuses, c'est uniquement l'affaire de l'opinion publique. Mais la société a le devoir et le droit de refuser la garantie sociale, la reconnaissance juridique et les droits politiques et civiques à toute association, comme corps collectif, qui, par son objet, ses règlements, ses statuts serait contraire aux principes fondamentaux de sa constitution,, et dont tous les membres ne seraient pas mis sur un pied d'égalité et de réciprocité parfaites, sans pouvoir en priver les membres eux-mêmes seulement pour le fait de leur participation à des associations non régularisées par la garantie sociale. La différence entre les associations régulières et irrégulières sera donc celle-ci : les associations juridiquement reconnues comme corps collectifs auront, à ce titre, le droit de poursuivre devant la justice sociale tous les individus, membres ou étrangers, aussi bien que toutes les autres associations régulières, qui auront manqué à leur engagement envers elles. Les associations juridiquement non reconnues n'auront point ce droit à titre de corps collectifs ; aussi elles ne pourront être soumises, à ce titre, à aucune responsabilité juridique, tous leurs engagements devant être nuls aux yeux d'une société qui n'aura point sanctionné leur existence collective, ce qui pourtant ne pourra ne libérer aucun de leurs membres des engagements qu'ils auront pu prendre individuellement. Catéchisme révolutionnaire

Organisation politique nationale

La division d'un pays en régions, provinces, districts et communes, ou en départements et communes comme en France, dépendra, naturellement de la disposition des habitudes historiques, des nécessités actuelles et de la nature particulière de chaque pays. Il ne peut y avoir ici que deux principes communs et obligatoires pour chaque pays, qui voudra organiser sérieusement chez lui la liberté. Le premier : c'est que toute organisation doit procéder de bas en haut, de la commune à l'unité centrale du pays, à l'État, par voie de fédération. La seconde : c'est qu'il y ait entre la commune et l'État au moins un intermédiaire autonome : le département, la région ou la province. Sans quoi, la commune, prise dans l'acception restreinte de ce mot, serait toujours trop faible pour résister à la pression uniformément et despotiquement centralisatrice de l'État, ce qui ramènerait nécessairement chaque pays au régime despotique de la France monarchique, comme nous en avons eu deux fois l'exemple en France, le despotisme ayant eu toujours sa source beaucoup plus dans l'organisation centralisante de l'État que dans les dispositions naturellement toujours despotiques des rois. La base de toute l'organisation politique d'un pays doit être la commune, absolument autonome, représentée toujours par la majorité des suffrages de tous les habitants, hommes et femmes à titre égal, majeurs. Aucun pouvoir n'a le droit de se mêler dans sa vie, dans ses actes et dans son administration intérieure. Elle nomme et destitue par élection tous les fonctionnaires : administrateurs et juges, et administre sans contrôle les biens communaux et les finances. Chaque commune aura le droit incontestable de créer indépendamment de toute sanction supérieure sa propre législation et sa propre constitution. Mais, pour entrer dans la fédération provinciale et pour faire partie intégrante d'une province, elle devra absolument conformer sa charte particulière aux principes fondamentaux et la constitution provinciale et la faire sanctionner par le parlement de cette province. Elle devra se soumettre aussi aux jugements du tribunal provincial et aux mesures qui, après avoir été sanctionnées par le vote du parlement provincial, lui seront ordonnées par le gouvernement de la province. Autrement elle sera exclue de la solidarité, de la garantie et communauté, [s'étant mise] hors la loi provinciale. La province ne doit être rien qu'une fédération libre de communes autonomes. Le parlement provincial comprenant, soit une seule chambre composée de représentants de toutes les communes, soit de deux chambres, dont l'une comprendrait les représentants des communes, l'autre les représentants de la population provinciale tout entière, indépendamment des communes., le parlement provincial, sans s'ingérer aucunement dans l'administration intérieure des communes, devra établir les principes fondamentaux qui devront constituer la charte provinciale de devront être obligatifs (sic) pour toutes les communes qui voudront participer au [parlement provincial] [Ici, dans le manuscrit de Nettlau, plusieurs mots illisibles.]