dimanche 28 juin 2020

Eugène Varlin ouvrier relieur




« Non content d’étouffer dans l’ouvrier la vie intellectuelle et la vie morale, les industriels lui ravissent encore la vie animale par l’excès de travail et les privations en maintenant une partie des travailleurs dans le chômage, et en surchargeant l’autre partie d’un travail excessif. On peut dire sans exagération qu’ils font lentement mourir les uns de faim et les autres d’épuisement. »
« 31 décembre 1869 Aux membres de l’Association internationale des travailleurs À tous les travailleurs Déclaration En présence de l’appel si légitime et presque désespéré des ouvriers houilleurs de Waldenbourg (Allemagne) adressé aux membres de l’Association internationale des travailleurs, et dans l’impossibilité où nous sommes d’intervenir matériellement dans la lutte qu’ils ont à soutenir en ce moment contre les chefs industriels, pour s’assurer une existence conforme à la dignité humaine. Nous faisons la déclaration suivante : La longue période de grèves que nous traversons et qui menace de se perpétuer épuise chaque jour les caisses des sociétés ouvrières sans amener d’autre résultat que de faire ressortir l’immoralité des moyens qu’emploient les détenteurs du capital pour se soustraire aux réclamations toujours modérées des prolétaires. La situation économique n’est pas changée elle est encore la même. Partout les détenteurs du capital se sont montrés indignes ; car partout s’appropriant arbitrairement le produit du travail des générations passées et de la génération présente, ils se servent des instruments que le hasard de la naissance, la spéculation ou l’exploitation ont mis entre leurs mains pour tenir le prolétariat en lisière. L’introduction dans l’industrie des machines et des procédés scientifiques qui aurait dû améliorer les conditions physiques, morales et intellectuelles des travailleurs, n’a contribué, au contraire, qu’à aggraver leur sort. Non content d’étouffer dans l’ouvrier la vie intellectuelle et la vie morale, les industriels lui ravissent encore la vie animale par l’excès de travail et les privations en maintenant une partie des travailleurs dans le chômage, et en surchargeant l’autre partie d’un travail excessif. On peut dire sans exagération qu’ils font lentement mourir les uns de faim et les autres d’épuisement. Ils ne tuent pas ils font mourir. Comme l’a dit le docteur Bridges : « Au sein de nos grandes et grandissantes cités il y a des plaies en comparaison desquelles les massacres féodaux semblent des combinaisons heureuses. Il est terrible que le sang soit versé, mais il est autrement terrible qu’il se dessèche et se consume. » En un mot, ils mettent constamment les travailleurs dans l’alternative de subir des conditions impossibles ou de tomber sous les balles fratricides comme à Lépine, Dour, Seraing, Frameries, La Ricamarie et Aubin. En présence de cette situation que pouvons-nous faire ? Les grèves se multiplient, révélant toujours des abus de même nature et sont successivement vaincues, l’obole de solidarité que l’ouvrier prélève sur son nécessaire, l’association même sont manifestement insuffisants, le mal est trop profond, il faut d’autres remèdes. Ce remède ne peut être que dans une transformation radicale de notre état social. Cette transformation radicale, objet de tous nos vœux, nous l’appelons de toute notre énergie. Paris, le 31 décembre 1869 A. Combault, rue de Vaugirard, 289. E. Varlin, rue Dauphine, 33. B. Malon, impasse Saint-Sébastien, 8, G. Mollin, impasse Saint-Sébastien »
« Quoique nous ne soyons pas disposés à suivre les libéraux de l’empire dans la voie des petites réformes et que nous n’attachions que peu d’importance à toutes ces petites mesures, à toutes ces libertés spéciales que l’on nous accorde avec tant de réticence, nous qui prétendons arriver au plus vite à la possession de tous nos droits, à la vraie liberté, celle qui les contient toutes, nous ne devons cependant pas laisser passer une occasion d’amoindrir l’obstacle qui nous gêne, en attendant que nous puissions l’anéantir complètement. Plus il sera ébranlé, plus il sera affaibli et moins nous aurons de peine lorsqu’il faudra donner la dernière secousse. D’ailleurs les institutions d’un peuple ne peuvent se changer qu’autant que ses mœurs se modifient. Pour préparer la République, il faut nous habituer à en pratiquer les usages autant que nous le pouvons, dans toutes les occasions… Voyez nos sociétés ouvrières de toutes sortes : Crédit mutuel, résistance, solidarité, chambre syndicale, etc., partout la présidence autoritaire, dernier vestige de l’idée monarchique, est bannie de nos organisations, partout nos statuts et règlements, nos lois à nous, sont discutés et votés directement par ceux qui doivent les respecter…Nous devons savoir par expérience que les lois ne sont ordinairement abrogées par les législateurs que quand les mœurs publiques les ont annulées de fait en en rendant l’application impossible. Agissons donc »



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