lundi 24 février 2020

Le mythe Bolchévik par Alexander Berckman



« Dans les cercles mencheviques , le sentiment envers les bolcheviques est très amer. L'opinion générale parmi eux est que les communistes, qui auparavant étaient des sociaux-démocrates, ont trahi Marx et discrédité le socialisme. R. les appelle « les révolutionnaires asiatiques » . Il n'existe pas de différence entre Trotski et le bourreau Stolypine , affirme-t-il, leurs méthodes sont identiques. De fait, il y avait plus de vie politique sous Nicolas II qu'il n'y en a aujourd'hui. Les bolchéviks, qui se prétendent Marxistes, pensent qu'ils vont changer la loi immuable de l'évolution sociale par des décrets et la terreur : qu'ils vont, pour ainsi dire, sauter plusieurs marches d'un coup sur l'échelle du progrès. La révolution de Février était essentiellement bourgeoise , mais Lénine a tenté par la violence d'une minorité insignifiante de la transformer en révolution sociale. Il en résulte la débâcle complète de tous les espoirs. R. pensent que les communistes ne pourront plus se maintenir longtemps au pouvoir. La Russie est au bord de l'effondrement économique total. Les anciennes réserves alimentaires sont épuisées, la production a quasiment cessé. La militarisation du travail a échoué. Les calculs de Trotski concernant l'augmentation progressive de la production sur le « front du travail » ont explosé comme l'ont fait les prophéties bolcheviques concernant la révolution mondiale. L'usine n'est pas un champ de bataille. Convertir le pays en camp de travaux forcés n'est pas propice à l'effort créatif Cela n'a fait que diviser le peuple en esclaves et esclavagistes, et a crée une classe puissantes de bureaucrates soviétiques. Encore plus important, cela a retourné les ouvriers les plus progressistes contre les communistes. Désormais, les bolcheviques ne peuvent plus compter ni sur le paysan, ni sur le prolétariat ; tout le pays est contre eux. Si il n'y avait pas la politique stupide des alliés, ils auraient été balayés depuis longtemps. Le blocus et les invasions ont joué en leur faveur. Les bolchéviks ont besoin de la guerre pour se maintenir au pouvoir, l'actuelle campagne en Pologne leur convient à merveille. Mais c'est la dernière goutte qui va faire déborder le vase. Il va se briser , et ce sera la fin de la sanglante expérience bolchevique. « L'histoire les retiendra pour avoir été les ennemis jurés de la révolution. » conclut R. d'un ton catégorique. » »

« La question reste ouverte de savoir si les bolchéviks avaient un accord officiel avec les voleurs, dit Z l'enquêteur littéraire. Mais nous savons tous qu'ils ont coopéré à un moment donné. Il faut dire qu'ils étaient aussi des prolétaires , ajoute-til d'un ton sarcastique. Plus tard, il est vrai, les communistes se sont retournés contre eux. Mais c'est le sort qu'ont connu la plupart d'entre nous. Les socialistes-révolutionnaires de gauche, les maximalistes et les anarchistes ne se sont-ils pas battus tous ensemble avec les communistes contre les blancs ? Et maintenant , où sont-ils ? Ceux qui ne sont pas morts au front ont été fusillés ou emprisonnés par les dictateurs rouges , à moins d'avoir été soudoyés ou intimidés pour servir la Tcheka. »

« La discussion la plus animée tourne autour de la dictature du prolétariat. C'est le problème fondamental , déterminé par la conception, que l'on se fait de la révolution, laquelle détermine à son tour l'attitude que l'on a vis-à-vis des bolchéviks. Les plus jeunes condamnent sans réserve la dictature du parti pour sa violence et ses effusions de sang , ses mesures punitives et ses effets contre-révolutionnaires en général. Les anarchistes sovietski , bien qu'ils regrettent le caractère impitoyable des manières communistes, estiment que la dictature est inévitable à certains stades de la révolution. La discussion se prolonge durant des heures, et la question essentielle est éclipsée par les affirmations théoriques. J'ai le sentiment que les années de tumulte et de contrainte ont entièrement déracinée les anciennes valeurs sans qu'aient été clarifiés de nouveaux concepts en terme de réalité et de vision. »
« Deux des soldats qui avaient participé à la campagne de Makhno racontaient ce qu'ils avaient vécu. Ils parlaient librement de ses exploits, des méthodes originales qui lui permettaient de vaincre des forces largement supérieures , et des multiples fois où, encerclé par les armées blanches ou rouges, il avait réussi à s'échapper , souvent d'une façon qui tenait du miracle. Ils admiraient la ruse habile avec laquelle Makhno avait pris Ekaterinoslav , alors aux mains de Petlioura. Une poignée de ses hommes , habillés en paysans, avaient traversé le pont qui menait à la partie inférieure de la ville, leurs armes dissimulées dans des charrettes. Arrivés de l'autre côté, ils avaient ouvert le feu de manière inattendue sur les hommes de Petlioura qui gardaient les approches . L'attaque soudaine avait semé la panique dans la garnison, et l'armée de Makhno s'était emparée facilement de la ville. »

« Tous les deux avaient été faits prisonniers par Makhno. Ils avaient cru leur dernière heure arrivée quand on les avait conduits avec d'autres captifs devant le redouté bat'ka. Un jeune homme élancé aux yeux vifs et perçants les avait regardés sévèrement en se mettant à les haranguer . Il disait que que les commissaires bolcheviques ne valaient pas mieux que les généraux blancs , que les uns comme les autres opprimaient le peuple et volaient les paysans. Lui, Makhno , défendrait la révolution contre tous ses ennemis. Il promettait que les prisonniers auraient le choix entre se rallier aux povstantsi ou rentrer chez eux, mais les soldats rouges avaient peur qu'il se moque d'eux. Cependant, il avait tenu parole. »

« Toutes les pensées se tournent vers la reconstruction économique. Les cercles communistes et la presse officielle sont perturbées par la discussion sur le rôle que doivent avoir les travailleurs dans la situation actuelle. Il est admis que la militarisation du travail a échoué. Ses effets, loin de se relever productifs, comme on l'avait prétendu, ont eu pour conséquence la désorganisation et la démoralisation. Le nouveau rôle à assigner au prolétariat est le problème brûlant mais il n'y a pas d'unité d'opinion parmi les dirigeants blochéviks . Lénine soutient que les syndicats ne sont pas préparés à diriger les industries : leur mission principale est de servir d' « écoles du communisme », en apportant progressivement une participation croissante dans le domaine économique. Zinoviev et ses partisans font cause commune avec Lénine et élaborent ses idées. Mais Trotski est en désaccord et insiste sur le fait que les ouvriers seront inaptes pendant encore longtemps à diriger les industries. Il réclame un « front ouvrier » , soumis à la discipline de fer d'une campagne militaire . Opposés à cette idée, les éléments ouvriers prônent la démocratisation immédiate du secteur industriel . Ils maintiennent que l'exclusion des syndicats d'un rôle décisif dans la vie économique est lé véritable cause de cette situation déplorable. Ils sont convaincus que le prolétariat révolutionnaire, qui a vaincu toute opposition armée, saura également surmonter l'ennemi dans le domaine économique. Mais il faut en donner la possibilité aux ouvriers : c'est en agissant qu'ils apprendront. »

Les événements de Kronstadt :

Message de radio Moscou :
« Petrograd est calme et en bon ordre , et même les quelques usines où avaient été formulées des accusations contre le gouvernement soviétique comprennent à présent que c'étaient l'oeuvre de provocateurs...Au moment précis où un nouveau régime républicain prend les rênes du gouvernement en Amérique et montre la volonté de rétablir des relations commerciales avec la Russie soviétique , propager des rumeurs mensongères et organiser des troubles à Kronstadt a pour seul but d'influencer le président américain afin qu'il change sa politique vis-à-vis de la Russie. Au même moment, , la conférence de Londres tient ses sessions et la propagation de rumeurs similaires doit également influencer la délégation turque pour la rendre plus soumise aux exigences de l'entente. La rébellion de l'équipage du petropavlosk fait indubitablement partie d'une vaste conspiration qui cherche à semer le trouble en Russie soviétique et à nuire à notre position internationale ...Ce plan est mené en Russie par un général et d'anciens officiers tsaristes , et leurs activités sont soutenues par les mencheviks et les socialistes-révolutionnaires. »

Une résolution a été votée par les marins de Kronstadt :

« Résolution de l'assemblée générale des équipages des I et II escadrons de la flotte de la Baltique tenue le 1 mars 1921 :

Ayant pris connaissance du rapport des représentants envoyés par l'assemblée générale des équipages des bateaux à Petrograd pour y étudier la situation , il a été décidé :

  1. au vu du fait que les soviets actuels n'expriment pas la volonté des ouvriers et paysans , de tenir immédiatement de nouvelles élections à bulletin secret, la campagne pré-électorale se déroulant dans une liberté totale parmi les ouvriers et les paysans.
  2. D'établir la liberté d'expression et de la presse pour les ouvriers et les paysans, les anarchistes et les partis socialistes de gauche ;
  3. de garantir la liberté de rassemblement pour les syndicats ouvriers et les organisations syndicales ;
  4. de réunir une conférence non partisane des travailleurs , de soldats de l'armée rouge et de marins de Petrograd , de Kronstadt et de la province de Petrograd , pas plus tard que le 19 mars 1921 ;
  5. de libérer tous les prisonniers politiques des partis socialistes, ainsi que tous les ouvriers, paysans, soldats et marins emprisonnés liés aux mouvements ouvriers et paysans ;
  6. d'élire une commission chargée de réexaminer les cas de ceux qui sont détenus en prison et dans les camps de concentration ;
  7. d'abolir tous les politodeli ( bureaux politiques) étant donné qu'aucun parti ne devrait bénéficier de privilèges spéciaux pour propager ses idées, ni recevoir de soutien financier du gouvernement dans ce but. A leur place , il faudrait établir des commissions éducatives et culturelles, élues localement et financées par le gouvernement ;
  8. d'abolir immédiatement tous les zagraditelniye otryadi (unités armées organisées par les bolchéviks dans le but d'éradiquer le trafic et de confisquer les denrées alimentaires et d'autres produits. Leurs méthodes irresponsables et arbitraires étaient proverbiales dans tout le pays);
  9. de rendre égales les rations de tous ceux qui travaillent, à l'exception de ceux qui sont employés dans des métiers nocifs pour la santé ;
  10. d'abolir les détachements communistes de combat dans tous les secteurs de l'armée, ainsi que les gardes communistes encore en service dans les fabriques et les usines. Si de tels gardes ou détachements militaires se révèlent nécessaires, ils doivent être désignés dans l'armée selon les grades, et dans les usines en fonction du jugement des ouvriers ;
  11. de donner aux paysans une totale liberté d'action par rapport à leur terre , et également le droit d'avoir du bétail , à condition que les paysans y pourvoient par leurs propres moyens , c'est-à-dire sans engager de main d'oeuvre
  12. de demander à tous les secteurs de l'armée, ainsi qu'à nos camarades , les kursanti militaires, de s'entendre sur nos résolutions
  13. de réclamer pour ces derniers la publicité dans la presse
  14. de désigner une commission de contrôle itinérante,
  15. de permettre la libre production kustarnoye ( individuelle et à petite échelle), par ses efforts personnels.
Résolution adoptée à l'unanimité par la réunion de brigade , deux personnes s'abstenant de voter.
Petrichenko président de la réunion de brigade
Perepelkine secrétaire

résolution adoptée à une majorité écrasante par la garnison de Kronstadt , Vassiliev Président
Kalinine et Vassiliev, votent contre la résolution. »

Trotski lance un ultimatum :

« Le gouvernement des travailleurs et des paysans a décrété que Kronstadt et les bateaux en rébellion doivent se soumettre immédiatement à l'autorité de la République soviétique. Par conséquent, j'ordonne à tous ceux qui ont levé la main contre la patrie socialiste de déposer les armes immédiatement. Ceux qui s'obstinent seront désarmés et remis aux autorités du soviet. Les commissaires et les autres représentants du gouvernement qui ont été arrêtés doivent être libérés sur-le-champ. Seuls ceux qui se rendront sans condition pourront compter sur la clémence de la république soviétique.
En même temps, je donne des ordres pour procéder à la répression de la mutinerie et soumettre les insurgés à la force des armes. La responsabilité pour le mal que pourrait subir la population pacifique retombera entièrement sur les mutins contre-révolutionnaires.
Cet avertissement est le dernier.