. [Prenant les principes du présent catéchisme, pour base], le parlement codifiera la législation provinciale par rapport tant aux devoirs et aux droits respectifs des individus, des associations et des communes, qu'aux peines qui devront être imposées à chacun en cas d'infraction aux lois par lui établies, laissant pourtant aux législations communales le droit de diverger de la législation provinciale sur des points secondaires, mais jamais dans la base ; tendant à l'unité réelle, vivante, non à l'uniformité, et se confiant, pour former une unité encore plus intime, à l'expérience, au temps, au développement de la vie en commun, aux propres convictions et nécessités de la commune, à la liberté en un mot, jamais à la pression ni à la violence du pouvoir provincial, car la vérité et la justice même, violemment imposées, deviennent iniquité et mensonge. Le parlement provincial établira la charte constitutive de la fédération des communes, leurs droits et leurs devoirs respectifs, ainsi que leurs devoirs et droits vis-à-vis du parlement, du tribunal et du gouvernement provinciaux. Il votera toutes les lois, dispositions et mesures qui seront commandées, soit par les besoins de la province tout entière, soit par des résolutions du parlement national, sans perdre jamais de vue l'autonomie provinciale ni l'autonomie des communes. Sans jamais s'ingérer dans l'administration intérieure des communes, il établira la part de chacun, soit dans les impôts nationaux, soit dans les impôts provinciaux. Cette part sera répartie par la commune elle-même entre tous ses habitants valides et majeurs. Il contrôlera enfin tous les actes, sanctionnera ou rejettera toutes les propositions du gouvernement provincial, qui sera mutuellement toujours électif. Le tribunal provincial, également électif, jugera sans appel toutes les causes entre individus et communes, entre associations et communes, entre communes et communes, et en première instance toutes les causes entre la commune et le gouvernement et le parlement de la province. La nation ne doit être rien qu'une fédération de provinces autonomes. Le parlement national comprenant, soit une seule chambre composée des représentants de toutes les provinces, soit deux chambres dont l'une comprendrait les représentants des provinces, l'autre les représentants de la population nationale tout entière indépendamment des provinces, le parlement national, dans s'ingérer aucunement dans l'administration et dans la vie politique intérieure des provinces, devra établir les principes fondamentaux qui devront constituer la charte nationale et qui seront obligatoires pour toutes les provinces qui voudront participer au pacte national. Le parlement national établira le code national, laissant aux codes provinciaux le droit d'en diverger sur les points secondaires, jamais sur la base. Il établira la charte constitutive de la fédération des provinces, votera toutes les lois, dispositions et mesures qui seront commandées par les besoins de la nation tout entière, établira les impôts nationaux et les répartira entre les communes respectives, contrôlera enfin tous les actes, adoptera ou rejettera les propositions du gouvernement exécutif national qui sera toujours électif et, à terme, formera les alliances nationales, fera la paix et la guerre, et seul aura le droit d'ordonner pour un terme déterminé la formation d'une armée nationale. Le gouvernement ne sera que l'exécuteur de ses volontés. Le tribunal national jugera sans appel toutes les causes des individus, des associations, des communes entre [eux et la] province, aussi bien que tous les débats entre provinces. Dans les causes entre la province et l'État, qui seront également soumises à son jugement, les provinces pourront en appeler au tribunal international, s'il se trouve un jour établi.




