« Aussi
est-ce avec le plus grand plaisir que nous recevons les injures
angoissées de gens qui ont crûs nous posséder, dans tous les sens
du terme, et qui nous ont vu les fuir avec l'énergie même qu'ils
avaient mis à nous lier à eux. Petits bourgeois des trotskystes,
provocateurs des staliniens, délirants des sociologues, renégats
des ultras-gauchistes , plus que jamais nous sommes tous ce que nous
ne sommes pas. Et nous serions portés à en être fiers , si le
ridicule même de nos juges ne nous poussait à leur rire au nez. »
« Ce
n'est qu'en reconnaissant la vie dans sa totalité et sous tous les
apparats dont elle se plaît à se déguiser que nous prendrons , en
la dévêtant avec le goût même qu'elle met à jouer avec nous, le
plaisir de la pénétrer comme une amante fidèle au seul souvenir
des passions ».
« Osmose :
La maladie sociale la plus courante réside dans l'identification
toujours plus poussée du travailleur et de l'instrument de son
travail...Dépossédé de lui-même par le travail salarié, le
prolétaire perd peu à peu le sens de l'humain pour devenir
prolongement dynamique de la machine qui le domine, qui lui suce sa
vie... L'amour du travail bien fait, le soin accordé à l'instrument
de travail font partie des symptômes de l'aliénation des
prolétaires...Le fil de la vie réelle est devenu si ténu , si
mince, l'attention se reporte sur l'agent de la misère, la machine,
expression matérielle de l'organisation capitaliste du travail.
L'usine devient pour le prolétaire l'axe de sa survie...Et si la
machine tombe en panne, s'arrête, la « vie » semble
s'arrêter elle aussi pour l'aliéné ramené à sa misère vraie dès
qu'il ne s'active plus dès qu'il ne produit plus. Alors il
s'empresse à réparer, à remettre en route l'organe de son propre
suicide d'homme salarié... »
« Venez
rêver, sentir,
jouer, créer au centre Beaubourg, aimer marcher, parler, dormir,
manger au Club Méditérranée, les programmeurs de la vie aliénée
nous invite à nous livrer aux joies de l'aventure, à retrouver le
goût de l'authentique et du merveilleux, à nous réconcilier avec
nous-mêmes et avec les autres, à recomposer le puzzle de notre
existence fragmentée, bref en clair, à nous laisser tenter par le
piège des distractions, passions et activités illusoires,
soigneusement planifiées dans un cadre vide de vie et présentées
grossièrement comme le retour à la COMMUNAUTE HUMAINE.
Comble
de l'illusion, c'est dans le cadre déshumanisé des loisirs aliénés
fonctionnant comme organisation de l'ennui et remplissage "des
temps libres que chacun de nous est convié à RECONQUERIR ce que
nous ne possédons pas en propre, NOTRE VIE MEME. Ceci par le
biais d'une gamme d'activités qui sont normalisées, chloroformées,
vidées de leur contenu et de leur richesse créatrice, agencées
pour nous nous pensions libres d'agir. De fait, nous sommes
REELLEMENT contrôlés par toute une organisation qui nous enlève ce
qu'elle prétend nous revendre: le rêve, la création etc...Sans
doute, cette prétention mensongère qu'affichent les organisateurs à
réapprendre aux gens les signes élémentaires de la vie
trouve-t-elle ses racines dans le vide de l'existence, LA
PARCELLISATION ·et LA DESARTICULATION à l'infini des activités,
des passions émasculées au point d'apparaître comme nulles et
bestiales: l'amour vu au travers des bordels bourgeois, le langage
codifié par la publicité marchande...Cette ATOMISATION procède de
cette même réalité sociale qui scelle chaque individu dans une
sphère spécifique d'activités et de catégories (prolétaire,
électeur, consommateur.) et qui sous les effets de la division du
travail et de l'organisation sociale rend les hommes étrangers à
leur être et réprime tout un monde de dispositions et de facultés
productrices.
Ce
qui est en jeu dans ce monde de séparation, au travers de la
programmation de nos Vies, c'est L'IMPOSSIBILITE pour les individus
morcelés à maîtriser la totalité de leurs manifestations
humaines, à déployer leurs aptitudes physiques et intellectuelles,
à posséder cette vie universelle ennemie des passions tristes. Ce
qui est proposé ici, c'est la fuite vers « des séjours
trompeurs, ces abris classiques qui ont la réputation de dispenser
une consolation" : celle où faute de créer
passionnellement sa vie, on consomme passivement ce qui n'est plus
qu'une caricature de l'existence, et où l'individu n'échappe en
rien à l'exploitation forcenée de sens et·activités, présentés
sous le seul angle de la consommation marchande »
«Alors
que les moyens de prévision et de manipulation sont parvenus à un
degrés jamais atteint dans l'histoire de l'humanité, l'incertitude
qui pèse sur l'avenir, comme les surprises du présent, sont la
tabula rasa salutaire pour toute pensée radicale. Seuls les
:fonctionnaires appointés de la théorie, perpétuant la stupidité
congénitale de leurs analyses, peuvent y voir une simple "lacune". »
« Dans
les heures de détresses et de reflux, le fragmentaire grain de sable
à :faire grincer la machine, se réduit à son minimum,
l'individualité. Il n'est qu'a voir comment l'individu est attaqué
de toute part, avili dans son travail et son repos pour comprendre
qu'il est le dernier bastion toujours menaçant et toujours
imprenable. »
«En
ce sens le capital
tend à la totalité. C'est aussi pourquoi cette totalité est
fausse. Car le nombre, l'unidimensionalité, le quantitatif se
réalise par la
liquidation du qualitatif. Mais tant que Pierre ne sera pas
identique à Paul, ni Paul à Pierre, la domination du capital reste
menacée. »
«Disons
tout de suite qu'ici se trouve refusée l'instance fondamentale de la
société bourgeoise, la médiation. Cette médiation existe aussi
bien au niveau social que dans la sphère de la pensée. Au niveau
social,. parti, syndicat, délégué, gouvernant, la médiation
s'interpose toujours entre le sujet et le pouvoir, entre le capital
et le travail. Comme Hegel l'a montré, elle est· le moyen
terme qui permet
d'accomplir l'équivalence, l'échange. Sans
la médiation syndicale
la revendication brute du travailleur ne serait
pas recevable, donc monnayable
par·le patronat. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire