« Quelques rencontres inopportunes, aussi bien au temps
de l’occupation qu’en 1962 ou en 1968, me conseillaient cette indispensable
réserve envers ces contemporains qui n’étaient pas de mon monde. Très
simplement, les policiers faisaient partie de ceux d’en face, de cette
catégorie d’humanoïdes dont il n’était pas souhaitable de rechercher la
compagnie. »
« Pourtant, le 22 juillet 1977, en appel, les deux
journalistes étaient relaxés à la suite d’une plaidoirie de leur défenseur, qui
avait fait remarquer qu’il était « conforme à l’intérêt général que la
police, chargée de protéger les citoyens et de faire respecter les lois,
s’abstienne de toute irrégularité, et garde en toutes circonstances son
sang-froid, que ces manquements répétés à ces règles d’action sont de nature à
altérer les rapports de confiance qui doivent exister entre la population et
les fonctionnaires de police* ».
« « Les brigades anticriminalité (BAC) représentent
un trouble permanent à l’ordre public, dans les quartiers populaires et les
banlieues. Par leurs interventions provocatrices violentes et fréquemment
racistes, les BAC constituent un ferment de haine et créent régulièrement des
situations de conflit. Alors qu’il est surtout question de médiation et de
prévention dans le discours du ministre de l’Intérieur, l’intervention des BAC
tend à exacerber la haine plutôt qu’à faciliter la paix sociale. C’est pourquoi
nous demandons la dissolution de ce corps de police qui n’a pas sa place dans
une société démocratique digne de ce nom. » »
La réalité peut dépasser la fiction ! Après avoir vu des
gendarmes mobiles et des CRS défoncer à la hache les portes de l’église Saint Bernard,
nous savons désormais que, dans un avenir proche, les forces de l’ordre
n’hésiteront pas davantage, le cas échéant, à s’attaquer aux portes des locaux
syndicaux ou des partis politiques. À ce stade, il ne s’agit que d’échelons à
franchir dans l’escalade répressive. Lorsque de telles interventions paraissent
naturelles à des hommes chargés d’assurer la sécurité des personnes et des
biens – mission de base de la police –, il y a de quoi être inquiet. En effet,
la déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne stipule-t-elle pas dans
son article 12 : « La garantie des droits de l’homme et du
citoyen nécessite une force publique. Cette force est donc instituée pour
l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est
confiée… » ? Un autre rappel nous paraît important : l’article 7 du
code de déontologie de la police nationale, décrété le 18 mars 1986, est
sans équivoque : « placé au service du public, le fonctionnaire de
police se comporte envers celui-ci d’une manière exemplaire. Il a le respect
absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, leur
condition sociale ou leurs convictions politiques, religieuses ou
philosophiques. » Encore une petite, pour la route ? dans le même code, il est
dit, à l’article 10 : « toute personne appréhendée est placée
sous la responsabilité et la protection de la police, elle ne doit subir, de la
part des fonctionnaires de police ou de tiers, aucune violence, ni aucun
traitement inhumain ou dégradant. » hélas, la réalité peut dépasser la
fiction… octobre 1996. »
« Un exemple de brutalité ordinaire : après un passage dans
les locaux de la 4e division de la police judiciaire, à paris, un détenu s’est
retrouvé avec « une fracture des deux branches mandibulaires, des
ecchymoses dorsales stellaires compatibles avec un coup ou un écrasement par
une semelle de soulier… » En conclusion de son rapport, le Cpt rappelle
que « rien ne saurait justifier que des membres des forces de l’ordre
brutalisent une personne, dès lors qu’elle est maîtrisée ». On ne saurait
mieux dire… Juin-juillet 1998. »
« Peine de mort
Faudra-t-il, bientôt, constituer un comité pour l’abolition
de la peine de mort ? En effet, il devient trop fréquent de lire dans la presse
qu’un citoyen de ce pays est tombé sous les balles d’un policier ou d’un
gendarme – lesquels n’étaient nullement en situation de légitime défense.
Certes, il serait faux d’affirmer que les quelque 225 000 membres des forces de
l’ordre sont tous animés par cet instinct de mort qui conditionne les
mercenaires. Il nous faut pourtant constater que nombre de ces hommes se
comportent bien plus en justiciers – ce qui n’est pas leur rôle – qu’en
gardiens de l’ordre public chargés de la protection des personnes et des biens.
D’où ces dérapages meurtriers qui nourrissent trop souvent la chronique. Pour
un oui ou pour un non, sans raison, l’arme sort de son étui, se fait menaçante,
et le coup part – accidentellement, nous dit-on. Ce n’est que par hasard, bien
sûr, si la balle arrive à la tête ou dans un organe sensible. Jamais dans les jambes.
Il serait plus que temps d’en finir avec cette idéologie sécuritaire qui
alimente la hargne de trop nombreux policiers. Il serait temps de rejeter du
corps policier les violents et les racistes, comme tous ceux qui ignorent tous
des droits de l’homme à la peau colorée. Il serait temps, dans les écoles de
police, d’apprendre aux futurs gardiens de la paix comment ne pas se servir de
leur arme… Mars 1999. »
« Trop malpolis pour être honnêtes Monsieur Sarkozy, si
vous appreniez la politesse à vos fonctionnaires, la banlieue serait peut-être
plus calme. Outre le tutoiement, quasi habituel, destiné aux « individus » que
nous sommes, de plus en plus de policiers s’attribuent le droit d’injurier ceux
qu’ils interpellent. Il nous revient de sources multiples, chaque jour plus
nombreuses, que le traitement verbal réservé aux immigrés colorés en général,
et aux Maghrébins en particulier, atteint désormais un niveau insupportable
pour les oreilles d’un citoyen élevé dans les principes de la République des
droits de l’homme. Les « sale bougnoule » ou « sale raton »
bien connus sont complétés par des mots tendres tels que « déchet » ou bien «
ordure ». Les femmes sont également victimes, à l’occasion, d’un vocabulaire
dont la galanterie est totalement exclue lorsqu’elles sont l’objet de la fureur
des forces de l’ordre. Ainsi, « morue » ou « salope », voire « putain » ou «
connasse », ou encore « pétasse », quand ce n’est pas plus suggestif :
« va te faire sauter. » Quant au commun des mortels, même interpellé par
erreur, il n’est pas rare qu’il puisse s’entendre qualifier de « fumier » ou de
« salaud ». Si l’on se réfère au guide pratique de la déontologie de la police
nationale édité en 1999, on y trouve à propos de « l’image de la fonction
policière » ce rappel indispensable : « Comment conserver sa
dignité aux yeux du public ? En prescrivant les excès de langage, les
familiarités, les gestes déplacés. En faisant preuve de retenue dans les actes
et propos. » nous ne trouvons rien d’autre à ajouter à cette leçon de
morale. Novembre 2002. »
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