Trotski,
Président du soviet militaire révolutionnaire de la république
Kamenev,
Commandant en chef »

Les anarchistes proposent leur aide :

« Président Zinoviev,

Garder le silence est devenu impossible, voire criminel. Les récents événements nous poussent, nous les anarchistes, à prendre la parole et à déclarer notre position dans la situation présente.
L'effervescence manifeste parmi les ouvriers et les marins est le résultat de causes qui réclament une sérieuse attention de notre part. Le froid et la faim ont provoqué du mécontentement, et l'absence de toute possibilité de discuter et de critiquer oblige les ouvriers et les marins à faire connaître leurs doléances ouvertement.
Des bandes de gardes blancs veulent et pourraient tenter d'exploiter cette insatisfaction dans leurs propres intérêts. Se cachant derrière les ouvriers et les marins , ils lancent des slogans sur l'assemblée constituante , le commerce libre, et des exigences similaires.
Nous, les anarchistes, avons longuement fait valoir la fausseté de ces slogans, et nous déclarons au monde entier que nous combattrons par les armes toute tentative contre-révolutionnaire , en collaboration avec tous les amis de la révolution sociale et main dans la main avec les bolchéviks.
En ce qui concerne le conflit entre le gouvernement soviétique et les ouvriers et les marins, nous soutenons qu'il doit être réglé non par la force des armes, mais par un accord à l'amiable. Recourir à l'effusion de sang, de la part du gouvernement soviétique, étant donné la situation, n'intimidera pas et ne calmera pas les ouvriers. Au contraire, cela ne fera qu'aggraver les choses et renforcera l'emprise de l'entente et de la contre-révolution intérieure.
Plus important encore, l'usage de la force par le gouvernement des ouvriers et des paysans contre des ouvriers et des marins aura un effet démoralisant sur le mouvement révolutionnaire international et portera un tort incalculable à la révolution sociale.
Camarade bolchéviks , réfléchissez avant qu'il ne soit trop tard ! Ne jouez pas avec le feu : vous êtes sur le point de prendre une mesure importante et décisive. Nous vous soumettons par la présente proposition suivante : sélectionnez une commission constituée de cinq personnes, comprenant deux anarchistes. Cette commission se rendra à Kronstadt pour régler le différend par des moyens pacifiques . Compte tenu de la situation , c'est la méthode la plus radicale. Elle sera d'une portée révolutionnaire internationale.

Alexandre Berckman Emma Goldman, Perkus, Petrovski le 5 mars 1921 »

Le 6 mars Kronstadt lance un message à la radio :

« Notre cause est juste, nous sommes pour le pouvoir des soviets, non des partis. Nous sommes pour des représentants des masses laborieuses élus librement . Les soviets de substitution manipulés par le parti communiste sont toujours restés sourds à nos besoins et revendications ; la seule réponse que nous avons toujours obtenue a été de fusiller...des camarades ! Ils déforment délibérément la vérité et ont recours à la diffamation la plus ignoble...A Kronstadt, le pouvoir tout entier est aux mains des marins , des soldats et des ouvriers révolutionnaires - pas dans celles des contre-révolutionnaires menés par un certain Kozlovsky , comme la radio de Moscou qui ment essaye de vous le faire croire ...Ne tardez pas , camarades ! Rejoignez-nous, prenez contact avec nous : exigez que vos délégués soient admis à Kronstadt. Eux seuls vous raconteront toute la vérité et vous révéleront la calomnie diabolique au sujet du pain finlandais et des propositions de l'entente.
Longue vie au prolétariat et à la paysannerie révolutionnaires !
Longue vie au pouvoir des soviets élus librement ! »

« De sombres rumeurs circulent en ville . Trois cent détenus politiques auraient disparus de la Boutyrka. Enlevés de force pendant la nuit, certains auraient été exécutés. La tchéka refuse de donner des informations.
Plusieurs jours se passent dans les affres de l'incertitude – plusieurs de mes amis font partie des disparus. Les gens qui vivent à proximité de la prison parlent de cris effrayants entendus cette nuit-là , ainsi que des bruits d'une lutte désespérée. Les autorités affirment n'être au courant de rien. »