La Fédération internationale

La Fédération comprendra toutes les nations qui se seront unies sur les bases ci-dessus et ci-dessous développées. Il est probable et est fort désirable que, lorsque l'heure de la grande Révolution aura de nouveau sonné, toutes les nations qui suivront la lumière de l'émancipation populaire se donnent la main pour une alliance constante et intime contre la coalition des pays qui se mettront sous les ordres de la réaction. Cette alliance devra former une fédération universelle des peuples qui, dans l'avenir, devra embrasser toute la terre. La fédération internationale des peuples révolutionnaires avec un parlement, un tribunal et un comité directeur internationaux, sera basée naturellement sur les principes mêmes de la révolution. Appliqués à la politique internationale, ces principes sont : Chaque pays, chaque nation, chaque peuple, petit ou grand, faible ou fort, chaque région, chaque province, chaque commune ont le droit absolu de disposer de leur sort ; de déterminer leur exigence propre, de choisir leurs alliances, de s'unir et de se séparer, selon leurs volontés et besoins sans aucun égard pour les soi-disant droits historiques et pour les nécessités politiques, commerciales ou stratégiques des États. L'union des parties en un tout, pour être vraie, féconde et forte, doit être absolument libre. Elle doit uniquement résulter des nécessités locales intérieures et de l'attraction mutuelle des parties, attraction et nécessités dont les parties sont seules juges. Abolition absolue du soi-disant droit historique et de l'horrible droit de conquête comme contraires au principe de la liberté. Négation absolue de la politique d'agrandissement, de gloire et de puissance de l'État, politique qui, faisant de chaque pays une forteresse qui exclut de son sein tout le reste de l'humanité, le force pour ainsi dire [à] se suffire absolument à lui-même., à s'organiser en lui-même comme un monde indépendant de toute humaine solidarité et [à] mettre sa prospérité et sa gloire dans le mal qu'il fera aux autres nations [Sur le manuscrit de Nettlau, « de » au lieu de « à ».]. Un pays conquérant est nécessairement un pays intérieurement esclave. La gloire et la grandeur d'une nation consistent uniquement dans le développement de son humanité. Sa force, son unité, la puissance de sa vitalité intérieure se mesurent uniquement par le degré de sa liberté. En prenant la liberté pour base, on arrive nécessairement à l'union ; mais de l'unité on arrive difficilement, sinon jamais, à la liberté. Et si l'on y arrive, ce n'est qu'en détruisant une unité qui a été faite en dehors de la liberté. La prospérité et la liberté des nations comme des individus sont absolument solidaires, et par conséquent liberté absolue de commerce, de transaction et de communication entre tous les pays fédérés. Abolition des frontières, des passeports et des douanes. Chaque citoyen d'un pays fédéré doit jouir de tous les droits civiques et doit pouvoir facilement acquérir le titre de citoyen et tous les droits politiques dans tous les autres pays appartenant à la même fédération. La liberté de tous, individus et corps collectifs étant solidaires, aucune nation, aucune province, aucune commune et association ne sauraient être opprimées, sans que toutes les autres ne soient et ne se sentent menacés dans leur liberté. Chacun pour tous et tous pour chacun, telle doit être la règle sacrée et fondamentale de la Fédération internationale. Aucun des pays fédérés ne pourra conserver d'armée permanente, ni d'institution qui sépareront le soldat du citoyen. Causes de ruine, de corruption, d'abrutissement et de tyrannie intérieurs, les armées permanentes et le métier de soldat sont [en outre] une [menace] contre la prospérité et l'indépendance de tous les autres pays. Chaque citoyen valide doit au besoin devenir soldat pour la défense soit de ses foyers, soit de la liberté. L'armement matériel doit être organisé dans chaque pays par commune et par province, à peu près comme dans les États-Unis de l'Amérique et en Suisse. Le parlement international, composé soit d'une seule chambre, comprenant les représentants de toutes les nations, soit deux chambres, comprenant l'une ces mêmes représentants, l'autre les représentants directs de toute la population comprise par la Fédération internationale, sans distinction de nationalité, le parlement fédéral, ainsi composé, établira le pacte international et la législation fédérale que lui seul aura encore la mission de développer et de modifier selon les besoins du temps. Le tribunal international n'aura d'autre mission que de juger en dernière instance entre les États et leurs provinces Catéchisme révolutionnaire respectives. Quant aux différents qui pourront surgir entre deux États fédérés, ils ne pourront être jugés en première et en dernière instance que par le parlement international qui décidera encore sans appel, dans toutes les questions de politique commune et de guerre, au nom de la fédération révolutionnaire tout entière, contre la coalition réactionnaire. Aucun État fédéré ne pourra jamais faire la guerre à un autre État fédéré. Le parlement international ayant prononcé son jugement, l'État condamné dot s'y soumettre. Sinon tous les autres États de la fédération devront interrompre leurs communications avec lui, le mettre en dehors de la loi fédérale, de la solidarité et de la communion fédérale et, en cas d'attaque de sa part, s'armer solidairement contre lui. Tous les États faisant partie de la fédération révolutionnaire devront prendre une part active à toute guerre que l'un d'eux ferait à un État non fédéré. Chaque pays fédéré, avant de la déclarer, doit en avertir le parlement international, et ne la déclare que si celui-ci trouve qu'il y a une raison suffisante pour la guerre. S'il le trouve, le directoire exécutif fédéré prendra la cause de l'État offensé et demandera à l'État agresseur étranger, au nom de toute la fédération révolutionnaire, prompte réparation. Si au contraire le parlement jugeait qu’il n’y a pas eu d’agression, ni d’offense réelle, il conseillerait à l'État qui se plaint de ne point commencer la guerre, en l'avertissant que s'il la commence, il la fera tout seul. Il faut espérer qu'avec le temps les États fédérés renonçant au luxe ruineux de représentations particulières se contenteront d'une représentation diplomatique fédérale. La fédération internationale révolutionnaire restreinte sera toujours ouverte aux peuples qui voudront y entrer plus tard, sur la base des principes et de la solidarité militante et active de la Révolution ci-dessus et ci-dessous exposés, mais sans jamais faire la moindre concession de principes à aucun. Par conséquent ne pourront être reçus dans la fédération que les peuples qui auront accepté tous les principes récapitulés [dans le présent catéchisme révolutionnaire].

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