« Les détenus politiques n'ont pas participé à la manifestation. Isolés dans une aile à part, ils avaient obtenue certaines concessions grâce à une action collective. Leur situation était nettement plus tolérable que celles des prisonniers de « droit commun ». Toutefois, par fraternité humaine, ils ont décidé d'intervenir. Leurs récriminations ont incité la Tchéka à reconnaître que les revendications des grévistes de la faim étaient justes et à promettre une amélioration immédiate. De sorte que les droits communs ont mis fin à leur grève, et que l'incident semblait clos.
Cependant, quelques jours plus tard, dans la nuit du 25 avril, un détachement de soldats et de tchékistes a fait irruption dans la prison. Une à une, les cellules des détenus politiques ont été attaquées, les hommes battus et les femmes tirées par les cheveux dans la cour , la pluspart en chemise de nuit. Plusieurs des victimes , craignant d'être exécutées, ont résisté. Des coups de crosse de fusil et de revolver les ont réduits au silence. Maîtrisés , on les a forcés à monter dans des voitures pour les emmener à la gare. »


Communiqué des bolchéviks aux anarchistes emprisonnés :

« Camarades, au vu du fait que nous sommes arrivés à la conclusion que votre grève de la faim ne peut aboutir à votre libération , nous vous invitons par la présente à y mettre fin.
En même temps, nous vous informons que des propositions précises nous ont été faites par le camarade Lounatcharski , au nom du comité central du parti communiste : a savoir :
  1. tous les anarchistes détenus dans les prisons de Russie , et qui font actuellement la grève de la faim, seront autorisés à partir dans le pays de leur choix. Il leur sera procuré des passeports et des fonds.
  2. En ce qui concerne les autres anarchistes emprisonnés ou sortis de prison , le parti prendra demain des mesures définitives. Le camarade Lounatcharski est d'avis que la décision les concernant sera similaire à celle annoncé ci dessus.
  3. Nous avons reçu la promesse avalisée par Unszlicht que les familles des camarades qui partiront à l'étranger seront autorisés à les suivre si elles le désirent. Afin d'éviter toute conspiration, il devra s'écouler un certain temps avant que cela se fasse
  4. Les camarades partant pour l'étranger disposeront de deux ou trois jours de liberté avant leur départ de façon à leur permettre de mettre en ordre leurs affaires.
  5. Ils n'auront pas le droit de revenir en Russie sans le consentement du gouvernement soviétique.
  6. La plupart de ces conditions sont mentionnées dans la lettre que cette délégation a reçue du comité central du parti communiste par Trotski
  7. Les camarades étrangers ont été autorisés à veiller à ce que ces conditions soient appliquées en bonne et due forme.

Signatures : Orlandi (Espagne)
Leval ( Espagne)
Sirolle ( France)
Michel ( France)
A. Shapiro ( Russie)

Le communiqué ci dessus est validé signé Lounatcharski

Kremlin Moscou

Alexandre Berckman refuse de signer :
  • il est opposé par principe à l'expulsion
  • il considère que cette lettre est une réduction arbitraire et injustifiée de la proposition initiale du comité central selon laquelle tous les anarchistes étaient autorisés à quitter la Russie
  • Il demande que soit laissé plus de temps en liberté à ceux qui seront relâchés afin de leur permettre de récupérer avant d'être expulsés. »


« Aujourd'hui, à midi, les grévistes de la faim ont été relâchés de la Taganka , deux mois après que le gouvernement s'est engagé à les libérer. Les hommes ont l'air épuisés , vieillis, dépéris par l'angoisse et les privations. On les a placé sous surveillance et on leur a interdit de rencontrer leurs camarades. On dit qu'il se passera des semaines avant qu'on leur donne la possibilité de quitter le pays. Ils ne sont pas autorisés à travailler et n'ont aucun moyen de subsistances. La Tcheka annonce que les autres détenus politiques ne seront pas libérés. Des arrestations de révolutionnaires ont lieu dans tout le pays. »

« Les jours qui passent sont gris. Les braises de l'espoir se sont éteintes une à une. La terreur et le despotisme ont broyé la vie qui avait vu le jour en Octobre. On a abjuré les slogans de la révolution , étouffés ses idéaux dans le sang du peuple. Le souffle du passé condamne des millions d’êtres à la mort ; l'ombre du présent plane tel un voile noir au dessus du pays. La dictature piétine les masses populaires. La révolution est morte, son esprit hurle dans le vide.
Il est grand temps de dire la vérité sur les bolchéviks . Il faut démasquer le sépulcre blanchi, dévoiler les pieds d'argile du fétiche qui a entrainé le prolétariat international vers des feux follets fatals. Le mythe Bolchévik doit être détruit.
J'ai décidé de quitter la Russie. »


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